Je gardais en moi, après son apparition impromptue en pleine rue, un infime minuscule espoir que Fabio me demande de rester, mais il n'en a rien fait. Pourquoi aime t-il à ce point me déstabiliser ? C'était trop lui exiger une réponse claire et précise ? Je n'avais pas l'impression de lui quémander la lune. Quel insensible ! Parfois, je doute qu'il ait un cœur, pourtant je le sens battre quand j'ai l'une de ses mains entre les miennes. C'est déroutant !
Est-ce qu'il va grandir un jour ?
— Que se passe t-il, ma jolie ? s'inquiète Avo me voyant arriver chez lui, les yeux remplis de larmes.
Quitter cette ville sans savoir exactement ce qu'il en est de mon couple avec Fabio me chagrine un peu. J'aurais aimé qu'il soit plus explicite dans ses sentiments, qu'il manifeste davantage ce qu'il ressent, qu'il soit plus démonstratif dans ses actes. J'aurais apprécié qu'il me dise enfin qu'il m'aimait.
— Tu ne vas tout de même pas nous quitter en sanglot, ma douce ? Je ne l'admettrais pas !
Je ne réponds pas à ses questions et je m'effondre dans ses bras, telle une enfant de deux ans qui ne sait pas comment exprimer sa douleur.
— Luisa ? Que t'arrive t-il ? s'alarme mon hôte.
— Je ne sais pas ce qu'il veut ? parviens-je à prononcer entre deux sanglots.
Je doute qu'il comprenne de qui je parle, pourtant ses mots sont sans conteste dirigé vers l'homme en question.
— Peut-être qu'il ne le sait pas lui-même ? Il faut lui laisser du temps.
— Du temps ? Il va en avoir ! attesté-je tout en me redressant.
Un bruit venant de l'extérieur m'alerte et m'indique qu'il est l'heure de partir.
— Cette coupure va vous faire du bien. Quelquefois, il faut mettre de la distance entre deux personnes pour constater qu'elles sont faites pour être ensemble.
Le contraire peut tout à fait se produire aussi... Il ne me convaincra pas que mon absence puisse être bénéfique à Fabio. Il ne ressentira sûrement pas le manque de moi. Si tel était le cas, il l'aurait déjà éprouvé avec ses trois semaines sans nous voir.
Je dois me rendre à l'évidence. A moins d'un miracle, Fabio peut se passer de moi. En tout cas, c'est ce qu'il me montre.
Seul son baiser me fait douter de cette affirmation. Je ne sais pas ce qu'il a voulu me faire comprendre en m'embrassant de la sorte. Il m'aime et il veut que je revienne, ou il me souhaite bon vent ?
— Je te sens sceptique ? Crois moi, il te reviendra. Non ! C'est toi qui te rejoindras à nous. Vous ne pouvez pas vous passer l'un de l'autre. Vous vous aimez, cela se voit comme le nez au milieu de ta figure. Tout va s'arranger.
J'aimerais pouvoir le croire. Si seulement, Fabio ne m'avait pas laissé dans le flou total. Cet homme a vraiment le don de m'exaspérer. Et pour notre dernière conversation, il n'a pas jugé mieux de me rassurer, non, il a préféré me torturer davantage et me laisser encore plus indécise qu'avant notre conversation. Je lui en veux terriblement d'être aussi stupide.
— Je ne vais pas l'attendre indéfiniment.
— Personne ne te le demande, ma jolie. Retourne à Paris, et fais tout ce pourquoi tu rentres, puis si le cœur t'en dit, reviens nous voir. Il y aura toujours une place dans cette maison pour toi.
Le taxi klaxonne à nouveau. Je dois y aller.
— Ne sois pas en retard, agit-il comme le ferait mon père.
Il attrape mes bagages et les tend au chauffeur qui les met dans son coffre. Il ne me reste quelques secondes pour dire au revoir à mon cher ami. Il me serre une dernière fois dans ses bras et me murmure à l'oreille :
— Je suis certain que tu nous reviendras. Ta place est ici parmi nous.
Je pense que c'est sa façon de me dire qu'il tient beaucoup à moi. Et c'est réciproque. Les abandonner est un déchirement. Si je pouvais repousser mon départ, je le ferais. Tous les gens que j'ai côtoyés dans ce charmant quartier de Lisbonne vont me manquer, y compris mon insupportable ancien voisin du dessous. Je n'ai pas besoin d'être à des kilomètres de lui pour savoir ce que je sais déjà, une immense sensation de vide règne en moi depuis de nombreux jours. Et il est le seul à pouvoir la combler.
— Appelle moi de temps en temps pour me dire comment tu vas ? me supplie Avo alors que je monte dans le véhicule.
— Promis. Prenez soins de vous Avo. J'ai besoin de vos conseils avisés encore pendant très longtemps.
Il m'embrasse, tout comme l'a fait Fabio il y a moins d'une heure, sur mon front, puis s'éloigne de la voiture. Je ferme la portière. Et le taxi démarre. Un dernier au revoir de la main au vieil homme qui retient difficilement ses larmes de couler et me voici en route vers l'aéroport Humberto Delgado.
Dans l'avion, je me remémore les moments passés dans cette magnifique capitale portugaise, mais ce que je retiens avant tout, ce sont les belles connaissances que je m'y suis faites. Ils font désormais tous partie de ma vie, c'est ma famille, ma famille de cœur.
Et c'est le cœur remplit d'amour, torturé à la fois, et plein d'espoir, que j'arrive à Paris.
Publié le dimanche 21 avril 2024
Et voilà ! Nous sommes arrivées à la fin de ce tome. J'espère qu'il vous a plu ?
J'espère vous retrouver pour le tome 2, qui sera publié ici dans quelques semaines.
Bonne continuation et à bientôt !
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L'appart du Troisième (nouvelle version)
RomansaQuand l'amour frappe à la porte de Luisa Silva, en la personne de Fabio Monteiro, un homme arrogant, prétentieux et trop sûr de lui, Luisa n'a qu'une idée à l'esprit lui claquer celle-ci au nez. Du moins, c'est ce que sa tête lui dit de faire, mais...