Chapitre 50

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Le vent apporte le changement et emporte les premières feuilles de l'automne. Les fines pluies de la saison nouvelle recouvrent les champs dans lesquels on effectue les dernières récoltes avant que le froid ne s'installe dans le reinaume de Diopelfe. Le peuple ressort des coffres ses capes de laine, ses mitaines en jute et ses chapeaux de feutre. Mais aujourd'hui, il s'affaire à décorer les chaumières de guirlandes de feuilles, de pommes de pin et de fruits et légumes de saison. Les bougies colorées sertissent les fenêtres, mais ne seront pas allumées avant le soir. Quant aux gardiens et aux servants, ils rangent les salons, nettoient les tapis, lustrent le carrelage. L'odeur de pain au maïs embaume les cuisines et se propage jusqu'à la salle de bal, et celle des tartes aux pommes attirent les gourmands qui se postent sous les fenêtres pour espérer en récupérer une. Des tonneaux de vin arrivent de partout à travers le reinaume tandis que quelques commis distribuent le liquide dans des carafes brillantes en cristal. Car aujourd'hui nous fêtons l'équinoxe d'automne. C'est l'occasion parfaite de réunir le peuple et les gardiens pour une soirée de fête.

Les quelques dernières tensions sont bien retombées ces dernières semaines. Le retour de la magie pour chacun a été accueilli comme une bénédiction, bien que quelques-uns soient restés méfiant un temps. Mais Mirelty a su parfaitement gérer la mise en place de son apprentissage à l'école et les patrouilles de Valerian dissuadent quiconque de tenter d'agir avec de mauvaises intentions. La magie est encore très encadrée, mais je ne saurai tarder à accorder plus de liberté lorsque je serai certaine qu'elle n'est plus un danger ou utilisée pour se rebeller. Je suis encore plus heureuse de savoir que le peuple ne me déteste pas après toutes ces révélations et ses changements inattendus.

Elowyn arrive dans la salle du trône au moment où je m'y trouve pour constater l'avancée des préparatifs. Elle s'incline devant moi et redresse la bretelle de son tablier en cuir qui se fait la malle.

— Nous sommes rentrés de la prison. La garde de la magie est parfaitement opérationnelle.

— Très bien. Comment s'est passé votre entrevue avec Mayela ? Elle n'a pas tenté de leur faire entendre des sottises ?

— Non, votre Majesté, elle s'est tenue à carreaux. J'y ai bien veillé. Par ailleurs, quelques anciens membres de la garde semblaient ravis de la retrouver et elle aussi. Elle a été de bon conseil.

— Parfait. Avez-vous repéré quelqu'un qui serait apte à devenir le chef de garde ?

— Pas encore, mais j'y travaille.

— Merci, Elowyn. Avoir deux gardes à gérer en même temps ne doit pas être facile, mais j'ai confiance en vous. Le temps où vous ne vous occuperez plus que de vos alchimistes est proche, ne vous en faites pas.

— Je suis heureuse de voir cette garde de retour. Si je peux aider à la reconstituer et à faire en sorte qu'elle soit fonctionnelle, alors je compte bien y parvenir. Et puis les gardiens sont heureux de retrouver le palais, autant que les nouveaux de le découvrir.

Je la gratifie d'un sourire. La cheffe de garde travaille dur ces derniers temps, mais elle le fait de bon cœur. Malgré sa petite taille et son air enfantin, Elowyn a les épaules solides et mène ses hommes d'une main de fer. Son amour pour l'alchimie n'a pas de limite, comme celui qu'elle porte au bonheur des autres.

Son nez frétille et étire un sourire à ses lèvres. Elle fait demi-tour pour retourner avec les nouveaux gardiens restés dans la salle qui leur est réservé, mais je la stoppe avant qu'elle ne franchisse le pas de la porte de sortie.

— Avez-vous des nouvelles ? demandé-je, la voix hésitante.

— Toujours pas... Mais je suis sûre qu'il va bien, répond-elle avec un air faussement assuré.

Le secret des reines de DiopelfeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant