49/ Les souvenirs.

13 1 9
                                    

 – Tu es sûr que tu ne veux pas le réveiller ? demande Tim, peu convaincu.

Il est deux heures du matin. Rassemblés devant mon immarbre, les autres débattent de « faut-il ou non réveiller Lenni ? », qui s'est endormi contre la vitre de ma voiture sur le chemin du retour. Je tranche :

– Je vais le porter. Madame Rodriguez m'ouvrira la porte.

Celle-ci hoche la tête.

– Tout à fait. Allez, rentrez vous coucher, les enfants.

Joe hausse les épaules, plus amusée que critique. Tim veut dire quelque chose, mais sa phrase se transforme en bâillement. Ils remontent dans la voiture et Yann s'assied derrière le volant. Quand la voiture de Max disparaît au bout de la rue, l'obscurité nous enveloppe. Les lampadaires sont éteints depuis bien longtemps.

Je descends garer ma Golian dans le parking souterrain. Madame Rodriguez récupère son sac à main et agite le bras sous le détecteur de mouvements. Les lampes à minuteries s'allument.

J'ouvre doucement la portière arrière et rattrape Lenni qui bascule à l'extérieur. Il ne bronche pas, ni quand je le soulève, ni quand je claque la porte du pied et me mets en marche vers l'ascenseur.

Madame Rodriguez me précède et appuie sur le bouton d'appel. Un instant plus tard, les portent coulissantes s'écartent. Mais l'ascenseur n'est pas vide.

– Oh, fait Adolphe d'un ton attendri, le petit chat s'est endormi !

Il se penche vers lui en souriant. Je me mords la lèvre.

– Oui, bon, heu, où allez-vous à cette heure-ci, Adolphe ?

Il sort de la cabine et j'entre.

– Me promener. Cela stimule mon imagination.

Je ne suis pas certain que l'imagination d'Adolphe ait besoin d'être stimulée, mais je m'abstiens de lui faire remarquer. Les portes se referment et l'ascenseur s'élève à travers le conduit vitré.

« Tu crois qu'il m'a laissé des fleurs ? » demande Evania.

« On va bien voir. »

Il n'y a pas de fleurs sur le palier. Seulement un paquet enveloppé de papier beige.

« Ça ne ressemble pas à Adolphe de faire des paquets cadeaux si moches », commente Evania.

« C'est peut-être parce que ce n'est pas pour toi. »

Madame Rodriguez le ramasse et lit l'étiquette.

– C'est pour toi, mon petit Tao.

J'attends qu'elle ait poussé la porte avant d'aller droit dans la chambre de Lenni. Mes bras commencent à fatiguer sérieusement. Je le dépose sur son matelas le plus délicatement possible tandis que mes muscles protestent. Il va encore dormir tout habillé. Je lui enlève juste ses baskets et sa veste avant de rabattre la couette sur lui.

– Pauvre petit, murmure Madame Rodriguez depuis le couloir, il a eu des émotions, aujourd'hui. Il doit être soulagé.

Je regarde Lenni, son visage tranquille et le demi sourire sur ses lèvres.

– Oui. Demain, il pourra aller où il veut.

Madame Rodriguez baisse les yeux sur le paquet qu'elle tient dans ses mains.

– Je suppose que tu veux un peu d'intimité pour l'ouvrir.

Elle le pose sur le lit et s'en va dans un tourbillon de jupes à carreaux.

IMAGOOù les histoires vivent. Découvrez maintenant