Chapitre 19

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Je frappe à la porte. Personne ne répond. Il n'y a personne non plus dans les passages secrets ou les bureaux. Je dois me rendre à l'évidence, il n'est pas dans le palais. Défaitiste et abattue par cette journée ayant mis mes nerfs à rude épreuve, je fais demi-tour. Mon corps est tellement tendu et à bout de forces que j'ai l'impression qu'il pourrait lâcher à tout instant, m'effondrant dans l'entrebâillement de la porte menant à l'aile des chefs de garde.

Mais à peine fais-je quelques pas que je manque de le percuter. Nous avons l'air tout aussi surpris l'un que l'autre.

— Votre Majesté, je vous cherchais. Je reviens de vos appartements.

— Et moi des vôtres, sénéchal.

Un silence pesant s'installe avant que nous ne balbutions quelques mots incompréhensibles en même temps. Je l'encourage à s'exprimer, ne sachant pas encore ce que je vais dire.

— Bien... souffle-t-il. Je tenais à m'excuser de mon comportement d'hier. J'ai franchi des limites que je n'aurais pas dû à cause de la fatigue, ce qui n'excuse en rien mes paroles, et j'ai tendance à oublier ma place et à qui je m'adresse, étant face à une figure d'autorité depuis peu. Je suis sincèrement navré et je comprendrais que vous souhaitiez me mettre à pied.

— C'est moi qui devrait m'excuser, je réponds. Encore une fois, je me suis montrée indigne de mon rang. S'il y a bien une chose que j'apprécie chez vous, c'est votre sincérité, et je ne peux vous la retirer. Vous avez été franc et vous avez eu raison de l'être. Vous avez eu raison de me recadrer, ou plutôt de m'avoir dit ce qui pesait sur vous. Comme vous l'avez dit, je pense que c'est une bonne chose de communiquer si nous voulons que les choses fonctionnent.

Ezeckiel hoche la tête.

— Vous m'en voyez rassuré... finit-il par souffler.

Le silence qui s'installe devient un peu gênant. J'ai l'impression d'avoir d'autres choses à lui dire, ce n'est pas vraiment un impression d'ailleurs, mais les mots refusent de sortir de ma bouche.

— Que diriez-vous de poursuivre dans un salon ? Nous serions peut-être plus à l'aise qu'en plein milieu du couloir...

J'acquiesce. Le sénéchal refuse de s'installer dans le premier salon que nous croisons pour venir s'installer dans un autre un peu plus loin. Un chandelier est allumé, suspendu au plafond, ainsi que quelques lampes sur les tables d'appoint près des divans et sur la cheminée de marbre. Je vois à travers la grande fenêtre que la Lune est déjà haute dans le ciel orangé, encore un peu éclairé par le Soleil.

Tandis que je m'installe sur un canapé beige dont le sommet est recouvert de moulures dorées, le sénéchal s'agenouille sur celui qui se trouve sur le côté.

— La soirée sera plus agréable comme ça, dit-il.

Il plonge son bras derrière le divan et le ressort avec une bouteille de vin rouge, de moins bonne qualité qu'un vin bleu ou vert, puis attrape un coffret recouvert d'un napperon blanc, contenant quatre verres à pied dont le verre a été modulé de sorte à ressembler à trois feuilles d'érable accolées ensemble.

— Y a-t-il des bouteilles de vin cachées un peu partout dans le palais ? je demande, entre la surprise et l'amusement.

— Oh, ça ? Bien sûr que non ! répond le sénéchal en chassant l'air de sa main.

La bouteille semble avoir déjà été entamée. Un verre ou deux, peut-être. Le sénéchal retire le bouchon qui émet un petit bruit avec les dents, puis remplit un verre après l'autre en m'en tendant un. Je l'accepte volontiers. Nous trinquons et avalons chacun une gorgée.

Le secret des reines de DiopelfeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant