Chapitre 10, dans lequel Caitlin informe Nan du nouvel ordre planétaire

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Suivi de Nan et de Caitlin, Arnaud se précipita vers l'étage supérieur dès qu'ils entendirent le vacarme provenant de l'entrée du bunker. Alors qu'ils marchaient dans le couloir qui menait à la chambre des parents, il jeta un coup d'œil derrière lui. L'humanoïde n'eut aucune réaction, n'essaya même pas de voir à l'intérieur de la pièce. Elle passa sans émotion devant la porte fermée et le suivit jusqu'à l'entrée du bunker. Elle acceptait le nouvel ordre du monde sans se poser de questions, ce qui lui convenait et le déconcertait tout à la fois. Mais que connaissait-il à la psychologie des robots, de toute façon?

Sa priorité, à ce moment, était de savoir qui frappait aussi furieusement à la porte. Ils restèrent tous les trois quelques instants au pied de l'escalier en colimaçon qui menait à leur niveau et regardèrent vers le haut, d'où venaient les coups, en se demandant combien de temps le mur allait tenir. Chaque impact délogeait d'innombrables grains de poussière qui voltigeaient dans la lumière froide des lampes.

― Quelqu'un a dû nous voir entrer ici, c'est sûr, dit-il. Mais qui?

― Il y a un moyen de le savoir, répondit Nan.

Elle revint à l'intérieur, dans la pièce qui servait d'entrepôt. Elle s'activa quelques secondes devant le grand écran, dans le coin duquel elle fit apparaître un clavier holographique. À leur stupéfaction, une image se forma sur le moniteur, en grandeur réelle et en trois dimensions. Un jeune homme musclé, armé d'une masse, donnait des coups sur le mur et était en bonne voie de fracturer tout le revêtement de pierre, mettant à nu la cloison métallique. La caméra devait se trouver au niveau du palier. On devinait cependant, à la présence de plusieurs paires de pieds chaussées de bottes dans le haut de l'écran, qu'au moins dix personnes l'accompagnaient et se tenaient à l'étage.

― Est-ce qu'on peut avoir un autre angle de vue?

Nan manipula le clavier holographique et l'affichage se fractionna en douze images plus petites, dix présentant chacune une pièce de la maison, et deux montrant des scènes de l'extérieur. Une masse grisâtre et indistincte masquait en grande partie l'une de ces deux-là. Arnaud finit par comprendre que, sur le mur qui soutenait la caméra, des guêpes avaient autrefois construit un nid, maintenant abandonné. Ses vestiges avaient débordé sur la lentille, la recouvrant presque au complet. Quant aux autres scènes, celles de l'intérieur de la maison, la plupart montraient des pièces désertes. Mais l'une d'entre elles, qui présentait une vue plongeante du hall, était la plus intéressante.

― Peux-tu agrandir celle-là?

Nan frôla l'image qui occupa vite la totalité de l'écran. On voyait une bande de gars et de filles qui regardaient travailler celui avec la masse. Au centre de ce groupe, une vieille femme était assise dans un fauteuil qui avait dû être amené là spécialement pour elle. Arnaud fut frappé par l'autorité naturelle qui émanait d'elle malgré ses vêtements défraîchis, ses godasses boueuses et sa coiffure ébouriffée. Elle aimait commander, ça se voyait, et elle savait se faire respecter. Sa main reposait sur la tête d'un enfant, un garçon au regard vif, agenouillé à côté d'elle, et dont elle caressait distraitement les cheveux comme elle aurait flatté la tête d'un chien. Arnaud croyait bien l'avoir déjà rencontrée, mais l'angle de la caméra ne lui permettait pas d'en être certain.

― Je savais que ces systèmes de télésurveillance avaient existé, dit Caitlin, mais c'est la première fois que j'en vois un qui fonctionne encore aussi bien.

― Au bureau de Sécurpol, on en a eu un, autrefois, mais il est brisé depuis longtemps et les pièces sont introuvables, évidemment. Le vieux technicien qui arrivait à le réparer est mort il y a quelques mois, alors... J'ai bien peur qu'on doive apprendre à s'en passer. Dis-moi, Nan, qu'est-ce qu'il faut faire pour entrer en contact avec ces gens?

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