« Une relation tissée est difficile à couper »
Melha me répond brièvement, ne me regarde pas ; un signe que ma maladresse l'a blessée. Sa mère me taquine un peu : sur le fait que je deviens un homme, que j'ai ramené des fleurs à sa fille, que j'ai réussi à lui faire plaisir alors que pendant toutes ses années je me suis contenté de lui arracher les ch'veux. J'écoute le peu d'information qu'elle me sort tout en matant la boudeuse. Elle m'énerve quand elle se comporte ainsi. Elle sait que je suis un pauvre mec qui sort les choses spontanément, j'vois pas pourquoi elle tire la tronche ! Les meufs toujours en train de se prendre la tête pour wallou.
Les pensées se bousculent, s'embrouillent dans ma tête ; pourquoi souffrir pour un mec alors qu'elle est à moitié en train de clamser ? Pourquoi pas penser à sa santé avant ? Cet amour factice la ronge plus que sa foutu maladie. Le pire dans toute cette histoire c'est que le prince du con l'aime pas en retour !
La porte s'ouvre, et laisse apparaître son père. Le Chef de la famille, l'homme qu'il ne faut pas heurter si on ne veut pas se retrouver sans membre. Son air autoritaire est un éclair, sa voix grave est un électrochoc et son rire sympathique est un tonnerre. À l'époque, je le comparais à Hitler tellement il me faisait rleh. Il me rappelle parfois mon père surtout quand il est vénère. Je comprends pourquoi ils s'entendent bien. Il nous regarde à tour de rôle, il a des gobelets à la main. Melha est sa fille unique c'est la raison pour laquelle il a toujours cherché à ce que je ne m'approche pas trop d'elle, faute de lui porter préjudice, mais au fil du temps il a apprit à accepter notre amitié...enfin c'est pas trop ce qu'il laisse voir en premier lieu. En vrai malgré ses airs de bourreau c'est un putain de père aimant, si sa fille lui demande la lune, il remuerait ciel et terre, vents et marrées pour la lui ramener. Sa femme se dirige vers lui et prend ce qu'il porte dans les mains. Il s'approche de moi, l'air déterminé. Naturellement, il me tend son poignet que j'attrape sans faire de manière. Ses yeux ? Des obus.
- Tu vas bien jeune homme ?
- On ne peut mieux.
La communication entre lui et moi est un peu plus compliqué que je ne le croyais. Sans que je ne m'y attende il me prend dans ses bras et me chuchote quelques bonnes paroles. Qui aurait cru qu'un jour j'aurais droit à son étreinte ? Il se détache de moi en essuyant ses mains sur son pantalon puis se dirige vers sa fille. Ils parlent en arabe marocain, j'comprends quelques trucs vite fais mais m'attarde pas. L'ambiance est un peu trop funèbre pour moi. J'en ai la pomme d'Adam bloqué. Leurs discussions tournent autour de leur voyage au Maroc.
Pffiou ! Ça fait plusieurs années que je n'ai pas mis les pieds sur le sol algérien. Les souvenirs défilent, s'associent, forment une ronde, et dansent dans mon crâne. Je revois la maison de mes grands-parents, leurs sourires, l'ambiance chaleureux, les cousins, les cousines, les tantes, les oncles... tout me revient en tête en une fraction de seconde. J'imagine leurs tristesses dû à sa disparition. Je reviens aussitôt sur terre. Ils décident de partir ranger leurs affaires chez elle. Sa mère dépose un léger baiser sur son front, son père fait de même avant de me jeter un regard de killer. Yeaaah ! L'accolade c'était une ruse.
- Ton père il veut vraiment m'exterminer !
- Il est comme ça depuis qu'on se connaît, il ne changera pas du jour au lendemain.
- J'ai cru me liquéfier sur place, tahu le regard qu'il m'a lancé? Il s'est trop cru dans le film Scarface, t'es sûr que ton daron, il deal pas ?
- Contrairement à ce que tu penses il ne se risquerait pas dans cette voie là.
- Arrêtes de tirer la tronche !
- Tu te fous de ma gueule là ? Ma mère était là et tu parles de ça normal. Déjà que je suis mal à l'aise quand elle en parle, imagine quand tu en rajoutes ? Hier, on a bien dit qu'on en parlait plus, ton insistance m'enquiquine pour ne pas être vulgaire, tu le comprends ça ou pas ?
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Le naufragé de la rue
General FictionLa perte c'est la peste. Elle nous poursuit toute notre vie. - Laïli.M HISTOIRE NON ECRITE PAR MOI