Le naufragé de la rue

33.

« Décomposition »

Je suis perdu. J'suis plus. C'est quoi encore cette histoire de merde ? Elle est en train de m'la faire à l'envers. Je suis posé dans ma voiture, portable à la main. Je l'appel. Ça sonne mais elle ne répond pas. J'sais pas combien de fois j'ai insisté mais ça commence à me monter les nerfs, truc de fou ! Putain ! Mon poing s'écrase sur mon volant. J'me talonne à essayer de faire les choses bien, et j'me ramasse un mur. Elle est trop entière c'te meuf, ça en vient à me faire, clairement, chier. Elle me dit les choses spontanément sans réfléchir aux conséquences. Wesh, elle a cru que j'avais pas besoin d'elle ou quoi ? Depuis qu'elle est rentrée dans ma foutue vie, mon cœur, ce fils de pute, il devient ouf ! La seule qui arrive à me changer les idées me laissent dans la merde ; c'est un cauchemar ma parole !

Je fais toujours les choses de travers. Il y a toujours un problème avec moi. Je suis un destructeur ambulant : la gente féminine à mes côtés se décompose : c'est un constat amer mais c'est la vérité. Elle me fuit toutes comme la peste. Je sais pas si ce qu'elle vient de faire j'peux le qualifier de fuite... c'est quoi si c'est pas une fuite ? J'insiste une nouvelle fois, cette fois-ci je tombe sur le répondeur. Bsarthek, elle veut se la jouer meuf solo, sans partenaire ! Je trace ma route.

Elle veut que je réfléchisse à quoi ? Il y a rien entre Melha et moi, et il n'y aura rien. Elle doute parce que j'ai eu un moment de fléchissement et que j'ai inversé leur prénom ? C'est puérile et con ! Je comprends pas où est-ce qu'elle veut en venir. Je lui ai prouvé maintes et maintes fois ce bordel dans mon cœur non? Ouais, je suis maladroit mais c'est comme ça. Elle attend quoi de moi concrètement ? J'ai fais des sacrifices pour sa gueule, si elle me disait de changer heja je l'aurais fais. J'ai le cerveau calciné par les points d'interrogations ! Je suis pris dans un filet.

J'arrive à la cité. Je tente une énième fois de la rappeler... à quoi elle joue ? Ouais t'es partie mais c'est pas une raison pour esquiver mes appels ! J'essaie de laisser un message sur son répondeur, sans succès. Ma langue est liée. Je lâche l'affaire. Je descends de mon véhicule. Ça pue la misère ; d'un bond ma vision s'est arrangée. En partant, j'avais pas remarqué l'état de la tess, sachant que la nuit dernière il y avait eu des émeutes. Malak a flouté ma vue. Maintenant qu'elle n'est plus là, je revois la réalité dans laquelle on vit. Je mange, je dors, je me lève dans la merde et personne ne fait rien pour changer ce bordel ! J'ai envie de me barrer de ces favelas. Ils nous ont enclavés comme des rats et on reste passifs.

Je croise Brahim.

- C'est quoi cette tête frère ?

- Tu veux quoi ?

- Ze3ma t'es marié maintenant donc tu calcules plus ? T'étais pas là quand il y avait les poulets hier soir, c'était un truc de taré !

- Vous avez quoi à me dire tous la même chose ? Ma vie je vais pas la passer à vos côtés bande de pédé ! J'ai pas le temps avec ces embrouilles de merde qui nous ramène en GAV à chaque fois.

- Faut arrêté de manger de la pâté pour chat le matin, ça se voit que tu digères pas bien.

- Sah, barre-toi, t'es un comique à deux balles !

- Avant que tu m'envoies ton poing dans la tronche, tu viens à la ré-soi soir-ce ?

- De quoi tu parles ?

- Karim organise un truc de ouf d'après ce que j'ai entendu, depuis quelques semaines, il a même loué une salle pour l'occaz'. Hassoul, ça va être de la bombe, il y aura de tout !

- Karim qui ?

- Karim le cousin de Moha.

- Tu m'avances en rien là.