𝟐𝟐.

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Je me sentais affreusement sale, comme si le poids de mes péchés s'était incrusté dans ma peau, laissant une empreinte indélébile que même l'eau la plus pure ne pouvait effacer. Chaque fibre de mon être était imprégnée de remords, et une sensation de souillure me rongeait de l'intérieur. Cherchant un réconfort quelconque, je tendis la main vers la table de chevet et pris le chapelet qui y reposait, ses perles froides et lisses glissant entre mes doigts tremblants. Je me levai du lit, me baissant avec une lenteur solennelle, sentant désormais la fraîcheur des carreaux contre mes genoux. J'enroulai le chapelet autour de ma main droite, et en joignant mes mains dans une prière désespérée, je sentis la croix s'enfoncer légèrement dans ma peau, un rappel tangible de la foi à laquelle je me raccrochais désespérément.

« Le Seigneur est mon berger, je ne manquerai de rien. Il me fait reposer dans de verts pâturages, Il me dirige près des eaux paisibles. Il restaure mon âme; Il me conduit dans les sentiers de la justice, à cause de son nom. » fermai-je les yeux, laissant les larmes couler librement.

Je restai ainsi, les mains jointes, ce collier enroulé autour de mes doigts, trouvant une étrange sérénité dans la psaume. Alors que je prononçais chaque mot avec ferveur, des images des événements passés envahissaient mon esprit. Le bal, les rires, les regards échangés, puis la douleur et l'obscurité. Le visage du Vicomte d'Ambroise, paisible avant que le poison ne fasse effet. Et celui d'Aarden, dur et impassible, mais marqué par une haine déchirante. Chaque souvenir s'insinuant en moi, accentuant le poids de la culpabilité. Les larmes continuaient de couler, chaudes et brûlantes, traçant des sillons salés sur mes joues. Je sentais la croix du chapelet s'enfoncer de plus en plus dans mes paumes, la douleur physique se mêlant à celle de mon âme.

« Il restaure mon âme... » pris-je une profonde inspiration, essayant de calmer les battements frénétiques de mon cœur.

Après un long moment, j'ouvris les yeux et baissai le regard vers mes mains jointes. La douleur était vive, mais elle semblait étrangement purificatrice, comme si cette souffrance physique m'aidait à expier, ne serait-ce qu'un peu, le mal que j'avais causé. Je desserrai lentement mes doigts, libérant le chapelet qui tomba en un léger tintement sur le sol. La brûlure de ma main droite me rappelait la réalité de mes actes, un symbole de la pénitence que je devrais désormais porter. Je restai là, encore agenouillée sur le sol froid, quand j'entendis un léger craquement de bois.

Qui est-ce ? Tournai-je mon attention sur la porte qui s'ouvrait doucement. C'était Élise, suivie de quelques autres domestiques, leur arrivée marquant le début de la journée.

« Madame ! Que faites-vous par terre ! » s'exclama-t-elle, ses yeux s'agrandissant de frayeur en me voyant dans cet état.

Elle se précipita à mes côtés, tendant la main pour m'aider à me relever, mais je la refusai d'un geste de la main, me redressant tant bien que mal par mes propres moyens.

« Je n'ai besoin d'aucune aide, Élise. Préparez-moi seulement un bain et une parure pour la journée. » dis-je, ma voix plus ferme qu'elle ne l'avait été depuis des jours.

« Mais Madame, vous devriez rester au lit. » me regarda-t-elle, l'inquiétude creusant des lignes profondes sur son visage. « Cela ne fait que quelques jours que vous vous êtes réveillée de votre perte de conscience. Dans l'état où vous êtes, ce n'e... »

« Je vais parfaitement bien, Élise. » lui coupai-je la parole, avec un sourire vide de sens.

« Althéa...Vous ne vous êtes même plus nourri depuis cinq jours... »

« Tout le monde a des périodes de perte d'appétit. » haussai-je simplement les épaules, tentant de minimiser l'évidence de mon délabrement. « Ne vous en faites pas pour si peu. »

Les autres domestiques restaient en arrière, incertaines de la marche à suivre. Pourquoi me regardent-elle ainsi ? Pouvais-je voir la perplexité et la pitié dans leurs yeux, des regards qu'elles tentaient maladroitement de masquer. Je déteste cela. Tremblaient légèrement mes mains, mais je les serrai fermement pour dissimuler cette faiblesse.

« Faites ce que je vous demande. » ordonnai-je d'une voix que je voulais impérieuse.

Je les vis s'échanger d'autres regards avant d'acquiescer, et s'activèrent à préparer mon bain, rompant enfin ce cercle oppressant. Pendant un instant, je restais seule avec Élise, mais au moins, je n'avais plus à supporter cette pitié insupportable, me tenir droite, ou de ne pas vaciller.

















𝐁𝐎𝐑𝐍 𝐓𝐎 𝐃𝐈𝐄Où les histoires vivent. Découvrez maintenant