Chapitre 30 : en haut de la tour

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Arslàn

Je suivais le papillon luminescent qui avait pris une teinte verte fumée à travers les rues silencieuses de la ville endormie. Je pensais croiser des passants vu que la pluie s'était arrêtée, mais il fallait croire que les gens avaient préféré l'intimité de leur demeures pour passer la nuit plutôt que de festoyer. L'atmosphère restait humide et froide, les flaques d'eau ponctuant mon chemin comme des miroirs ternis par la nuit se réveillant au passage de mon guide. Les maisons aux toits en forme de pagode me faisant définitivement penser à des habitations de la chine ancienne se succédèrent sans que je ne puisse reconnaitre quoi que ce soit sur mon itinéraire. Le papillon voltigeait devant moi, sa lumière de jade perçant l'obscurité de la nuit, et je me demandais où il allait me mener. Soudain, au passage d'un croisement de rue, j'aperçu le miroitement timide de l'océan, qui scintillait délicatement sous les lumières de la ville. Le murmure des vagues s'échouait contre les pierres noires du port de l'autre côté. Le bruit des vagues était doux, et la mer ne semblait pas très agitée. Je sentis une urgence croissante monter en moi alors que je m'approchais de la tour des wyrms que je reconnus, édifice imposant dont la silhouette illuminée se dressait contre le ciel nocturne.

Les lampions rouges qui luisaient accrochés le long du rempart dont l'édifice haut marquait le départ projetaient des ombres rouges dansantes sur les murs de pierre blanche. Le papillon tournoyait autour de moi, comme s'il voulait s'assurer que je le suivais. Je sentais désormais une étrange connexion avec cette créature lumineuse, et ce devait être le cas, vu que le prêtre l'avait liée à moi.

Le vent soufflait doucement maintenant que nous étions prêt du port, portant avec lui l'odeur des embruns et des algues. Chacun de mes pas résonnait sur les pavés humides et je grimaçais en me souvenant du pas léger du prince Astríon sur les toits. J'aurais aimé user de la même magie que lui à l'époque pour devenir plus silencieux. Bizarrement, alors qu'il avait disparu depuis peu de temps, il me manquait déjà. Alors que j'avançais vers l'entrée de la tour, suivant toujours mon petit guide, mes pensées étaient partagées entre l'inquiétude pour Solgar et l'effroi que me causait l'anticipation de ce qui allait certainement arriver : j'allais certainement devoir monter sur un de ces fichus lézards volants.

Mon papillon se posa finalement sur la rambarde de pierre à l'entrée, comme s'il m'invitait à entrer. Je pris une profonde inspiration, rassemblai mon courage et pénétrai dans l'obscurité de la tour. Je devais monter les nombreux escaliers que j'avais dévalé sans peine il y a quelques jours, quittant les dragons qu'ils appelaient wyrms et qui m'avaient causé mon lot de nausées et de peurs. Je me demandais d'ailleurs quelle était la différence entre un dragon et un wyrm puisqu'il semblait exister les deux ? La taille ? De plus, le haut de la tour était un endroit où se posaient les lézards pour déposer leurs cavaliers, et je m'interrogeais où les gardiens les hébergeaient le temps que leurs propriétaires aient besoin d'eux. Quand tout serait fini, j'espérais pouvoir me renseigner sur ce sujet.

Alors que j'arrivais complètement essoufflé en haut de la tour qui était bien éclairée, je vis deux hommes discuter. Un d'eux était extrêmement imposant et le dépassait d'une bonne tête. Je les observais de loin en reprenant mon souffle. L'un portait l'uniforme marine que j'avais pu déjà observer, mais l'autre homme ne semblait pas être un gardien comme lui. Sa silhouette noire absorbait la lumière autour d'elle, et le premier lui parlait avec crainte et respect. Tous deux se tournèrent vers moi, visiblement surpris de voir quelqu'un arriver en pleine nuit.

J'essayais de parler pour m'expliquer, mais je manquais encore de souffle et ma tentative fut infructueuse. Je vis mon papillon se diriger vers l'immense inconnu habillé de noir et lui tourner autour. Qu'est ce qu'il lui prenait ? Il essayait d'éclairer le côté obscur de la force ? Ou alors que je me fasse occire ? Honnêtement, cet insecte avait un sens de l'humour encore plus pourri que moi. Ainsi mis en lumière par la lueur du papillon, sa peau ressemblait plutôt à une peau de serpent aux petites écailles grises sombres. Il était impressionnant avec ses cheveux long retenus en d'immenses et épaisses tresses descendant jusqu'au bas de son dos et ses yeux rouges. Je ne me voyais pas faire des signes à la bestiole pour lui dire de revenir, ça m'aurait grillé ou on m'aurait pris pour un fou. L'insecte finit par revenir se poser sur son épaule. J'évitais de continuer à le regarder, cela voulait dire fixer cet homme à la stature effrayante et bardé de cuir. Mais lui continuait à me dévisager avec insistance. J'aurais voulu rentrer sous terre, mais j'avais une mission urgente à exécuter. J'inspirai profondément et je me dirigeai vers le gardien.

Isekai : Éveil sur GenoëOù les histoires vivent. Découvrez maintenant