Captive d'un narcotrafiquant

Chapitre 41.

Je sens un nœud se former dans sa gorge. Partir ? Quitter le seul endroit que je connais depuis toujours ? C'est impensable. J'ai grandi dans ce domaine, entourée de luxe et de violence. J'ai appris à survivre dans ce monde impitoyable, mais l'idée de tout quitter me terrifie.

Je regarde Javier, le visage fermé, les yeux fixés sur un point indéterminé. Il avait l'air décidé, presque soulagé. Je me demande ce qu'il va devenir de lui, de tous ceux qui travaillent pour lui. Et surtout, je me demande ce que je vais devenir. Est-ce qu'il va nous dispercer dans plusieurs de ses domaines? 

Les jours suivants sont un véritable chaos. Les préparatifs du départ se font dans la plus grande discrétion. Les valises sont remplies à la hâte, et Javier et ses hommes mettent énormément de temps à arpenter la maison, discuter à bureaux fermés derrière les portes. L'atmosphère est tendue, et les filles le sont encore plus. On nous demande de retirer les draps des lits, de passer la poussière, rouler les tapis. Comme si cette maison avait toujours été vide et abandonnée. 

La nuit du départ, on nous a rassemblées dans le salon près de l'entrée, et on dort sur des matelas à même le sol, avec des couvertures de fortunes. On se dépêche de suivre les hommes du Cartel qui nous emmène dehors. Je tiens la main de Catarina. 

Dehors, le ciel est noir, couvert de nuages menaçants. Des camions attendent devant la maison, leurs moteurs ronronnant. Je regarde une dernière fois le domaine, le seul lieu que j'ai connu et le seul endroit qui est mon repère depuis ces derniers mois... J'ai envie de pleurer malgré le fait que je sais que cet endroit n'est pas chez moi. Chez moi, c'est en Espagne. Avec mes parents. 

Je rejoins les autres dans un des camions. Le véhicule démarre et s'engage sur la route sinueuse qui mène vers l'inconnu. Je m'assieds dans un coin, le cœur lourd, les fenêtres ouvertes. Je me sens comme une feuille emportée par le vent, sans aucune maîtrise sur son destin. J'ignore où je vais atterir, encore une fois. 

Le voyage est long et éprouvant, mais au moins, on est un peu à l'air libre, et au frais. On a à boire, à manger, heureusement. Les routes sont mal entretenues, et quand on nous dit de nous cacher, on se cache, on se tait. Les contrôles de police sont fréquents. Chaque bruit, chaque ombre nous mets sur le qui-vive. Malgré la fatigue, je ne parviens pas à fermer l'œil. Je revois cet homme dans la chambre, qui m'attaque... Son visage hante mes pensées. 

Après plusieurs heures de route, au petit matin, nous atteignons enfin notre destination : une vaste étendue de terres arides, bordée par une chaîne de montagnes. Un nouveau domaine, plus isolé que le précédent, avait été aménagé en toute discrétion. Les camions s'arrêtent devant une immense propriété fortifiée. Des hommes armés nous attendent, prêts à assurer notre sécurité.

Il y a quelques mois, j'aurais été terrorisée par ces hommes, mais aujourd'hui, je comprends qu'ils sont là pour ma sécurité. 

Niché au cœur d'une chaîne de montagnes abruptes, le domaine s'étend sur plusieurs hectares, dominant les vallées environnantes. Accessible uniquement par un chemin sinueux et escarpé, et gardé par des hommes, il offre une vue panoramique à couper le souffle.

Nous descendons du véhicule, sonnées, fatiguées, à bout de souffle. 

La demeure principale, bâtie en pierre et en bois, évoque un château fort. Ses murs épais, crénelés par endroits, sont percés de petites fenêtres étroites qui offrent une vue imprenable sur les alentours. Des tourelles, équipées de meurtrières, renforcent l'aspect défensif de la bâtisse.

Autour de la demeure, s'étendent de vastes terres agricoles, soigneusement entretenues. Des champs de céréales ondoient sous le vent, des vergers produisent des fruits généreux et un potager fournit en légumes frais les habitants du domaine. Ces terres autosuffisantes permettent au cartel de se fournir en nourriture et de réduire sa dépendance envers l'extérieur.