P3 - XVIX.

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Ce soir, comme tous les soirs depuis presque deux mois, Dan a fait à manger. Une routine qu'il a instaurée sans vraiment le dire, une habitude entre nous. Je suis assis sur le canapé, un livre en main, essayant de lire. Mais je sens son regard, posé sur moi. Il me scrute souvent, comme s'il cherchait à lire quelque chose que je cache bien.

Dan est plus détendu ces derniers temps. Ça me fait plaisir de le voir comme ça, même si ça me tue un peu de ne pas pouvoir lui dire ce que je ressens vraiment. Il ne peut pas savoir. Ce n'est pas possible.

Soudain, sans prévenir, il sort de la cuisine et attrape mon livre d'un geste rapide, me tirant de mes pensées.

- Hé ! protesté-je, mais il est déjà en train de feuilleter les pages avec un sourire espiègle.

- Voyons voir ce que tu lis là, dit-il, avec cet air malicieux qui me fait toujours fondre, même si je ne le montre pas.

Dan feuillette toujours le livre, un sourire en coin, avant de s'arrêter sur une page marquée. Il plisse les yeux, une lueur malicieuse dans son regard, et commence à lire d'une voix exagérément dramatique :

- "Mon cœur est trop plein de toi
pour être jamais à un autre.
Je t'aime et..."

Je le fixe, paralysé, chaque mot frappant en plein cœur. Son sourire amusé contraste violemment avec le tourbillon d'émotions qui me submerge. Il rit, toujours dans son jeu, inconscient du poids que ces mots ont pour moi.

- "... et je t'aimerai jusqu'au dernier jour de ma vie." Je le coupe brusquement, espérant détourner l'attention. Ma voix se fait plus sèche, comme si je voulais dissimuler ce qui tremble en moi. Stendhal, terminé-je.

Dan éclate de rire, mais cette fois, ça résonne différemment. Il continue, insistant, sans savoir à quel point il égratigne ma carapace :

- Ah, un grand romantique, hein ? Lucas, t'as caché ça tout ce temps ?

Je ris nerveusement à mon tour, mais c'est un son forcé. Mon estomac se serre, chaque fibre de mon être en alerte. Il me provoque, joue avec cette ligne invisible que je tente désespérément de maintenir. Je dois fuir cette conversation.

- Tu sais que t'es insupportable ? je lance en haussant les épaules, essayant de garder la légèreté, de ne pas trahir ce qui se passe réellement en moi.

Dan repose enfin le livre et se laisse tomber à côté de moi sur le canapé, toujours un peu trop près. Il frôle mon bras en s'installant, et cette proximité me brûle, me plonge dans un malaise grandissant. Mon cœur s'emballe, et je me concentre sur ma respiration, tentant de calmer l'ouragan qui menace de tout emporter.

- Absolument, et tu adores ça, réplique-t-il avec son sourire malicieux, en se penchant légèrement plus près de moi, comme s'il ne voyait pas ce que cette proximité me fait.

Je soutiens son regard, mais mon sourire se fane. C'est trop. Cette tension entre nous, cette complicité pleine de sous-entendus que je tente de garder sous contrôle, me rend fou. Il ne peut pas savoir à quel point cela me tue.

Dan se redresse légèrement, fronçant les sourcils. Son regard reste fixé sur moi, cherchant à comprendre. Il n'est plus dans le jeu, il est en train d'essayer de voir ce que je cache.

- Lucas... qu'est-ce qu'il y a ? demande-t-il, doucement cette fois, comme s'il ne voulait pas me brusquer.

Je baisse les yeux, incapable de soutenir son regard. C'est trop, je suis à deux doigts de craquer. Je ne peux pas lui dire. Pas maintenant. Pas comme ça.

- Rien, je suis juste... fatigué, dis-je en essayant de paraître détaché, même si chaque mot me pèse.

Mais je sais que ça ne suffira pas. Il ne me croit pas. Je sens son regard insistant, il essaie de percer la vérité derrière mes mots.

- T'es sûr ? Parce que t'as l'air... ailleurs, insiste-t-il, sa voix emplie de cette tendresse qui me désarme chaque fois.

Mon cœur tambourine dans ma poitrine. Je suis sur le point de tout lui avouer, mais la peur me paralyse. Je détourne les yeux, me levant soudainement, comme si bouger pouvait me sauver de cette situation.

- C'est rien, Dan. Juste... des trucs en tête, dis-je précipitamment, me levant du canapé avant qu'il n'ait le temps de répondre.

Je récupère mon téléphone sur la table, espérant m'échapper avant que les choses ne dérapent. Mon pouls bat à un rythme effréné, et je prie pour une distraction, n'importe quoi. Alors que je me prépare à dire quelque chose pour m'éclipser, une vibration parcourt mon téléphone.

Je le secoue, prétendant une urgence. L'échappatoire parfaite.

- Je dois y aller. Il y a un truc qui vient de tomber, dis-je brusquement, mettant déjà ma veste.

Dan me regarde, surpris, mais je n'attends pas de réponse. Avant qu'il puisse poser une question, j'ai déjà claqué la porte derrière moi.

Dans le couloir, mon souffle est rapide, mes mains tremblent légèrement. Je descends les escaliers à toute vitesse, comme si cette fuite physique pouvait me délivrer de ce que je ressens. Mais ça n'aide pas. Le poids de mes émotions reste collé à ma peau.

Dehors, l'air frais m'accueille, me gifle presque, mais il ne calme pas le tumulte en moi. Mon cœur continue de battre frénétiquement, chaque battement me rappelant ce que je viens de fuir. Je regarde mon téléphone. Aucune urgence, évidemment. C'était une excuse. Une fuite.

Je passe une main nerveuse dans mes cheveux, essayant de reprendre le contrôle, de me calmer.

Mais c'est impossible.

...

☀️

PRÊTS À TOUT [ ATTAL X BARDELLA ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant