Chapitre 47 Luisa 4/4

162 26 2
                                    

Toute congelée, je décide de le rouvrir et relis très calmement ce qu'il y a d'écrit en page une. Je n'y crois pas, il appartient bien à celle que je redoutais. Alors, j'avais peut-être raison au sujet de mon appartement... Je le referme instantanément, je ne pense pas qu'il est de mon devoir de lire ce qu'il y a là dedans. Cependant, ma curiosité se fait plus téméraire que ma conscience. Il faut que je le lise, c'est plus fort que moi.

Malgré la petite voix intérieure qui désespère de me faire comprendre que c'est mal, et dont je me désintéresse complètement, car je suis persuadée que ce bouquin peut m'aider à apprivoiser la bête, Fabio. Du moins, si j'ose encore apparaître en face de lui un jour... Ce qui n'est pas gagné.

Rien que de penser à ce que j'ai fait cette nuit, je deviens rouge pivoine. C'est affreux ! Comment j'ai pu descendre dans sa cuisine, en simple tenue d'Eve ? Il a du prendre son pied. Qu'est-ce que je raconte ? Il doit surtout me prendre pour une folle, oui !

Je secoue ma tête de droit à gauche dans des mouvements saccadés. En effet, si je me sens un peu mieux, ce n'est toujours pas la grande forme. Mon cerveau porte encore le poids de l'alcool ingurgité par mes soins.

Je décrète à partir d'aujourd'hui d'éviter toutes boissons fortement alcoolisées. C'est pour cela que je n'achèterai plus de bouteilles au dessus de douze degrés. Je tiens à rester en vie !

Je tente d'oublier pour quelques minutes mon comportement de la veille pour me concentrer sur ce que je tiens entre mes mains. Je le feuillette sans m'attarder sur toutes les pages, mais cela m'amène à ne rien capter. Je le reprends donc du début.

Je fais défiler les pages une à une, en parcourant chaque phrase écrite et chaque mot employé, et ce que je découvre est stupéfiant.

Cette femme est une force de la nature. Elle s'est battue seule contre l'adversité, qui décidément a fini par l'emporter. Elle se savait malade. Elle n'a pas voulu alarmer ses proches. Elle voulait les protéger, et vivre pleinement les mois qui lui restaient, sans que personne n'ait pitié d'elle, du moins c'est ce qu'elle raconte dans son journal.

Elle n'était pas anorexique, comme j'ai cru le comprendre avec les mots de Manu et Avo. Elle avait un cancer à l'estomac. Elle a appris sa maladie, quelques temps après le décès de son père. Ça faisait déjà des semaines, voire des mois, qu'elle ne mangeait pas grand-chose, ne se sentant pas en grande forme et ballonnée en permanence. Dans un premier temps, elle pensait que son état était dû au deuil qu'elle s'efforçait d'affronter au côté des siens. Mais plus les semaines passaient, et plus sa santé déclinait. Elle prit la décision de consulter.

Ne voulant pas inquiéter sa famille, ni son fiancé, oui, vous avez bien entendu, elle était fiancée et devinez qui était l'heureux élu ? Le séduisant gentleman aux yeux émeraude : Manu. Voilà sûrement la raison pour laquelle Fabio le déteste autant. Quoique... Ces deux gars étaient comme les doigts de la main, inséparables. Ils faisaient tout ensemble. Ils devaient même se marier le même jour. Est-ce uniquement la mort de la sœur de Fabio qui a fait tout basculer entre eux ?

Cette fatalité aurait du, au contraire, les rapprocher, renforcer leur amitié. Vivre un tel évènement doit être terrible, et encore plus, si on le supporte seul. Je sais de quoi je parle. J'ai moi-même du affronter une épreuve similaire sans personne à qui me raccrocher.

Mais revenons à Joana, elle s'est rendue seule chez le médecin et après une batterie d'examens, la sentence est tombée. Elle était atteinte d'un cancer au stade terminal. Ses chances de survie étaient de l'ordre de zéro.

Les spécialistes ont essayé de la convaincre de se faire opérer, et de lui faire subir des séances de chimiothérapie pour prolonger un peu plus sa vie. Et tout comme je l'aurais fait, elle a refusé, ne voulant pas passer les mois qui lui restaient, enfermée entre quatre murs.

Je la comprends tellement. Les mois que j'ai passés à l'hôpital sans mettre les pieds dehors, ont été un vrai calvaire. Par moment, je me demandais si j'allais retrouver un jour la liberté. Je me sentais comme prise au piége, prisonnière.

Certaines pensées de ce journal, j'aurais très bien pu les écrire. D'ailleurs, beaucoup figurent dans mon roman Chaos.

Cette fille et moi, nous nous ressemblons énormément, je pense qu'on aurait pu être amies, si le destin n'avait pas œuvré contre nous. Nous avons des goûts identiques dans plusieurs domaines, la cuisine italienne, la décoration, le carpe diem, vis l'instant présent, et également en matière de mecs. A coup sûr, nous nous serions entretuées pour le même homme. Quoiqu'il en soit, elle n'est plus de ce monde, donc je n'aurais pas la chance de la connaître véritablement un jour.

Néanmoins, un doute subsiste dans toute cette histoire, je ne comprends toujours pas pourquoi tout le monde se sent responsable de sa mort... Elle était malade, même mourante, c'était inévitable. A moins que personne ne sache réellement les vraies raisons de sa disparition... Non ! C'est impossible ! A la mort d'un patient, les médecins informent la famille des causes du décès. Pourquoi cela n'a pas été le cas pour elle ?

Par contre, ce carnet vient confirmer mes craintes. Cet appartement était bel et bien celui de Joana, la sœur de Fabio. Je saisis soudainement pourquoi mon voisin veut à tout prix que je quitte cet endroit. Et je le comprends que trop bien. Je suis dans la même situation que lui, je ne veux pas d'étrangers dans la maison de mes parents, c'est impensable ! Inenvisageable !

Je décide donc de faire mes valises et de quitter ce lieu cher à son cœur dès le lendemain matin. Je refuse d'être la cause de ses tourments.

Je croise les doigts pour ne pas le croiser lors de mon déménagement car je ne saurais pas comment me comporter vis-à-vis de lui, après ce que je viens de découvrir et surtout ce que j'ai fait la nuit dernière. Comment oublier une telle chose ? Je suis rouge de honte, rien que d'y penser.

Je ne pourrais plus être à l'aise devant lui. Je me reverrais toute nue sur son plan de travail entourée de ses casseroles. Argh !

Des zones d'ombres persistent de cette nuit. Et franchement, je n'ai aucune envie de m'en souvenir, vu ce que je sais déjà. Inutile de m'imposer telle peine.

Oublions toute cette histoire. Il le faut ! Ma santé mentale en dépend.




Publié le dimanche 14 avril 2024

J'espère que vous appréciez toujours cette histoire ? 

Elle arrive à sa fin. Il ne manque que 4 chapitres. 

Alors resteront ils ensemble ou pas ? Quelle est votre opinion ? 

A très vite pour la suite. 

PS : Etant en vacances pendant toute la semaine, j'essayerai de publier tous les matins. Soyez présents ou présentes ! 

L'appart du Troisième (nouvelle version)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant