Aeternam Galaxia

➳ Chapitre 4 : Jennifer

Nous avançons avec difficulté dans la forêt. Après une dizaine de tentatives de fuites infructueuses, nous finissons par abandonner et par les suivre sans plus de résistance. J'évite de regarder autour de moi. Certes, je me suis endurcie au fil des trois dernières années, mais ce genre d'environnement ne m'est pas habituel. Je ne veux pas voir toutes les bestioles représentant un danger mortel qui doivent traîner par ici. Au bout d'un peu plus de deux heures, nous nous arrêtons devant un arbre immense, quoique pas davantage que tous ceux qui nous entourent.

- Jennifer, pose ta main sur cet arbre, me demande Eramo.

Je m'exécute à contrecœur, une boule au ventre à l'idée de ce qui va se passer par la suite. Il place sa main rouge clair à côté de la mienne. J'entends alors comme un déclic au moment où une sorte de porte s'ouvre dans le tronc de l'arbre, dévoilant un ascenseur. Manqué plus que ça ! Zorak nous fait signe d'entrer à l'intérieur. Je n'ai pas l'impression que le système soit actif, aucun son, aucun mouvement, ne me permet de penser que l'ascenseur est en marche. Ce n'est donc que lorsque les portes s'ouvrent sur une énorme plateforme métallique de la taille d'au moins six terrains de foot, que je comprends que nous sommes arrivés à destination. Plusieurs cubes en métal -qui paraissent d'ici plutôt petits- sont alignés les uns à côté des autres. D'autres bâtiments plus importants sont installés sur cette surface plane. Zorak prend alors la parole :

-Trois cent six êtres humains vivent ici, avec vous ça en fait trois cent huit... (Il marque une pause, adoucit le ton de sa voix). Vous êtes tous des miraculés. Pour l'instant, nous avons parcouru quasiment tout l'hémisphère nord de la planète. Dans certains pays, nous n'avons trouvé aucun survivant, mais en France nous sommes parvenus à en sauver six, dont vous deux. Suivez-nous, nous allons vous les présenter.

Nous lui emboitons le pas. Mon cœur manque un battement lorsque j'aperçois le premier être humain de cet endroit. Un jeune garçon, les cheveux bruns, ébouriffés, mince sans être maigre. J'ai le sentiment que cette image restera à jamais gravée dans ma tête. La première personne vivante de mon espèce, hormis mon petit frère, que je vois depuis des mois. Je suis tentée d'aller dans sa direction, de lui parler, de lui demander son nom. Je ne sais pas pourquoi, mais l'envie de lui demander son nom m'obsède. C'est ce que l'on fait en premier lorsque l'on ne connait pas quelqu'un, et je n'ai pas eu l'occasion de rencontrer des gens ces dernières années. Malgré tout, après avoir fait un pas vers lui, je me rétracte. Les deux extraterrestres sont déjà plus loin, Zack à mis chemin entre eux et moi. Il m'attend. Je me contrôle et poursuis ma route. D'autres humains m'attendent là bas, des français, et puis si ça se trouve, ce garçon ne parle même pas ma langue.

Je rejoins mon frère et nous nous dépêchons de rattraper Zorak et Eramo. Nous croisons d'autres personnes avant d'arriver à notre objectif. Elles ont l'air presque heureuses en dépit de leur situation. Voir des êtres humains me remplit le cœur d'une chaleur intense, je reste émerveillée devant chaque visage. Je dois paraître complètement idiote avec ce sourire béat collé sur le visage dont je n'arrive pas à me débarrasser. Arrivé devant l'un de ces cubes qui constellent la plateforme, Eramo toque à la porte.

Quelques secondes plus tard, une fille d'environ quatorze ans, grande, la peau légèrement hâlée, les cheveux bruns et lisses et les yeux marron-vert vient nous ouvrir. Elle nous regarde tour à tour, mon frère et moi, puis avec un grand sourire nous dit :

- Salut, moi c'est Alizée et vous ?

Je reste de marbre, comme paralysée, incapable de prononcer un mot. Moi qui voulais aller parler à un gamin, voilà que je ne parviens même pas à répondre alors que l'on m'adresse la parole.

- Elle s'est Jennifer, ma grande sœur, et moi s'est Zacharie, mais on m'a toujours appelé Zack.

C'est la première fois qu'il ouvre la bouche depuis qu'il nous a présentés à Zorak et Eramo. Certainement qu'entendre la voix d'un être humain autre que moi aura eu raison de sa peur.

- Ok ! Zack, Jennifer, suivez-moi !

Je respire enfin plus librement et suis cette inconnue à l'intérieur du cube. Elle nous fait entrer dans une pièce spacieuse. Au milieu, une grande table de bois surmontée d'un pot de fleur prend une bonne partie de l'espace. À gauche, une cuisine ouverte donne sur cette salle à manger lumineuse. Sur son comptoir est incrustée une plaque chauffante moderne, à côté, un frigo. Un placard est placé dans un coin de la pièce, la vaisselle y est certainement rangée. Nous pouvons compter sept portes, ce qui me fait dire que ce cube n'est pas aussi petit que je le pensais à première vue. Les murs sont entièrement blancs, donnant une certaine impression de pureté à la pièce, tout en accentuant sa luminosité. À l'autre bout de cette salle à manger se trouve une porte vitré coulissante, donnant sur une véranda. Tout ici me donne l'impression d'être dans une maison tout ce qu'il y a de plus normale.

- Comme vous pouvez le voir nous sommes dans la salle à manger. Toutes les portes donnent sur des chambres, sauf celle près du placard, c'est la salle de bains et les toilettes. Attendez ici, je vais chercher les autres.

Elle part en direction de la véranda. Ce n'est qu'à ce moment que je remarque que Zorak et Eramo ne sont plus avec nous, ils ont dû s'éclipser au moment où Alizée nous a fait entrer.

Elle revient peu de temps après accompagnée d'une fille de taille moyenne, aux cheveux châtain-roux et ondulés et aux yeux bleus perçants. Un garçon d'au moins un mètre quatre-vingts les accompagne. Il a la peau foncée, des cheveux noirs coupés en brosse comme ceux des militaires, des yeux noisette et un corps assez musclé. Ils ont tous les deux l'air d'avoir à peu près mon âge, peut-être un peu plus.

- Salut je m'appelle Mickaël, se présente le garçon.

- Et moi s'est Kayna, dit à son tour la fille.

Je leur souris, ils ont l'air plutôt sympa. Cette fois, je décide de nous présenter, devançant Zack.

- Ok, on va vous donner vos chambres, nous annonce Kayna. Suivez-nous !

Alors que nous nous exécutons, pour la premières fois depuis ces trois dernières années, j'ai l'impression que mon passé est loin derrière moi et que, même s'il me reste encore beaucoup de choses à traverser, mon avenir est peut-être moins sombre que ce que je pensais.

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>Corrigé et réécrit<