Chapitre 28 : le prêtre

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Arslàn

La porte en bois se referma en un claquement sourd. Derrière moi l'auberge sinistrée et son personnel agité n'était plus que du passé et son confort désormais hors d'atteinte. La pluie tambourinait avec force sur les pavés de pierre blanche. Les lampions rouges, suspendus à des cordes tendues entre les bâtiments, diffusaient une lueur douce et vacillante qui peignait les murs de bois de la ruelle de teintes pourpres et écarlates.

Je restai là, immobile, laissant les gouttes de pluie ruisseler sur mon visage et mes vêtements sales et plein de cendres. L'air était frais, presque mordant, avec une odeur de terre humide, de mousse et de végétation détrempée. Le murmure distant de l'eau tombant sur les toits créait une mélodie apaisante, en contraste avec le tumulte de mes pensées.

Les minutes s'écoulèrent lentement sans que je ne bouge. La pluie, qui était d'abord battante, faiblit peu à peu jusqu'à devenir un simple voile humide. Une brume légère s'était levée, flottant doucement au-dessus des pavés, me donnant l'impression que tout était éthéré dans la ruelle sombre. Je frissonnai légèrement, tirant la cape qui avait été à Astríon plus étroitement autour de moi.

Je n'avais pas la moindre idée de ce que je devais faire désormais. Je pensais brièvement à la liberté dont je jouissais maintenant, mais elle me laissait un goût amer. J'étais inquiet. Solgar et Sorèn auraient dû être dans l'auberge, mais ce n'était pas le cas. Quand bien même, s'ils étaient sortis, pourquoi n'étaient-ils pas revenus ? Est-ce que Astrìon allait bien ? N'avait-il pas vaincu Quæri ? Pourquoi n'était-il pas revenu me chercher, lui qui m'avait promis de s'occuper de moi ? Je ne côtoyais mes nouveaux compagnons que depuis trois jours, mais cela ne correspondait pas à ce que je savais d'eux.

Une idée germa soudain dans ma tête. J'eu un sourire niais en pensant au mot germer, puisque je pensais au temple de Bàlan, et à l'arbre qui s'y trouvait sûrement. Je sentais que je devais m'y rendre, mais l'ignorance de sa localisation me laissait hésitant. Je sentais que la solution était là ... je ne savais pas comment mais mon ventre se tordait en y pensant. J'avais compris qu'ici chaque dieu avait son propre temple, il devait donc exister quelque part. Devais-je demander ma route à quelqu'un ou tenter de le trouver par moi-même? Mon esprit était en proie au doute et à l'incertitude.

Alors que j'étais plongé dans mes pensées, un papillon luminescent et pâle apparut devant moi. Il virevolta doucement, ses ailes délicates illuminant la brume autour de lui. Fasciné, je tendis la main vers la créature. Elle se posa brièvement sur mon doigt, sa lumière douce contrastant avec l'obscurité environnante.

Je pris cela comme un signe. Peut-être que ce papillon pourrait me guider vers le temple de Bàlan ? Avec un nouvel espoir, je regardais la petite lumière laiteuse s'envoler doucement dans la nuit.

Je suivis l'insecte volant à travers les rues désertes, les ruelles sombres et tortueuses. Les habitants de la ville s'étaient certainement abstenus de sortir au vu de la récente pluie battante, car les rues étaient désertes. Les maisons, avec leurs toits en forme de pagode, semblaient oppressantes avec le brouillard qui grimpait les murs rougis par les lanternes détrempées. Les fenêtres carrées, entourées de mosaïques en céramique blanche, renvoyaient une faible lueur, signe que les bâtiments étaient habités et que la vie battait en leur sein. Leurs lueurs accentuaient l'étrangeté de mon itinéraire. Les portes en bois, parfois brut foncé, parfois peintes de couleurs rouges et noires, semblaient fermées hermétiquement et j'évitais de m'en approcher.

Le papillon me guidait, sa lumière blanche perçant la brume et l'obscurité . Le silence était seulement perturbé par le bruit de mes pas sur les pavés mouillés et le doux crépitement de la pluie fine sur les flaques d'eau. Chaque coin de rue, chaque intersection paraissait être un tournant dans un labyrinthe sans fin, mais je continuais de suivre cette petite créature avec une foi presque désespérée, comme hypnotisé.

Isekai : Éveil sur GenoëOù les histoires vivent. Découvrez maintenant