Chapitre 25 : la sentence

21 4 0
                                    




Arslàn

J'avais complètement merdé. Le voir torse nu, les gouttes ruisselant sur sa peau veloutée, la chair de poule érigeant ses tétons - que cette race ne devrait pas avoir vu que ce sont des techniquement des plantes et pas des mammifères, encore un mystère à percer - m'avait fait vriller. Les minutes d'avant, j'étais déterminé à ne jamais lui céder, quoi qu'il m'en coûte. Je m'étais répété de ne pas le laisser m'approcher physiquement. Et qu'avais-je fait ? J'avais pris l'initiative et c'était moi qui l'avais embrassé. J'avais pris le contrôle, décidé de le faire, d'assumer mon caractère de girouette. Et lui, second fils du Haut-Prince, autorité qui devait avoir l'habitude de se faire obéir, m'avait cédé sans aucune inhibition ni gêne, me laissant tranquillement mener à bien mes conneries. Ce baiser avait été le meilleur que j'avais pu expérimenter tout au long de ma quasi-inexistante vie sexuelle, et je n'avais en plus aucun regret d'avoir trahi les principes que je m'étais imposé précédemment.

« Mon vieux, tu es vraiment une tête à claque doublé d'un imbécile, En plus tu en es fier... » pensais-je de moi-même.

Astríon, puis-ce que c'était son prénom, avait fait comme si de rien n'était, comme si tout était normal et que je ne l'avais pas embrassé. Il m'avait promis la vérité sur son geste au lieu de profiter de ma désinhibition pour me pousser à baiser avec moi. Je voyais dans son regard toute la contrainte qu'il s'imposait, me dévorant des yeux.

Je m'étais par la suite concentré sur la nourriture, avalant tous les plats devant moi. Les plats avaient été amenés par un serviteur sur un plateau de bois tel un menu japonais. Je faisais mon possible pour ne pas regarder mon interlocuteur alors que je déjeunais, essayant d'éviter que la flamme du désir prenne un peu plus le pas sur moi. Pas avant d'avoir entendu ce qu'il avait à me dire. J'avais écouté chaque mot, compris bien des enjeux politiques. Pourtant, je ne saisissais pas la relation que cela pouvait avoir avec Absalón. Je manquais à nouveau de consistance et cédai à l'appel de son ses pupilles bicolores qui dardaient de désir. Une fois ses explications faites, un voile passa devant ses yeux vairons lorsque je demandais plus de précisions sur la mort d'Absalón, les rendant trouble. Il repoussa une des mèches longues et la coinça derrière son oreille tout en continuant à me fixer, puis enchaîna :

« J'avais un frère cadet nommé Oríon. Il était doué pour pas mal de choses, dont la diplomatie. N'ayant pas de qualités innées pour le combat, il avait décidé d'endosser le rôle de représentant de notre pays malgré sa jeunesse, visitant les autres royaumes, consolidant nos alliances. Il réussissait à le faire mieux que n'importe qui avant lui. Au palais, tout le monde l'aimait. Il était souriant et poli, et terriblement beau. C'était notre rayon d' astre diurne, et nous nous réjouissions tous quand il était de retour. Nos pères aimaient beaucoup utiliser ses atouts, et Shahìndar le fit travailler à l'essor de l'influence culturelle et spirituelle d'Oggon dès qu'il commença sa courte carrière. Le Haut-Prince l'avait fait entourer d'une bonne garde, et Oríon était toujours accompagné de son amant, un hybride extrêmement agile au combat et habile en magie. Il y a trois cycles de cela, le voyant fatigué à force de voyager à dos de wyrm en quête d'alliance avec d'autre pays, Shahíndar lui demanda de s'arrêter un peu, le temps de reprendre des forces. Il s'exécuta de bonne grâce, toujours rallié à l'opinion de notre Père. Il décida de partir se reposer dans une de nos propriétés, accompagné de ses compagnons habituels et de ses gardes. A cette époque, j'étais même allé lui rendre visite quelques jours, et me réjouissais de l'avoir trouvé oisif et requinqué. »

Astrìon croisa ses bras sur son torse, laissant volontairement un silence. Il reprit à voix basse :

«Ton ancien protecteur faisait partie d'une organisation secrète d'assassins travaillant pour le Haut-Prince de Scellæon. Et le travail de mon frère a vraiment dû lui déplaire : Absallón Urío l'a égorgé sur son ordre. Nous en avons été témoin grâce à l'instrument magique qu'il avait mis en route juste avant. Urìo l'a tué par surprise et par derrière, après que ses congénères aient abattu tous les hommes d'armes de sa demeure. Il ne lui laissa même pas l'opportunité de prendre une arme pour se défendre et mourir avec dignité et se présenter devant les dieux après avoir eu une mort honorable. Il était un simple diplomate affable qui n'opposa aucune résistance à ce guerrier entrainé. »

J'étais sans voix. La tourmente avait envahit mon esprit, et j'essayais de recoller les morceaux avec l'Absalón que je connaissais. Bien que je ne sus pas grand chose de lui, c'était totalement plausible, surtout après l'avoir vu se battre contre Astrìon. Il savait extrêmement bien manier les armes blanches, et c'était pour aller s'entraîner qu'il me laissait seul toutes les après-midis. Le Prince continua alors que j'étais encore sous le choc de cette révélation.

« Mon frère n'était pas doué en combat, et il était encore trop jeune pour avoir développé de la magie. Nous sommes déclarés adulte à trente ans, mais ce n'est usuellement pas avant cinquante de nos années que la magie apparait pour ceux qui en sont capable. Oríon avait et aura a jamais quarante-deux ans. De nous deux, j'étais l'exception, puisqu'à cet âge on n'a normalement pas encore de capacités magiques. Lorsque l'assassin a surgit, Oríon savait certainement qu'il n'y réchapperait pas. Il a alors activé une des glyphes d'enregistrement de son et d'image enchantées qui lui servaient dans son métier. C'est à ce moment là, alors qu'il tournait le dos à Urío, qu'il a été exécuté. Lorsque mon frère ainé, mes parents et moi avons vu les images projetées par la glyphe, c'était comme si nous étions en train de le vivre. Ōona s'est effondré sur le sol de douleur émotionnelle, Righel et Shahìndar, dans une colère noire, ont promis de retrouver le tueur dont nous ne connaissions pas encore le nom pour le lui faire payer. Mon père décida de prononcer la sentence de mort à son encontre. C'est moi qui me suis alors proposé pour exécuter la sentence. Nul n'a contesté ce fait, car il était le troisième fils mais surtout mon faux jumeau, sorti après moi du cocon. Nous avions un lien magique, qui s'est tranché à son décès. Lors qu'il a succombé, mon coeur s'est arrêté un instant et j'ai ressenti la pire douleur de ma vie. C'est en me relevant de cette épreuve que je suis allé trouver mes parents et ai lancé l'alerte, le visage inondé par le chagrin.»

Il termina son récit, mais le désir de vengeance familial n'avait pas besoin de plus d'explication. Astríon s'était arrêté à l'unique mort d'Absalón, mettant ainsi en garde quiconque de recommencer de part la violence et le lieu de l'exécution. Je supposais que tous auraient voulu la tête du Haut-Prince de Scellæon en supplément, mais que c'était impossible de prouver qu'il avait donné l'ordre de le faire. Ils ne voulaient sûrement pas imposer une guerre sans fondement au peuple d'Oggon. Et Astríon me scrutait, attendant que je réagisse. Je ne savais pas par où commencer. Je finis par me lancer.

« Il vous manque ? »

Je vis l'humidité envahir ses yeux, et une larme silencieuse coula sur sa joue. Merde Arslàn, mauvaise question.

« Oui il me manque. Et toi, depuis que tu es ici, est-ce qu'il y a des gens qui te manquent? »

Je répondis à la négative, fermant définitivement toute interrogation que j'avais pu auparavant avoir au sujet de mes parents et de mon frère. J'avais peur désormais de poser ma prochaine question. Pourtant il fallait mettre les choses à plat pour avancer.

« Vous n'aviez donc pas du tout l'intention de me tuer, à aucun moment? »

Il eut un petit rire désabusé, tentant certainement de se changer les idées.

« Ca dépend de quelle mort tu parles. » il regarda le lit, amusé. « j'aimerais beaucoup un jour te voir à l'agonie... »

« Vous n'êtes pas sérieux !!! » m'insurgeais-je. « On vient de parler de la mort quand même ! »

« Dit celui qui m'a empoigné pour m'embrasser ». Il eut un sourire vainqueur, et je savais pertinemment qu'il avait raison. Il avait raison et moi je n'assumais pas. Il glissa sa main sur la table, s'arrêtant à quelques centimètres de la mienne.

« Et si on continuait ce petit jeu? » proposa-t-il en passant sa langue sur sa lèvre supérieure. « je me mets à ta merci. Tu décides quand tu veux me toucher, et je te cède. Sans réciprocité. Je te promets que je serais sage... En contrepartie, même si tu es désormais une personne libre sur ces terres, tu continues à m'accompagner et tu me confies ta sécurité. Je ferais en sorte que tu ne finisses pas comme mon frère ou ton ancien protecteur. Et on arrête de parler du passé pour regarder vers l'avenir. » Il me gratifia d'une moue espiègle et langoureuse, et retourna sa main pour me montrer sa paume.

« Deal? » me fit-il en anglais.

Je sus très bien avec lequel de mes deux cerveaux j'avais réfléchis lorsque je lui serrai la main en lui répondant à l'affirmative. Je n'avais pas besoin d'un pouvoir de Jedi pour me convaincre d'accepter, vu que mon sabre laser était dressé sous la table et que je cédais au côté obscur de la Force. J'étais pathétique. Pathétique, faible, foutu et le coeur en lambeau pour lui.

Isekai : Éveil sur GenoëOù les histoires vivent. Découvrez maintenant