Chapitre 67 /!\

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« Il est des marques sur notre peau qui ne s'effaceront jamais. Celles-là importent peu. Il existe en revanche des cicatrices en nous, invisibles et incapables de se refermer. Ces blessures-là sont les plus douloureuses. »

– Ji Sangpo, De la guerre.


Seokjin planta son regard dans celui de Namjoon ; il chercha à y lire une quelconque trace d'humour. Il n'y perçut qu'une poignante sincérité. Qu'il désire à ce point lui prouver qu'il le trouvait beau en dépit de ses cicatrices l'émouvait. Il secoua toutefois la tête de gauche à droite.

« Non, non, et comment voudrais-tu t'y prendre ?

— Je voudrais découvrir ton corps peu à peu, au fil de mes baisers. Je voudrais panser par l'amour chacune des plaies laissées par la haine, affirma Namjoon en lui caressant la hanche. Je voudrais juste que nous passions un moment agréable ensemble, sans la moindre barrière, qu'il s'agisse de celle de nos vêtements, ou bien de toutes celles que tu as érigées pour te protéger.

— Tu l'as dit, elles me protègent.

— Mais te cacher derrière te ronge, toi-même tu rêves de t'en affranchir. Combien de temps vas-tu rester leur esclave ? »

Ces mots frappèrent juste, car Seokjin prit tout à coup conscience qu'en effet, il ployait sous le joug de ces anciennes douleurs, de ces vieux traumatismes qui refusaient de s'effacer de son corps comme de son cœur. Lui que son maître avait délivré, il demeurait enfermé par les horreurs subies jadis. Sa condition d'esclave le poursuivait encore.

« Parfois, se cacher n'est pas la meilleure solution, poursuivit Namjoon, il faut oser. Si tu avais décidé de rester ici au lieu de me venir en aide, de prendre à deux mains ton courage et ma défense, je serais sans doute déjà mort à l'heure qu'il est. Mais tu t'es révélé, mon chaton est devenu un véritable Tigre, et voilà que tu as même réussi à semer le doute au sujet de l'empereur Seo. Tu as trouvé en Lee Huyeon une nouvelle amie, et tu as prouvé à tout Noria que Kim Seokjin est un avocat brillant.

— Je n'ai pas été courageux, au contraire j'étais mort de peur à l'idée d'échouer.

— Mais tu ne l'as pas montré, et tu l'as surmonté. Être courageux ne signifie pas que l'on ne ressent aucune peur. Être courageux signifie au contraire que l'on affronte ce qui nous terrifie. Voilà en quoi le courage est si noble : il nous place en lutte contre nous-mêmes.

— J'ai si peur... mon propre corps me répugne.

— Alors il va falloir être vraiment très courageux. Nous pouvons attendre encore si tu le souhaites, mais j'aimerais que tôt ou tard, tu surmontes tout cela. Tu mérites de vivre heureux, sans ce souci qui te mine en permanence. Je t'ai affranchi, et si je ne m'attendais pas à ce que tu oublies tout ce que tu avais vécu, j'espérais au moins que tu réussirais un jour à passer outre. Je comprends que tu aies besoin de temps, mais promets-moi s'il te plaît que tu y travailleras.

— Je te le promets. »

Namjoon l'embrassa tout en roulant le pouce sur sa hanche. Ses mots résonnèrent en Seokjin, qui demeura allongé contre lui, pensif. Parce qu'il avait senti qu'il désirait réfléchir un peu, son cadet le laissa à sa méditation : il ferma les paupières et savoura leur moment de complicité. Il savait que ses paroles avaient semé en Seokjin la graine de ce courage qu'il l'incitait à prendre. Déjà le Tyfodonien paraissait plus détendu alors même que son visage exprimait le doute.

De tendres minutes passèrent pendant lesquelles ils échangèrent de petits baisers accompagnés de caresses. Seokjin gardait une moue soucieuse, son amant ne le bouscula pas. Et finalement...

L'œil du Phénix [Yoonmin/Namjin]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant