23/ Tyler

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 En entrant dans mon appartement, j'entends la voix cassée de Lenni. Il parle à quelqu'un.

Sur la pointe des pieds, je contourne le mur végétal de l'entrée.

Lenni est assis en équilibre sur l'accoudoir du canapé, tourné vers la fenêtre. Il a dû se servir dans mon armoire, il porte un de mes tee-shirts, trop grand pour lui, et son jean déchiré. Il ne m'a pas entendu entrer et discute avec quelqu'un qui semble se trouver de l'autre côté de la baie vitrée.

– Où étais-tu passé, Bowie ? Je me suis fait du souci. Je t'ai attendu pendant deux jours, tu sais ? Je regardais par la fenêtre.

Je m'approche lentement, intrigué. Je ne vois toujours pas à qui il parle.

Soudain, une voix criarde me fait sursauter :

– À l'envahisseur !

Lenni se retourne d'un coup, perd l'équilibre et bascule en arrière. Il s'étale sur le dos dans les coussins, tandis qu'un geai orangé s'envole à travers la pièce en criant :

– À l'envahisseur ! Let's dance !

Lenni saute sur ses pieds. Ses yeux suivent l'oiseau avant de revenir sur moi.

– Tao, tu m'as fait peur.

Je réponds, tout en observant, méfiant, le geai qui s'est posé sur la lampe du plafond :

– Désolé. C'est quoi ce piaf ?

L'air offensé, Lenni pose les poings sur ses hanches :

– Il s'appelle Bowie !

Ben tiens.

– Pourquoi ?

– Parce qu'il crie tout le temps « Let's dance ». Ne l'appelle pas « le piaf » !

Je grogne, tout en surveillant le geai du coin de l'œil :

– Il m'appelle bien l'envahisseur !

Lenni ne trouve pas d'argument à opposer et poursuit :

– Il est apprivoisé...

– Je vois ça.

– ... et il est très intelligent. Il m'a retrouvé tout seul.

J'arrête de fixer d'un œil noir le geai perché sur ma lampe et dévisage Lenni.

– Rien que ça ? Ah, mais, une minute... Je l'ai déjà vu.

Il abandonne son attitude défensive pour un intérêt sincère :

– C'est vrai ? Quand ?

– Ici, en bas de l'immarbre, en ville, un peu partout, en fait.

Lenni reste songeur. Il me fixe sans vraiment me voir, une main sur la hanche. Je précise :

– Je suis sûr que c'était lui.

– Carabistouilles ! hurle Bowie.

Lenni lève le bras.

– Bon, ça suffit. Bowie, come here.

L'oiseau penche la tête, semble réfléchir, puis finalement vient se poser sur le bras de Lenni.

– Bowie, je te présente Tao.

Bowie cligne de ses yeux verts et ronds et croasse :

– Bonjour Mademoiselle !

– Non ! fait Lenni en fronçant les sourcils. Tao. Ta-o.

Bowie décide que c'en est assez et agite ses ailes :

– Kraaaa !

Lenni soupire et le chasse de son bras en pestant :

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