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Point de vue de Mehdi

Il est 20h, je suis en train d'endormir Liya, Dieu merci elle est dans un bon mood, elle coopère bien et s'endort très rapidement.

Une fois qu'elle est dans son lit, je prends le moniteur avec moi et je m'en vais au salon.

J'essaie encore une fois d'avoir Malika, mais toujours rien. Silence radio, son téléphone ne sonne même pas. Messagerie direct.

J'allais appeler sa collègue Noémie pour avoir des nouvelles mais mon téléphone a sonné. C'était Soumaya.

J'ai du prendre une grande inspiration avant de décrocher. Ça va être une épreuve.

« Allô ?! »

« Allô Mehdi ? Mon fils ça va ? »

« Oui. Oui ça va et toi ? Et Bashir ? Vous allez bien ? »

« Mehdi comment veux-tu que j'aille bien alors que je n'ai pas vu le visage de ma fille depuis deux mois ? Elle ne décroche même plus quand je l'appelle maintenant ! Qu'est ce qu'il se passe ? Bashir va devenir fou. Lui aussi on ne le voit plus. Il passe ses journées et ses nuits à la mosquée. Tu sais que sa fille c'est tout pour lui. »

« Je... Elle n'est pas encore rentrée là, elle est au cabinet. Mais promis je lui dis de vous appeler direct dès qu'elle rentre. »

« Mehdi, qu'est ce qu'elle a ? Il se passe quoi ? Pourquoi elle ne veut plus nous voir ? Qu'est ce qu'on a fait ? »

« Rien. C'est ... c'est le travail. Même moi je ne la vois pas beaucoup. Elle a toujours un truc en ce moment, elle se déplace beaucoup aussi. »

« Venez ce week-end ? Parles lui. Je t'en supplie. »

« Promis. Je vais lui parler. »

Soumaya s'est un peu apaisée avec cette promesse, ça fait deux mois que je m'arrange pour ne jamais rien promettre parce que je sais bien que je n'ai plus aucune influence sur Malika, mais là je n'y arrive plus. J'ai fait une promesse que je suis loin de pouvoir tenir.

« Toi Mehdi ça va ? Personne n'est là pour écouter. Tu peux tout me dire. Depuis qu'on ne voit plus Malika je sens que toi aussi tu es mal. Vous vous êtes brouillés ? »

« Non... Non, on ne s'est pas brouillés et en vrai ça va. C'est juste une période un peu difficile là, on est tous les deux happés par plein de trucs à gérer, moi j'ai Liya... c'est juste la période qui veut ça. »

« Bon... Mais c'est quand même un peu inquiétant, d'habitude même quand c'est compliqué on vous voit, enfin toi je te vois mais avec cet air de chien battu là, et ta femme dont on entend même plus le son de la voix... Bref, j'arrête de t'embêter ! Dis lui juste de m'appeler et déposes moi Liya quand tu es sous l'eau je te l'ai déjà dit ! »

J'ai acquiescé et nous avons essayé de faire la conversation, mais nous avons très vite raccroché. Je me sens affreusement mal de lui mentir et je sens que ça lui coûte de faire comme si de rien n'était.

Je dis que je gère, mais je ne gère rien du tout. Malika est en roue libre. Je ne sais même pas où elle est. Je sais qu'elle n'est pas au travail. Il paraît qu'elle fait des journées de fonctionnaire ces derniers temps. Moi qui rêvais de la voir lever le pied je n'aurais jamais souhaité que ça se fasse dans ces conditions. Elle quitte le travail à 17h et personne ne sait où elle va. Un jour sur deux elle rentre en plein milieu de la nuit, bourrée ou complètement stone. Les autres soirs elle est à la maison à 17h30, elle s'assied sur le balcon et pleure.

Le monde est à nousOù les histoires vivent. Découvrez maintenant