L'oubliée

33. Ness

Le cours de Transfiguration est interminable. Le siège à côté de moi est vide, et l'absence de ma jolie brune se fait ressentir. Potter est arrivé en cours avec cinq minutes de retard, mais toujours pas de trace d'elle. Pansy nous a dit que Potter et Ness ont été convoqués chez le directeur. J'aurais aimé assister à la scène. Lui, il est là. Pas elle.

Je regarde par la fenêtre, espérant trouver quelque chose de plus intéressant à observer. Et là, je la vois. Une démarche que je reconnaîtrais entre mille. Même d'ici, je la reconnaîtrais toujours. Elle se dirige vers le terrain de Quidditch, pourtant désert.

Je n'attends pas une seconde de plus et rassemble mes affaires.

— Monsieur Riddle, ce cours est obligatoire, intervient le professeur.

— Je me sens vraiment mal, Monsieur, il faut que je sorte, dis-je en quittant la salle nonchalamment.

Une fois dans le couloir, j'accélère. Ce château est immense, et je dois me dépêcher de la rejoindre.

Arrivé au milieu du terrain, je ne la vois nulle part et commence à me poser des questions.

— Princesse ? Si tu m'entends, ce serait sympa de m'indiquer ta position.

— Je suis là, Jedusor, répond-elle.

Je lève la tête. Elle est tout en haut des tribunes des profs.

— Je passe par où ?

— T'as vraiment besoin d'un plan ? dit-elle avec sarcasme.

— T'emmerde pas, je vais trouver, rétorqué-je.

Je finis par trouver le chemin et grimpe jusqu'à elle. Elle est là, assise. Sa cravate a disparu, sa chemise est déboutonnée en haut, et elle n'a même pas sa robe de sorcier.

— Tu vas choper la crève.

— Ce n'est pas ça qui me tuera.

— Que voulait Dumbledore ?

— Me dire que si on entend encore parler de moi, il me vire.

— Sérieux ?

— Il n'est pas bête. Il sait que quelque chose se trame. Il a même essayé de me parler d'un avenir où je serais Auror. La blague.

— T'aimerais pas ?

— Règle numéro 3, Jedusor : accepte ton destin.

— Tes règles sont déprimantes.

— Elles garantissent de survivre, et même de garder une santé mentale. Ce serait con d'avoir vécu tout ça pour finir aussi cinglée que ma mère.

Elle semble broyer du noir. Pire que d'habitude.

— Parle-moi, Lestrange.

— De quoi ?

— De ce qui te tracasse vraiment.

Elle ne répond pas, mais me fixe. Et là, elle me montre ce que je ne pensais jamais voir. Toutes ses émotions. Son regard révèle un déchirement immense. Je pourrais presque croire qu'elle va pleurer.

Je ne peux pas la voir comme ça et rester sans rien faire. Je m'approche et la serre fort dans mes bras. Elle est petite. Pas faible, hein, mais petite. Suffisamment pour que je puisse poser ma tête sur la sienne tout en passant une main dans ses cheveux. Je ne suis pas à l'aise, je ne fais pas souvent de câlins. Mais là, ça semblait être ce qu'il fallait faire.

Au début, elle reste raide. Mais si elle ne me montre pas qu'elle déteste, c'est qu'elle en a besoin. Je sens ses bras m'entourer à leur tour. Je suis bien comme ça. J'aimerais qu'une fois, juste une fois, elle oublie toutes les merdes dans sa tête : son devoir envers cette cause maudite, sa mère, mon père.

On reste comme ça un long moment avant que je ne la relâche délicatement pour voir son visage. Je jurerais avoir aperçu une larme couler.

— On va s'en sortir, Ness.

— Non, Matheo. Tu ne comprends pas, justement. On ne s'en sortira pas.

— T'es maligne. Quel sera le camp vainqueur ? Qui suivre pour survivre ?

Elle secoue la tête mais ne dit rien. Pour moi, elle n'avait aucune faiblesse. Et pourtant, la voici.

Je comprends qu'elle a besoin de changer de sujet, et je la respecte bien trop pour ne pas exaucer son souhait.

— Pourquoi ici ?

— Il y a cours dans la tour d'Astronomie.

— T'aimes les endroits hauts, toi.

Elle hoche simplement la tête. Un frisson la traverse, et j'enlève mon pull pour le lui enfiler.

— J'allais survivre, Jedusor.

— Je te préfère sans morve, Princesse. Et puis, mon pull te va mieux qu'à moi.

Elle lève les yeux au ciel, exaspérée par ma drague niaise. En même temps, avec elle, je ne peux pas m'en empêcher. Surtout que c'est vrai. J'aime qu'elle sente mon odeur partout sur elle.