Astríon / Arslàn
J'avais beau être seul, je ne le ressentais pas. Tapi dans un coin de mon esprit, Arslàn était là, je le sentais avec une véracité étonnante. Je fis osciller les boucles d'oreilles qu'il n'avait pas auparavant : il ne m'avait pas échappé qu'il portait les mêmes que moi, ce qui m'enhardissait et le fait qu'elles sertissent ses lobes regonflait mon coeur bien malmené par ma récente capture, ce qui m'avait mené aux portes du désespoir. Où avait-il pu les avoir, alors qu'elles étaient typiques de l'artisanat du nord d'Oromir ? Je notai ma question dans un coin de mon esprit et déboulai au pied d'un nouvel escalier en colimaçon. Je doutais du fait qu'il n'y ait pas de porte arrivé en haut, et qu'elle ne soit pas verrouillée magiquement elle aussi. Une chose après l'autre, me dis-je, tentant de rassurer Arslàn que je sentais s'agiter à ma remarque. Je gravis les marches interminables, en me rappelant que le palais était sur un promontoire rocheux. Même si le couloir était en montée, il n'avait certainement pas rejoint le niveau du soubassement de l'édifice. Le palais était tellement perché que l'atteindre nécessitait une montée sévère, malmenant les jambes d'Arslàn. Je dû faire de nombreuses pauses, à bout de souffle. Ce corps n'était pas le mien et affichait des limites par manque d'entrainement. Ce n'était pas un reproche, cela me permettait de savoir ce que je pourrais faire ou non lors d'un combat que je savais inévitable. Il valait mieux m'adapter à mes nouvelles limites pour que cette entreprise soit un succès ! Une fois arrivé, je m'assis quelques instants sur la plus haute marche, le temps que le coeur d'Arslàn retrouve un rythme normal. Je jetais un oeil sur la structure de la porte grâce à la lumière que j'avais emmenée et malheureusement ma prédiction s'avéra exacte : elle était bardée de symboles magiques et empêchait le passage. Je jurai et pris quelques instants de réflexion. Je n'avais pas été mis dans cette enveloppe physique pour qu'un fichu accès verrouillé me barre le passage. Bàlan était connu pour être un dieu farceur, peut-être me testait-il ? Il n'en avait certainement que faire de la vie de quelques mortels de plus, et si j'échouais, ce qui adviendrait de nous n'était peut-être pas sa priorité. Cependant... j'avais en ma possession des armes qu'il ne désirait pas aux mains du Haut-Prince de Scellæon, et qui semblaient, elles, avoir de l'importance pour lui. Mais oui, c'était ça, les armes ! C'était sûrement la clef, dans tous les sens du terme... je devais tester.
Je lorgnai les doubles lames qui pulsaient doucement sur la cuisse d'Arslàn, là où leurs fourreaux superposés reposaient. Je préférai ne pas les sortir tout de suite, car elles ne me rassuraient pas franchement. Je posai ma lanterne et sorti les lames du dos d'Arslàn pour les inspecter. Non, elles n'avait rien de parlant, ce n'était pas elles qui m'apporteraient des réponses. Je dégainai les dangereuses lames jumelées avec prudence, qui se logèrent dans mes mains comme si elles avaient été faites pour moi. Non pas pour moi, pour Arslàn. Elles étaient à lui. Même si la sensation était agréable, tout me rappelait que ce n'était pas mon enveloppe charnelle. La petite voix de mon hôte raisonna un instant dans ma tête, gloussant à mon propos. J'agitai légèrement les longues dagues jumelles, faisant tinter la chaine qui les reliait. Lors d'un de mes mouvements, la lumière magique de ma lampe pâlit sous l'aura noire de la plus petite, alors que je l'approchai. Peut-être le métal avec lequel elle avait été forgée absorbait la magie ? J'avais entendu parler d'armes dévoreuses d'âmes ou de pouvoirs, cette idée était donc cohérente. Je mis ma théorie à exécution et avançai sa silhouette dardant des flèches d'ombre vers la fermeture scellée. J'effleurai la serrure de sa lame. Un grincement sinistre se fit entendre, alors que la lueur occulte de ma lampe s'éteignit définitivement en même temps que le verrou cédait. Je m'aventurai à ouvrir tant que je savais encore où était la poignée, et le loquet céda, m'ouvrant enfin le passage. et je m'engageai dans le sous sol du palais qui était à peine éclairé. Je serrai le pendentif à mon cou d'une main. Ce dernier pulsait la magie d'ombre. Comme j'étais moi-même capable de manier les sorts de cette catégorie, il était facile de l'identifier. Il était certain que c'était lui qui allégeait mes pas. Malheureusement, ce vaisseau de chair n'était pas capable de canaliser ma propre magie, et je bénissais celui qui lui avait confié ce talisman. Cet artéfact tombait à pic et me permettait de me déplacer en toute discrétion, son sort d'ombre absorbant le bruit de ma foulée. Cela me laissa pensif : qui Arslàn connaissait-il qui pouvait posséder la magie d'ombre? A ma connaissance, une seule personne dans cette ville capable de la maîtriser : Absalón. Lui et moi avions cette capacité en commun. De mon côté j'étais le seul à en avoir hérité d'Ōona, mon autre père. C'était la première capacité magique à s'être révélée à moi il y a quelques années, même si mes yeux vairons indiquaient que j'allais être capable de maîtriser deux arts. Par un hasard surprenant du destin, mes pères m'avaient légués chacun la leur, indiquant que la puissance d'Õona flirtait parfois avec celle de son époux. Shahíndar ayant légué sa magie principale à mon frère ainé Righel et certainement à feu mon cadet Oríon, qui n'avait pas de pupilles distinctes malgré notre naissance duelle. Cette similarité de pouvoir occultes ne m'avait pas plu lorsque j'avais appris l'existence de l'assassin d'Oríon, mais maîtriser les mêmes arcanes que lui m'avait aidé à le contrer lors de mon attaque punitive. J'en déduisais que c'était lui qui lui avait donné ce médaillon, même si la logique voulait que ce soit impossible ... n'était-il pas en convalescence ? Tout bon parent ou ami l'aurait éloigné de la capitale pour lui permettre de se rétablir. Je serrai les dents de rage en espérant que mon hypothèse soit fausse, et avançais avec précaution.
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Isekai : Éveil sur Genoë
Любовные романыEnlevé sans explication et transporté sur Genoë, une terre étrange baignée par deux soleils et deux lunes, un jeune homme survit de justesse à un massacre. Sauvé par un natif de ce lieu, un homme aux intentions ambiguës, il découvre un univers peupl...