46. Matheo

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Elle m'entraîne dans sa chambre. Alors qu'on traverse les couloirs, je vois bien les regards qui se posent sur elle, ou plutôt sur ses vêtements à moitié en vrac. Et ça me plaît. Ils voient tous qu'elle est à moi. Heureusement, pas de Pansy dans les parages pour poser des questions idiotes.

Une fois à l'intérieur, elle s'accroupit près de son lit et en tire un coffre à l'apparence étrange, comme enveloppé d'une aura magique.

Attends, t'as combien de malles ? je demande, presque amusé.

C'est là que je range mes objets enchantés, répond-elle, comme si c'était évident.

Bien sûr. À part elle, qui pourrait dire ça avec autant de naturel ? Et pourtant, je ne peux m'empêcher de sourire. Elle est tellement... Ness.

Elle attrape une dague posée près du coffre et, avant que je comprenne ce qu'elle fait, elle se coupe volontairement.

Putain, Ness !

Je m'approche, attrapant sa main pour arrêter le saignement, mais elle me repousse doucement.

Ce n'est rien, juste une petite coupure, dit-elle en laissant son sang couler sur le coffre.

Et comme par magie, ou plutôt grâce à cette foutue magie tordue qu'elle adore, le coffre s'ouvre. Moi, je suis encore en train de digérer ce que je viens de voir.

T'avais pas une clé, comme tout le monde ? Ça t'arrive de faire simple ?

Elle ignore ma remarque et plonge ses mains dans le coffre. Je jurerais qu'il n'a pas de fond vu la quantité d'objets maudits et ensorcelés qu'elle en sort.

Tu peux m'en parler, tu sais. T'es une collectionneuse compulsive, mon cœur. Je te jugerai pas.

Elle lève les yeux au ciel, mais je remarque la légère rougeur qui monte sur ses joues. Elle ne doit pas montrer cette facette d'elle à beaucoup de monde. Ça me touche.

Ce sont des objets d'histoire. Maudits ou pas, ils peuvent être utiles. Il vaut mieux qu'ils soient entre mes mains qu'ailleurs, dit-elle en haussant les épaules.

Elle me tend un objet enveloppé dans un tissu.

Qu'est-ce que c'est, Ness ?

Je défais le tissu et découvre deux fragments de miroir. Sérieusement ? Tout ça pour des morceaux de miroir ?

T'es si fan de ton reflet que ça, Ness ?

Elle prend un des fragments et me demande de regarder dans l'autre. Je m'exécute, un peu sceptique. Mais je me fige en voyant ce qui s'y reflète : ce n'est pas mon visage, c'est le sien.

Ils sont liés, explique-t-elle. Je vois ton reflet, et toi, tu vois le mien.

Je reste sans voix. Je ne sais pas encore à quoi ça pourrait me servir, mais je comprends une chose : elle a voulu qu'on soit liés. Elle m'a donné un de ses précieux objets. Pour elle, ça signifie forcément quelque chose.

— Tu en as combien sur toi, des trucs ensorcelés ? je demande, essayant de détendre l'atmosphère.

Un certain nombre, répond-elle avec un petit sourire.

Allez, dis-moi tout.

Elle prend une grande inspiration.

Ma chevalière familiale est liée à celle de Draco. On peut s'envoyer des signaux de détresse et elle nous guide l'un vers l'autre. Mes bijoux sont gravés de runes aux effets variés. Tu connais mon amulette sonore, celle qui empêche les autres de nous entendre. Cette broche détecte la magie dissimulée. Et ce bracelet...

Elle s'arrête un instant, son regard se durcit.

Ce bracelet me lie directement à ton père.

Mon sang se glace.

Le seigneur des ténèbres te l'a donné ?

Elle hoche la tête.

Il y a un sort qui nous relie, il agit comme une drogue. Il peut par ce bracket me localiser et donc transplaner jusqu'à moi. Si je l'enlève, un poison se répandra dans mon corps. Lentement. Doucement. Jusqu'à ce que je meure dans une agonie interminable.

J'ai envie de hurler, de fracasser quelqu'un. C'est inhumain. C'est sa façon de la posséder, de lui rappeler qu'elle est sa propriété. Qu'elle ne pourra jamais fuir.

Je m'approche et la prends dans mes bras. Je veux qu'elle sache que je suis là, même si je ne peux rien faire pour briser ces chaînes invisibles.

— Je suis désolé, Ness.

— Ça va, ne t'en fais pas, murmure-t-elle.

Je veux changer l'ambiance. Faire disparaître ce poids.

Dans le monde moldu, tu serais l'équivalent d'Inspecteur Gadget, je plaisante.

Elle éclate de rire, et je ressens un soulagement. Je préfère la voir comme ça.

C'est quoi encore, ton truc ? demande-t-elle en riant.

Je me lance dans une explication bancale de l'émission. Ça a l'air de l'amuser.

— Il nous reste combien de temps avant la fin des vacances ?

— Pas beaucoup. T'es prêt ? Parce que ton père lira en moi. Pas d'émotions, pas de sentiments.

Je déteste cette idée, mais elle acquiesce, résignée. Moi, je ne sais pas encore comment faire pour la protéger. Mais je trouverai. Je dois trouver.

L'oubliéeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant