Aeternam Galaxia

➳Chapitre 67 : Yoran

Nous mangeons l'un des deux lapins dans le plus grand des silences. Je garderai le deuxième pour plus tard, je ne suis pas sûr d'avoir le temps de chasser si nous voulons avancer rapidement. Je donne ma gourde à Jennifer. Elle est assoiffée et la vide d'une traite.

- Heureusement qu'Arès t'as trouvé. Je ne sais pas si je serais encore en vie sans toi, laisse-t-elle tomber.

- Tu sais survivre.

- Je peux survivre dans une ville, en cherchant de la nourriture dans les habitations, mais pas dans une forêt. Je ne suis même pas capable de chasser.

Je lui lance un regard en coin.

- Je t'apprendrai, si tu veux.

Face à son air étonné, je m'empresse d'ajouter :

- Je ne voudrais pas être le seul à devoir chasser. Si nous étions deux, nous pourrions nous relayer.

Elle acquiesce.

- Oui et puis, quand tu seras plus là, il faudra bien que je chasse.

- Tu comptes bientôt m'enterrer, plaisanté-je.

- Possible ! s'esclaffe-t-elle.

Je cherche quelque chose à lui répondre, mais ne trouve rien. Je n'ai vraiment pas l'habitude de rigoler avec les gens. Je baisse les yeux sur ma cuisse de lapin.

- Tu bleuis encore, lâche l'humaine, un sourire au coin des lèvres.

- Tu te sens obligé de me le faire remarquer ? ne puis-je m'empêcher de lui répondre.

- Décidément, t'es plus marrant que t'en à l'air au premier abord, raille-t-elle.

Je marmonne des paroles incompréhensibles, la faisant rire de plus bel. Je ne vois pas ce qu'il y a de si drôle. Peut-être est-ce encore une subtilité humaine que je ne suis pas capable de comprendre.

- Désolée, c'est nerveux. C'est toute la pression qui retombe, m'explique-t-elle en reprenant son sérieux.

D'un mouvement de la main, je lui signifie que ce n'est rien et la pièce retombe dans un silence pesant.

- Ne t'inquiète pas, pour la chasse, ça ne me dérange pas de tuer pour nous deux.

C'est une phrase à double sens et au regard qu'elle me lance, je crois qu'elle l'a bien compris.

- Mais tu ne seras pas toujours là.

- Où veux-tu que j'aille, dis-je innocemment.

Elle hausse les épaules.

- Tu voulais rejoindre le camp de Zorak, non ?

Pris au dépourvu, je reste muet pendant un instant.

- C'est vrai que c'était mon projet, mais ces derniers temps j'y ai tellement peu réfléchi... En plus, Zorak n'est plus là.

- Et alors ? Tu peux voler un vaisseau à Grenoble.

- Oui, mais... c'est compliqué. Nous avons déjà eu de la chance de nous échapper une première fois d'une base et celle-ci doit être davantage surveillée. De toute façon, comment pourrais-je rejoindre le camp sans guide ?

- Tu connais sa position, t'auras juste à rentrer ta destination dans le tableau de bord.

- Je n'aurais pas la localisation précise. Ce serait beaucoup plus simple si tu m'accompagnais.

Elle lève un sourcil et je regrette aussitôt mes paroles. Voilà ce qui arrive quand je parle avant de réfléchir. Je tente de masquer mon malaise en croquant dans la cuisse de lapin que j'ai en main.