Chapitre 29 : le serpent

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Arslàn

Dans l'ombre relative de la pièce, le visage du dieu était beau et me soulevait des émotions contrastées, comme si je le reconnaissais, comme si je le connaissais. Je haletai, les mains tremblantes et le cœur battant, lorsque les yeux de la statue de mon dieu clignèrent. Un frisson glacé parcourut mon échine, et instantanément, le monde autour de moi sembla s'effacer. Avant que je puisse comprendre ce qui se passait, mes jambes cédèrent sous moi et je tombai à genoux, entrant dans une transe où j'avais l'impression d'être éveillé, mais où je ne contrôlais plus rien.

J'eu alors une vision. Je me trouvais soudainement dans une maison aux boiseries roses et au sol de bois sombre et ciré. Les murs étaient ornés de tapisseries simples. Des lanternes rectangulaires à la flamme chaude vacillantes, accrochées aux murs, projetaient des ombres dansantes qui semblaient prendre vie, tourbillonnant comme des esprits en peine.

Au centre de cette salle lugubre, Solgar était là, attaché au sol, gisant sur le parquet, les membres attachés par de solides cordes aux noeuds complexes. Son visage était pâle, des traces de lutte visibles sur son corps, et une blessure sanglante à la tempe. Une flaque de sang s'étalait lentement sous sa tête, imprégnant le bois.

Il était inconscient, son ventre se soulevant à peine, le souffle faible et irrégulier. Je sentai la peur et la colère monter en moi alors que je tentais de me rapprocher pour le secourir, mais mes jambes semblaient refuser de bouger. Je criai son nom, mais ma voix se perdait dans l'air étouffant et saturé de la puanteur métallique de l'endroit.

Le monde autour de moi vacillait alors que je luttais pour me libérer de cette vision cauchemardesque. Je sentais la présence réconfortante d'Oronesdre à mes côtés, sa main serrant la mienne avec force. Quand était-il revenu ? Que faisait-il dans ma vision ?

Il murmurait des prières apaisantes en Haute-Langue, invoquant la protection de Bàlan pour nous guider à travers ce présage réaliste et horrifique.

Lentement, la projection mentale commença à se dissiper, les murs sombres et les silhouettes disparaissant dans une brume épaisse. Je rouvris les yeux pour me retrouver de nouveau devant l'autel, le lampion violet éclairant doucement la pièce. J'étais vautré sur un coussin. Le prêtre avait dû me mettre là par sécurité. Oronesdre avait réellement ses doigts entremêlés aux miens, et me regardait avec solennité. Il comprenait l'ampleur de ce que j'avais vu comme s'il avait participé à cet événement. Peut-être était-il capable d'entrer dans mon esprit ?

Il me sourit de manière énigmatique et me lâcha.

« J'ai vu ton compagnon en te touchant. », dit-il d'une voix douce mais ferme «Ceci est la réalité qui t'a été montrée. Il semblerait qu'il soit dans une fâcheuse posture... »

Il se leva, et je vis qu'il avait amené une théière fumante et du pain, posés à même le sol. Il servi la boisson dans deux tasses en grès bleu, et me tendit l'une d'entre elles, alors que je me replaçais sur ce fichu coussin que j'aurais mieux fait de ne pas quitter. J'étais venu pour trouver des solutions moi, pas pour découvrir d'autres problèmes !

« Bois. Tu es glacé et tu es... » Il se racla la gorge. « ... tu n'es toujours pas habillé... »

« Bordel ! » M'exclamais-je, en sautant sur mes pieds. Je faillis renverser le gobelet en grès et me brûler par la même occasion. « Je suis désolé ! »

Je pris le coussin sur lequel j'étais auparavant pour le mettre devant mes parties génitales, tout en posant mon mug au sol, ce qui n'eu pas l'effet escompté : il éclata de rire.

« Tu penses que je n'ai jamais vu à quoi ressemblait un homme dis-moi? C'est vrai que tu es vraiment beau, mais il m'en faut un peu plus pour me gêner. Rassure-toi, il n'y a rien qui ne ressemble plus à un corps qu'un autre corps, peu importe son origine ! Vous autres les anciens Terriens c'est quand même quelque chose ! »

Isekai : Éveil sur GenoëOù les histoires vivent. Découvrez maintenant