« Hystérique love »
Elle me dit ces propos les yeux dans les yeux, mais merde ! j'arrive pas à y répondre. Je change de sujet comme de chaussette, c'est un délire de tapette. À la base, quand t'es marié, t'as cette facilité à répondre à la femme que t'aime non ? Moi c'est tout le contraire. J'ai un caillot dans la gorge qui m'en empêche. Sah, elle me déstabilise dans tous les sens du terme. J'sais pas mais dire à une femme ''je t'aime'' n'est pas dans mes cordes, ma fierté va finir par me pendre ! Comme dirait Kery James, je bâillonne « mes sentiments avec les liens de la raison » . J'y arrive pas, c'est au-dessus de mes forces.
Dans ma vie de pouilleux, j'ai tout fais à part ce genre de déclaration qui me semble, honnêtement, pas viril... pas digne d'un homme. J'sais pas, j'le disais normal à Melha parce que c'est... c'était... j'sais pas ! ma pote ou à ma daronne mais à Malak... J'ai grandit avec le fait qu'un homme ne dit pas ce genre de chose à un type de femme, par exemple, j'ai jamais entendu mon daron le dire à yemma. J'suis débile ! En sah, j'vois pas non plus le padré, le faire. Je me vois pas lui sortir ce bordel dans les yeux ; la vérité, j'arrive à me rendre taré avec cette myriade de sentiments qui m'attrape les tripes. Sah, je préfère étouffer ce bordel, c'est pas mon délire, ça viendra avec le temps, faut que j'apprenne... ça s'apprend, tranquille ! je me retourne le cerveau solo.
Les gouttes d'eau, sans ménage, s'en prennent à nos deux faces. Elle enlève mes mains qui se sont emparées de son visage. Je pointe mon index sur son front et la pousse en arrière avant de déposer un baiser sur son front. D'une manière enfantine ses poings viennent tambouriner doucement contre mon torse. Son faciès mouillé et le semblant de sourire qu'elle laisse apparaître m'arrache un rictus : dans cette situation son regard de môme prime sur tout. Automatiquement, je passe mon bras derrière sa nuque. On marche.
- Té-ma comment j'suis ridicule... Tu me fous dans la merde, je marche sans chaussure sous la pluie, on s'croirait au bled chez ma grand-mère.
- T'es un bledard qu'est-ce que tu veux ?
- Je préfère en être un, qu'une hystérique.
- C'est qui que tu traites d'hystérique ?
- Le voisin.
- L'année prochaine pour ton anniversaire, je t'achèterais un dico rassemblant de bonne blague parce que je te promet t'es nul à... sans être vulgaire, à chier.
- Qui te dis que l'année prochaine j'aurais pas changé de meuf ?
- Tant mieux, je trouverais mieux au marché.
- Ze3ma j'suis un mec qu'on trouve au marché ?
- Je rectifie, on te trouve dans les brocantes.
Je m'arrête puis enlève mon bras.
- La vie de moi, cours parce que si je t'attrape t'es dans la merde ma p't...
J'ai pas le temps de finir ma phrase qu'elle a déjà déguerpit comme Bip Bip. Coyotte n'a rien vu venir. À l'ancienne c'était un bon dessin-animé, je me marrais devant la TV solo. Je bouge pas et la regarde courir. Elle s'arrête à un moment donné et commence à me charrier. J'ai le droit à une danse burlesque sous la pluie. Elle a pas besoin d'en faire plus pour qu'elle m'ait à ses trousses. L'orage gronde au dessus de nos têtes. Je sais pas ce qu'il se passe là-haut pour qu'il y ait cette pluie torrentielle aujourd'hui. Elle disparaît dans notre bloc. En courant, j'ai faillit me couper avec les bouts de verre de rhum jeté dans le hall. Notre violence, nos conneries commencent par s'attaquer à nos propres êtres avant de s'en prendre aux autres.
Je rentre dans l'appart', de l'eau jonche le sol et comme un hmar je fais pas attention et me ramasse. Wallah mon cul, il a rien compris à sa vie ! J'ai pas fais ce genre de chute depuis un bon bout de temps, je reprends le goût à la douleur : ça fait mal sa mère ! La porte d'entrée se referme avec des rires émanant de la bouche de Malak, ze3ma elle se cachait.
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Le naufragé de la rue
Ficção GeralLa perte c'est la peste. Elle nous poursuit toute notre vie. - Laïli.M HISTOIRE NON ECRITE PAR MOI