Aeternam Galaxia

➳ Chapitre 24 : Yoran

C'est qu'il fait plutôt froid ici. Tout le monde grelotte, sauf Seya et moi. C'est l'une des caractéristiques de nos vêtements : résister aux éléments.

- Encore heureux qu'il n'y ait pas de neige ici, dit Tyler en claquant des dents.

- Il faut qu'on trouve un moyen de se réchauffer, et vite, déclare Jennifer.

    Je réfléchis un instant.

- Déjà, éloignons-nous le plus vite possible du vaisseau, ils vont certainement venir vérifier si nous sommes  bien mort dans le crash. Ensuite, il faudrait trouver des couvertures et des vêtements chauds. Peut-être qu'il y a une ville non loin d'ici.

    Zorak prend la relève :

- Encore une fois, il va falloir aller vite car lorsque les Amoqs Haeras auront constaté que nous ne sommes pas morts dans le crash, ils vont logiquement venir nous traquer dans les villes alentours. En plus, ils auront l'avantage du nombre.

    Sur ces derniers mots, nous nous mettons en route après avoir récupéré plusieurs armes dans le vaisseau. Nous commençons à descendre la montagne. Plusieurs fois, les deux humains manquent de trébucher et de dévaler la pente la tête la première, affaiblis par le froid qui semble beaucoup plus les atteindre que nous. J'observe Jennifer. Pas une seconde elle ne se plaint, ni du froid, ni de l'épuisement qu'on peut lire facilement sur ses traits tirés. C'est tout le contraire de ce Tyler, qui n'arrête pas de râler. Je mentirai si je disais ne pas avoir été étonné qu'elle ait survécu à sa blessure. Elle doit avoir un sacré mental et une très bonne résistance.

Je n'ai jamais considéré l'extinction de l'espèce humaine comme une grande perte, croyant les humains inutiles et faibles, mais si beaucoup d'entre eux étaient comme Jennifer alors je me suis certainement trompé. A ce moment précis, un indéfinissable doute s'installe en moi. Loin de la Secte, exclu de mon espèce, je commence enfin à réfléchir par moi-même. Et si les humains méritaient de vivre, méritaient plus que nous de vivre ? Je ne connais rien d'eux, rien de leur histoire, de leur évolution, comme d'ailleurs la totalité des Haeras, hormis le Gouvernement...

- Attention.

    J'attrape Jennifer par le bras au moment où son pied dérape sur un rocher humide, l'empêchant de peu de glisser. Elle rive ses yeux verts dans les miens et pour la première de ma vie, je détourne le regard. J'ai honte. J'ai participé à l'extinction... Non, à l'extermination de son espèce, sans même me poser la moindre question. Comment pourrais-je encore oser la regarder dans les yeux ?

Elle se dégage brusquement et continue à avancer. Je reste quelques secondes sans bouger puis, voyant Zorak me scruter, je reprends la route, essayant de laisser derrière moi toutes ces questions existentielles.


                                                                                  *   *   *

Une heure plus tard, nous parvenons à rejoindre un sentier. En contrebas, nous pouvons apercevoir les toits de plusieurs petites maisons en bois. Jennifer et Tyler hâtent le pas, pressés de pouvoir se réchauffer. Nous nous arrêtons donc devant la première maison. Zorak tape du plat de la main sur la porte qui s'ouvre sans aucune résistance.

Le chaos. Aucun autre mot ne pourrait mieux définir l'endroit où nous venons d'entrer. Canapés déchirés, table renversée, vases et vaisselles cassés... Et adossé à un mur du salon, un cadavre humain majoritairement décomposé, la bouche grande ouverte, qui semble pousser un hurlement. Un couteau de combat Haera s'est niché entre deux de ses côtes. Il est mort poignardé au niveau du thorax.

- Ça pue la mort ! s'écrie Tyler.

    Effectivement, le corps dégage une odeur putride suffocante.