➳ Chapitre 5 : Jennifer

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Je me réveille dans mon lit. Je m'assois et laisse mes yeux s'habituer à l'obscurité.

Cela fait maintenant un mois que Zack et moi sommes au camp de réfugiés. Je m'y sens bien, je m'y suis trouvée comme une deuxième famille. Au bout d'un moment, je commence à distinguer ma table de chevet ainsi que l'horloge métallique suspendue au mur. Les aiguilles blanches, visibles dans une semi-obscurité, indiquent neuf heures du matin. Le miroir à gauche de mon lit reflète la forme diffuse de mon corps, caché sous la couverture, ainsi que l'ombre de la petite armoire de l'autre côté de la pièce, qui paraît en cet instant prendre tout un pan du mur.

Je me lève d'un coup, trop rapidement, car ma tête se met à tourner. J'allume la lumière dans l'idée de m'habiller, mais me poste finalement devant mon miroir. En général, je fuis ce reflet, mais cette fois-ci, trop tard, mes yeux restent accrochés à l'image qui me fait face.

Je ressemble tellement à ma mère qu'en général, je ne supporte pas de me regarder dans un miroir. J'ai alors bien trop l'impression de faire face à son fantôme... J'ai les mêmes cheveux qu'elle, bruns, longs et légèrement bouclés, ainsi que ses yeux verts. Avant, j'étais plutôt petite pour mon âge, je me souviens que ça me complexait beaucoup. Mais en trois ans seulement, j'ai atteint la taille de ma défunte mère. Maintenant que je me vois plutôt grande et élancée, un sourire amer vient étirer mes lèvres au souvenir de mes anciennes préoccupations d'adolescente. Sourire qui s'efface presque instantanément devant la minceur un peu trop importante de mon corps, quoique j'ai dû prendre du poids depuis mon arrivée au camp. En revanche, force est de constater que j'ai développé une sacrée musculature pour mon âge et ma carrure, sûrement à force de transporter des sacs chargés de provisions.

Je pousse un soupir en posant les yeux sur la grosse cicatrice de mon épaule gauche, datant d'avant la mort de mes parents. Une poutre du toit d'une maison m'était tombée sur le bras, manquant de peu de me le couper au passage.

Mes pensées dérivent progressivement vers mon frère. Lui tient plutôt de mon père : grand, maigre -peut-être même trop d'ailleurs-, il a également des cheveux très courts, blond cendré, et des yeux noisette. Malgré son corps frêle, il attirait beaucoup les filles de son école, grâce à sa beauté et son charisme. Je pense qu'il ne s'en rendait pas compte, car il a toujours eu un manque de confiance en lui phénoménal !

En pensant à mon petit frère, je ne peux m'empêcher de penser à notre vie d'avant, avec nos parents. Nous formions une si belle famille tous les quatre... J'aimerais avoir mon carnet, pour écrire tout ce que j'ai sur le cœur en ce moment, pour éviter de me mettre à cogiter. Mais je n'ai pas eu le temps de l'emporter avec moi. Et maintenant, je ne peux m'empêcher de broyer du noir.

J'avais besoin de mes parents plus que tout. Depuis qu'ils ne sont plus là, j'essaie de faire bonne figure devant Zack, mais je n'en peux plus, j'ai peur de finir par craquer, de fondre en larmes... Et si je pleure, je crains de ne plus réussir à m'arrêter et que cette carapace, que je me suis forgée depuis leur mort, ne se brise et ne se reconstitue plus jamais. Je me mets à sangloter malgré moi, la première fois que je pleurais depuis longtemps. Très longtemps... Mais je me ressaisis rapidement et me force à penser à autre chose. La douleur de la perte de mes parents ne s'envolera jamais, il faudra bien que je m'y habitue un jour. Désormais, ils font partie de ces êtres regrettés, que nous n'oublions pas, qui reste gravés dans notre cœur à jamais. Ils font partie de ces milliards de personnes qui ont disparus trop tôt.

Après être restée un moment debout devant la glace, je retourne m'asseoir sur mon lit. Afin de me concentrer sur des choses plus légères, j'essaie tant bien que mal de faire le bilan de tout ce que j'ai découvert ces dernières semaines.

Aeternam GalaxiaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant