➳ Chapitre 74 : Jennifer

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Mes jambes sont lourdes et la fatigue et la peur pèsent sur tout le groupe, quoique Yoran semble relativement détendu. Nous nous sommes reposés trente minutes tout à l'heure, alors que le soleil était déjà bien haut dans le ciel. J'ai la bouche pâteuse, mais je veux éviter à tout prix de gaspiller l'eau. Je boirais lorsque je serais vraiment assoiffée. Je fais donc abstraction du mieux que je le peux de mon épuisement, de ma soif et de ce foutu mal de tête qui m'enserre le crâne depuis un moment déjà. Nous suivons la route crevassée, endommagée par le temps, long chemin sinueux qui n'a l'air d'aboutir à rien de précis. Les embranchements sont peu nombreux et les panneaux pour la plupart au sol et recouvert de mousse ou de lierre. Il est plus que difficile de se repérer sans indication. Pourtant, Christophe marche sans aucune hésitation. Quand on le voit ainsi, aussi à l'aise avec tout ce qui l'entoure, on comprend facilement qu'il s'agit d'un enfant du pays. Cette région, il n'a certainement jamais rien connu d'autre. Moi, elle m'est presque totalement étrangère. J'appréciais beaucoup y venir en vacance, j'adorais ces paysages montagnards. Les gens qui y vivaient aussi, tellement gentils et moins stressés que ceux de la région parisienne. Ils avaient une toute autre mentalité. Aujourd'hui, les Alpes me font horreur et je ne rêve que du moment où je les quitterais. Mais pour aller où ? Si j'arrive à retrouver Zack, il faudra ensuite que je retrouve Brooke, hors de question de dissoudre une nouvelle fois la famille. Et ensuite ? Jamais elle ne voudra laisser derrière elle Christophe et jamais je n'arriverai à convaincre ce dernier de venir avec nous en Amazonie, dans un camp où se côtoient humains et Haeras. J'ai l'impression de nager en eaux troubles, l'indécision guidant chaque nouvelle brasse, impossible pour moi de savoir qu'elle est la meilleure direction à prendre, le meilleur choix à suivre. Le problème, c'est que je vis la peur au ventre, je sais très bien que le prédateur des fonds marins, lui, sait parfaitement où frapper pour me tuer. Et ceci n'améliore franchement pas ma prise de décision.

Sentant le groupe ralentir, je reporte mon attention sur la route. J'aperçois une maison sur notre droite, puis une autre un peu loin. Sûrement les abords d'un village. Christophe se baisse et saisi quelque chose caché sous un amas de mauvaises herbes. Il tire de toute ces forces pour dégager l'objet, un panneau cerclé de rouge.

- Je me disais bien qu'on était pas loin, mais je pensais pas qu'on y arriverait avant encore une heure ou deux. J'ai failli manquer le passage, fait-il en désignant de la main une route sur sa droite.

Le chef continue son chemin. J'arrive à mon tour au niveau du panneau qu'il a rapidement remis sous les lierres pour masquer notre passage. Dessus, on peut y distinguer le nom du village : Méaudre. Ce nom devait être symbole de vacances, sérénité et joie pour beaucoup autrefois. Dans quelques minutes, il ne m'inspirera certainement plus qu'angoisse et désillusion. 

L'endroit a des allures de village abandonné. Les routes sont fissurées, les maisons recouvertes de lierres ou à moitié effondrées. Tout ceci me rappelle Grenoble, lorsque nous nous y étions réfugiés, Zack, mes parents et moi. A ce moment là, nous ne nous doutions pas qu'une base Haera se trouvait non loin. En y repensant, je me dis que c'est sûrement ça qui leur a coûté la vie. Ils étaient tellement prudents... Pour être repérés, il fallait vraiment qu'il tombe nez à nez avec un de nos envahisseurs, qu'on leur tende un piège ou qu'on les aperçoive à l'aide de système de sécurité très développés.

Nous suivons la route, sans marcher en plein milieu, ainsi nous évitons de devenir des cibles ambulantes facile à atteindre. Après presque une heure à déambuler dans ces rues désertes, nous arrivons devant une bâtisse de grande taille. Elle semble en bon état, mise à part les murs qui arborent quelques fissures, en plus de lierres grimpantes. Nous approchons de la petite terrasse donnant sur l'entrée. Plusieurs tables sont retournées ou cassées, des chaises sont éparpillées un peu partout. Il devait s'agir d'une terrasse de restaurant.

Aeternam GalaxiaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant