Les Passions de Sarah - Tome V

Esra - 12

Esra avait décidé de mettre fin à sa relation avec Erhan, un acte de courage que j'avais longtemps espéré pour elle. Lorsque la date de leur rencontre fut fixée dans un petit bar discret, elle me demanda de l'accompagner, non pas pour participer à la conversation, mais pour la soutenir de loin. J'acceptai, sachant que ce moment pourrait être déterminant pour son avenir. Nous nous rendîmes ensemble au café, et je m'installai à une table en retrait, où je pouvais les observer sans être vue.

Dès le début de leur échange, je sentis que la situation était tendue. Esra, qui d'ordinaire avait une douceur naturelle, semblait nerveuse, mal à l'aise. Erhan, quant à lui, arborait une attitude rigide, ses gestes brusques trahissant son agacement. Je scrutais leurs expressions, leurs mouvements, et il devint rapidement évident que les choses prenaient une mauvaise tournure. Les mots d'Esra, bien que mesurés j'en étais sûre, ne trouvaient aucune résonance en lui. Au contraire, plus elle tentait d'expliquer les raisons de sa décision, plus il se fermait, son visage se durcissant de plus en plus.

À un moment, il se pencha en avant, son regard perçant celui d'Esra avec une intensité menaçante. Je vis ses lèvres bouger rapidement et je remarquai la détresse croissante dans les yeux d'Esra. Elle essayait de maintenir son calme, mais ses yeux trahissaient sa peur. Je ne pouvais pas entendre mot pour mot ce qui se disait, mais il était clair que ça allait très mal. Je savais qu'elle avait besoin d'aide, que la situation était en train de lui échapper.

Je me levai, traversant le bar avec une détermination froide, le regard fixé sur Erhan. Quand j'arrivai à leur table, il se redressa brusquement, surpris par mon intervention.

- Erhan, dis-je d'une voix glaciale, laisse Esra tranquille. Elle en a fini avec toi.

Il me regarda, son visage se tordant de colère.

- Qu'est-ce que tu fais là toi ? De quoi tu te mêles ? grogna-t-il en se levant, tentant de m'intimider par sa posture.

Mais je ne reculais pas. Au contraire, je plantai mon regard dans le sien, laissant la colère froide monter en moi, une colère qui ne demandait qu'à exploser.

- Je te conseille de partir avant que les choses ne deviennent vraiment compliquées pour toi. Si tu ne le fais pas, je jure de faire de ta vie un enfer que tu n'oublieras jamais.

Je vis une lueur d'incertitude passer dans ses yeux. Il tenta de se reprendre, mais il était clair que la menace l'avait secoué. Il balbutia quelque chose, essayant de justifier sa présence, mais il perdit son assurance. Sentant qu'il était sur le point de battre en retraite, je me rapprochai encore, mes poings se serrant involontairement.

- Qu'est-ce que tu comptes faire, Sarah ? me lança-t-il, tentant une dernière fois de regagner du terrain.

Tout en disant ça, il se pencha et agrippa Esra par le bras. Son geste violent lui arracha un petit cri de surprise et de douleur. Mes yeux s'obscurcirent.

- Je vais te montrer exactement ce que je vais faire, répondis-je, la colère prenant le dessus sans que je m'en rende compte.

Avant même de réaliser ce que je faisais, mon poing se détendit, frappant Erhan en plein visage. Le coup le fit vaciller en arrière, son visage se tordant de douleur et de surprise. Toujours dans le même élan, je me suis jetée sur lui, griffant son visage.

- Je vais t'apprendre à la brutaliser espèce d'enfoiré, criai-je alors beaucoup de monde se levait paniqué autour de nous.

Esra, terrifiée, se leva précipitamment pour essayer de s'interposer.

- Sarah, arrête ! Ne fais pas ça ! s'écria-t-elle en me prenant par le bras.

Mais aveuglée par la rage, je la repoussai violemment, sans même réfléchir, en lui envoyant une puissante gifle avec le revers de ma main. Le choc la fit tomber en arrière, son corps frêle heurtant le sol avec un bruit sourd. Un silence pesant s'abattit sur le bar, les regards se tournant vers nous, incrédules.

Erhan, profitant de la confusion, s'en alla du café sans demander son reste, son visage marqué par la colère. Je restai là, immobile, regardant Esra se relever lentement, ses yeux remplis de larmes. La réalisation de ce que je venais de faire s'abattit sur moi comme un coup de massue.

- Esra, je... commençai-je, mais elle recula, son visage déformé par la douleur et l'incompréhension.

- Comment as-tu pu ? murmura-t-elle, sa voix brisée par les sanglots. Tu as promis de ne plus me frapper.

Avant que je ne puisse dire un mot de plus, elle s'enfuit à son tour, courant hors du café, laissant derrière elle une traînée de larmes et de désespoir. Je restai figée sur place, le cœur lourd de regret, réalisant trop tard que ma colère avait brisé mon lien avec Esra.

Le poids de ma propre violence me laissa désemparée, et je ne pouvais que m'effondrer sur la chaise, accablée par le chagrin de ce que je venais de faire.