P3 - XXVI.

170 10 64
                                    

Je suis assis au fond du café La Sirène, les mains moites, tripotant nerveusement la serviette en papier devant moi. Mon pied tape frénétiquement le sol, impossible de calmer l'angoisse qui monte en moi. Je jette un œil à l'horloge murale pour la dixième fois en deux minutes. Gabriel n'est toujours pas là, et mon estomac est noué par cette attente insupportable.

Quand il arrive enfin, je me redresse brusquement sur ma chaise. Il s'avance vers moi, l'air aussi tendu que je me sens. Gabriel s'assoit en silence, ses gestes mesurés, comme s'il pesait chacun de ses mouvements.

- Salut, dis-je rapidement, avant de me précipiter, incapable de retenir ce que je ressens. Écoute, je... je suis désolé. Pour tout. Pour Dan, pour cette foutue photo... J'aurais dû parler, j'aurais dû... je sais que c'est à cause de ça que tu es parti et... Je suis désolé de t'avoir volé Dan, même si c'est pas vraiment... enfin...

Je sens ma voix se briser. J'ai l'impression de bafouiller, mes mots sortent en désordre, mais Gabriel me coupe avant que je puisse m'enfoncer davantage.

- Lucas, ça sert à rien. Ça change rien, tout ça, et on peut pas revenir en arrière, dit-il, ses yeux fuyant les miens, ses doigts crispés sur la tasse devant lui. Et... désolé de t'avoir frappé ce jour-là, c'était stupide de ma part.

Je vois dans son regard que mes excuses ne suffiront jamais vraiment à réparer ce qui a été brisé entre eux. La culpabilité pèse lourd sur mes épaules, et je ne sais même pas pourquoi je m'obstine.

- C'était mérité... En tout cas... je voulais juste te dire que j'espère que tu es heureux, toi aussi, avec Matthieu, finis-je par dire, espérant au moins que lui ait trouvé un peu de paix.

Gabriel esquisse un sourire, mais il ne répond pas à cette partie, et ça me frappe plus fort que je ne l'aurais imaginé. Je sais que ce sourire est faux, qu'il cache quelque chose.

Il inspire profondément avant de reprendre, changeant de sujet d'un coup.

- J'ai vu Marie, ta mère, avec Julien, le père de Dan. Ils avaient l'air... proches. Et Julie était avec eux.

Je claque mon poing sur la table avant même de réaliser ce que je fais. Le bruit sec résonne dans le café, faisant sursauter Gabriel et attirer tous les regards sur nous. Les gens se retournent, et je les sens tous nous observer, comme si nous étions les acteurs d'une pièce qu'ils ne comprennent pas.

- Merde... désolé, dis-je en levant les mains vers la foule, essayant de calmer les regards inquisitifs. Je me rassieds, tentant de contrôler ma colère qui bouillonne. Putain, je vais... je, dis-je plus doucement, mais je ne parviens pas à chasser la rage de ma voix.

Je prends une longue inspiration, essayant de remettre de l'ordre dans mes pensées.

- J'étais persuadé que ma mère l'avait quitté, surtout après ce qu'il a fait à Dan... Engager Sam pour... pour le... tu sais... j'arrive pas à croire qu'elle soit encore mêlée à tout ça.

Je sens ma mâchoire se serrer. L'idée que Marie soit encore liée à cet homme, à celui qui a voulu détruire Dan de la manière la plus sombre, me rend fou. Gabriel me regarde avec prudence, conscient de la tempête qui gronde en moi.

- Est-ce que Dan a vraiment vérifié que cet enfant est de lui ? Julie pourrait avoir manipulé tout ça, tu sais... Avec Marie et Julien, on sait jamais à quoi s'attendre.

Je ferme les yeux un instant, essayant de digérer ses mots. Julie avait fourni des documents, et Dan les avait acceptés sans plus de questions. Mais si Gabriel a raison, alors tout ça pourrait n'être qu'une vaste manipulation.

- Julie a donné des documents à Dan, stipulant que c'est bien son fils, dis-je sans trop de conviction.

- Les magouilles, c'est facile pour eux, finit par dire Gabriel.

- Je vais enquêter sur Julie, je murmure, décidé. Il faut qu'on sache ce qu'ils mijotent. Je veux protéger Dan de tout ça. Je vais comprendre ce qui se passe.

Gabriel acquiesce, son expression se radoucissant un peu.

- Merci, Lucas. Même si on n'est plus ensemble, je veux pas que Dan soit pris dans leurs conneries.

Il y a une sincérité dans sa voix, un besoin de protéger Dan qui ne l'a jamais quitté malgré leur rupture. Je le regarde, reconnaissant mais toujours rongé par une culpabilité tenace.

- Je suis encore désolé, tu sais, pour tout. Pour la manière dont les choses se sont passées entre vous, entre nous.

Gabriel me fixe, les yeux pleins d'une tristesse contenue.

- Ne lui fais pas de mal, Lucas. Ça, je te le pardonnerai pas.

Je suis incapable de répondre immédiatement. Ces mots résonnent en moi, lourds de sens. Je ne lui ferai jamais de mal, ça, je le sais. Je l'aime trop pour ça.

- C'est promis, dis-je doucement, ma voix pleine de sincérité.

Gabriel hoche la tête, et après quelques instants de silence gêné, nous nous levons et prenons congé. En sortant du café, je me promets de tout faire pour découvrir ce qui se cache derrière cette histoire, pour Dan. Parce que je ne veux plus jamais le voir souffrir.

...

Le soir, je me rends au restaurant où Dan m'a donné rendez-vous. J'ai pris le temps de me préparer, de me rendre présentable, presque apprêté. J'ai besoin de cette soirée, de ce moment sans complications, juste lui et moi. En entrant, mes yeux se posent aussitôt sur lui. Dan est assis près de la fenêtre, déjà en train de me regarder.

Dès que nos regards se croisent, un sourire éclaire son visage. Il me regarde avec cette intensité qui fait tout oublier, et dans ce regard, il y a tout ce que j'ai toujours voulu.

Je me dirige vers lui, mon cœur battant à tout rompre. Ce soir, c'est juste nous deux, et rien d'autre ne compte.

Je suis sur le point de m'asseoir en face de Dan quand une silhouette familière attire mon attention près de l'entrée du restaurant. Mon cœur rate un battement en reconnaissant Gabriel, accompagné de son nouveau copain, Matthieu. Je cligne des yeux, pensant d'abord que je me trompe, mais c'est bien eux. Ils se tiennent côte à côte, cherchant visiblement une table.

- Sérieux ? murmuré-je, plus pour moi-même que pour Dan, qui me regarde avec curiosité.

...

🦋.

PRÊTS À TOUT [ ATTAL X BARDELLA ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant