P3 - VI.

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Je reste là, mon cœur battant plus fort, me demandant ce qui va suivre. Gabriel s'approche lentement de nous, saisit une tasse, se sert du café et s'assoit juste à côté de moi. Je sens son regard sur moi, intense, comme s'il m'examinait, sondant chacun de mes mouvements. Je tente de rester détendu, mais sa présence si proche m'agite. 

- Comment va Lucas ? demande-t-il finalement, brisant le silence, sa voix basse résonnant entre deux gorgées de café.

Je prends une seconde pour répondre, sentant le besoin de me justifier.

- Mieux... Il a été malade toute la nuit, dis-je d'une voix un peu plus sèche que je ne l'aurais voulu.

Gabriel grimace légèrement, sincèrement préoccupé.

- Merde... j'espère qu'il ira mieux, lâche-t-il avant de se perdre à nouveau dans ses pensées.

À ce moment précis, des pas lourds résonnent dans la pièce, et Lucas entre dans la cuisine, les cheveux encore mouillés de la douche. Un parfum frais, une senteur masculine et familière, recouvre instantanément l'arôme du café. Il marche droit vers Marie, lui dépose un baiser tendre sur le sommet du crâne, comme à son habitude.

- Salut maman, dit-il d'une voix enrouée, puis son regard se tourne vers nous, croisant le mien un instant avant de saluer Gabriel et moi. Messieurs.

Son regard accroche le mien un peu plus longtemps que nécessaire, ses yeux cherchant peut-être à lire quelque chose en moi. Et ce petit jeu silencieux me trouble plus que je ne l'admettrais. Il finit par esquisser un sourire timide. Je baisse les yeux vers ma tasse, soudain mal à l'aise, raclant légèrement ma gorge pour briser la tension. J'ai l'impression que chaque geste, chaque expression est suspect. Je n'arrange rien en agissant comme ça.

- Comment tu te sens ? Dan m'a raconté ce qu'il s'est passé, lance Marie, son regard pesant brièvement sur moi, m'obligeant à relever les yeux vers Lucas.

- Bien mieux, répond-il avec une nonchalance qui me déstabilise.

Je me lève soudainement, cherchant une excuse pour m'éloigner de la tension naissante. Je m'approche du plan de travail, mon esprit s'agitant à l'idée de préparer quelque chose pour Lucas. J'ouvre les placards, tirant quelques ingrédients.

- Tu dois manger quelque chose, Lucas, je vais te préparer un petit déjeuner. T'as besoin de reprendre des forces.

- J'ai pas faim, lâche-t-il sèchement, mais je ne me laisse pas démonter.

- Ça te fera du bien, insiste-je en commençant à battre des œufs. Mes mains s'affairent, espérant que ce geste anodin dissipe l'atmosphère lourde. Mais je sens toujours ce regard posé sur moi.

Gabriel, lui, ne semble rien remarquer ou du moins, il n'en montre rien. Il continue à parler avec Marie, les taquinant tous les deux, mais je perçois, derrière ses blagues et ses sourires, qu'il est toujours attentif à mes moindres gestes.

Je dépose une assiette devant Lucas. Une simple omelette, des tartines et quelques fruits. Il regarde l'assiette sans la toucher.

- Juste un peu, Lucas, dis-je d'une voix plus douce. T'en as besoin.

Il relève les yeux vers moi, et pendant une brève seconde, je capte un éclat de reconnaissance, presque timide. Ça le trahit, lui qui n'est jamais du genre à montrer ce genre d'émotion, encore moins avec cette hésitation maladroite qu'il tente de dissimuler derrière son air habituellement impassible.

- Merci, murmure-t-il finalement, et je sens une chaleur inhabituelle se propager en moi, comme si ce simple mot, murmuré du bout des lèvres, avait un poids bien plus grand qu'il n'y paraît.

La tension semble s'apaiser un peu, mais pas pour longtemps.

Sous la table, Gabriel glisse discrètement sa main vers la mienne. Je la sens s'aventurer doucement, effleurant mon genou, remontant lentement jusqu'à mon entrejambe. Mon souffle s'accélère malgré moi. Je fais un effort monumental pour garder mon calme, mais chaque geste de Gabriel sous la nappe éveille un désir que j'ai du mal à contenir. Il me connaît trop bien, sait exactement comment me faire craquer, même dans les situations les plus inappropriées.

Je jette un regard rapide à Lucas, qui pique distraitement dans son assiette, feignant de ne rien voir. Marie est absorbée dans une discussion avec Gabriel, elle non plus ne remarque rien. Mais moi, je me bats pour maintenir une expression neutre. Sous la table, la main de Gabriel continue ses gestes de plus en plus audacieux. Je serre les dents, mes doigts se crispant autour de ma tasse, et je fais de mon mieux pour ne pas laisser transparaître l'effet qu'il a sur moi.

Lucas lève les yeux à cet instant précis, et je crois voir quelque chose de différent dans son regard. Une lueur, un soupçon d'intérêt ou de curiosité. Il me regarde, puis détourne les yeux presque trop vite.

Je finis par céder à la pression, me levant brusquement pour sortir de la cuisine.

- Je reviens, dis-je en m'éclipsant rapidement.

Je m'éloigne de la table, traversant le couloir pour trouver refuge dans une pièce adjacente. Le cœur battant à tout rompre, je tente de calmer mon souffle, les pensées brouillées par ce mélange confus de désir et de culpabilité. Quelques instants plus tard, Gabriel me rejoint, un sourire narquois sur le visage.

- Alors, tu m'abandonnes comme ça ? Toute la nuit avec Lucas et moi, rien. T'imagines comme je suis jaloux ?

Il y a une légèreté dans ses mots, mais quelque chose de plus profond transparaît. Il plaisante, mais je sais qu'il n'est pas insensible à la situation. Je ris doucement, mais l'envie entre nous est palpable.

- T'étais avec lui pour l'aider, bien sûr, mais avoue que tu le trouve mignon, pas vrai ?

Je ne sais pas quoi répondre. Je veux éviter cette conversation. Alors, je l'attire à moi, l'embrassant fougueusement pour étouffer ses paroles, et pour apaiser ce désir brûlant qui nous consume tous les deux.

Soudain, un bruit éclate dehors, des cris. Gabriel et moi nous figeons.

- C'est quoi, ça ? murmure-t-il, l'air soudain préoccupé.

Nous échangeons un regard, puis nous nous précipitons vers la fenêtre. Dehors, Lucas est pris entre deux hommes qui le menacent violemment. Ils le secouent, le coincent contre un mur, et l'un d'eux semble crier quelque chose que je n'arrive pas à entendre.

- Merde !

Sans plus réfléchir, je me précipite vers la sortie, le cœur battant d'une toute autre manière maintenant, prêt à intervenir.

...

PRÊTS À TOUT [ ATTAL X BARDELLA ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant