Aeternam Galaxia

➳Chapitre 60 : Jennifer

Au début, je trouve ça gonflé de la part de Christophe de risquer la vie de Yoran plutôt que la sienne, mais après réflexion, il n'a pas tort : Yoran est le mieux habilité pour repérer les dangers que nous pourrions devoir affronter et y faire face. Et puis, inutile de s'y rendre à sept. Je suis tout de même angoissée à l'idée de devoir me battre. Le chef ne m'a laissé qu'un simple couteau de combat, légère défense contre un Haera, je suppose que c'est ma punition pour avoir emprunté un flingue sans autorisation... Je m'attends à voir surgir une multitude d'extraterrestres rouges à tout moment, armés jusqu'aux dents, avec une seule petite lame pour les arrêter. Brooke et Tyler m'encadrent à la manière de deux gardes du corps ce qui m'agace au plus haut point.

- Je manque d'air là, chuchoté-je en jouant des coudes pour les écarter.

- On a les flingues, t'as le couteau, t'es sûre que t'as pas besoin de nous ? fait Tyler en soulevant son pistolet en l'air.

Je grogne, mais ne proteste pas. Brooke s'éloigne de quelques pas et je lui lance un regard reconnaissant. Tyler, lui, ne bouge pas d'un pouce.

- Ty... grommelé-je, mécontente.

Il me lance un regard en biais, un sourire amusé sur les lèvres. Je suis partagée entre une furieuse envie de le frapper et de l'embrasser.

- T'es obligé d'être toujours aussi soûlant ? lui demandé-je en essayant de paraître sérieuse.

- Ouais, me réplique-t-il en souriant cette fois-ci de toutes ses dents.

Je me retourne en sentant quelqu'un me taper sur l'épaule. Brooke, un doigt sur ses lèvres, nous fait signe de nous taire. Non loin d'elle, je remarque alors l'air réprobateur de Christophe. Le temps avance lentement et les muscles de mes jambes commencent à me faire souffrir, alors je décide de m'asseoir dans l'herbe qui m'arrive presque jusqu'aux genoux. Cachée dans cet étau de verdure, je me sens davantage en sécurité et respire enfin plus librement. Les autres finissent par m'imiter, et nous nous retrouvons tous assis en cercle, sans pouvoir toutefois voir la personne d'en face. Une heure, ou peut-être deux, s'écoulent en suivant la course du soleil qui se couche progressivement à l'ouest, plongeant la forêt dans une semi-obscurité effrayante. La température diminue instantanément et je frissonne sous mon manteau et celui de Brooke que je porte toujours sur mes épaules. Un coup d'œil à ma cousine me suffit pour comprendre qu'elle est frigorifiée, alors je lui redonne le sien qu'elle accepte et enfile aussitôt. Instinctivement, nous nous collons l'une à l'autre, de la même manière que lorsque nous étions petites et que nous bravions l'interdit en regardant un film d'horreur déconseillé pour notre âge. Le cercle que nous formons se rétrécit petit à petit, chacun cherchant la chaleur de l'autre, et nous nous retrouvons tous agglutinés au milieu. Le hurlement d'un loup nous fait lever les yeux et sans que Christophe n'ait besoin de nous en donner l'ordre, nous nous tournons afin de nous retrouver tous dos à dos. C'est ainsi que Yoran nous découvre. Il fait irruption à l'endroit où il nous a laissés, accueilli par plusieurs pistolets braqués sur lui.

- T'aurais dû t'annoncer, lui reproche Dan. On aurait pu te descendre.

- Désolé, se contente de répondre l'intéressé.

- Alors ? lui demande Christophe pour l'inciter à faire son rapport.

- Personne. Je ne suis même pas sûr que les Amoqs Haeras soient déjà venus par ici. Mais si j'ai raison, ils pourraient bientôt s'y rendre, à moins que toutes les recherches aient été arrêtées le temps de retrouver les responsables du massacre de la base scientifique, dit-il comme s'il n'était pas l'un de ses exécutants.

- Très bien, on ira quand même demain matin, je ne veux pas prendre le risque de nous balader en pleine nuit dans la forêt. On ne devra pas traîner, tout ce que je veux, c'est comprendre ce qu'ils font ici et si leurs recherches présentent un risques quelconques pour nous.