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« Le cœur qui part en cacahuète »

Je sens quelqu'un me secouer, j'ouvre les yeux. Putain ! Je me suis endormi. L'infirmière me regarde en souriant. J'émerge de mon sommeil petit à petit. Je suis K.O, c'est un truc de dingue. Melha est allongée sur son lit, elle me fait un signe qui voulait dire : « T'as que ça à faire à dormir là ? » Ta gueule ! Elle cherche toujours la petite bête. J'la mate avec mon plus beau regard noir. L'infirmière déguerpit en me faisant comprendre que l'heure passe et que les visites sont terminés dans quelques minutes. Ta gueule toi aussi ! Elles se sont toutes ligués contre moi aujourd'hui, c'est pas possible autrement.

Je me lève et m'étire.

- Bien dormi ?

- Ferme-là un peu non ?

- Non !

- Tu veux que je te fasse taire ?

- Essaye pour voir.

Toujours un mot plus haut que moi, elle peut pas se contenter de la fermer quand on le lui demande, une migraine. Je m'approche d'elle en mode scarface, obligé elle se fout de ma gueule.

- Tu donnes mal au crâne.

- C'est pas de ma faute si tu n'es pas crédible et surtout si tu es ridicule. Si tu veux des cours de regard noir, je peux t'en donner gratuitement en plus.

- Tu jactes trop pour rien, c'est pas parce que l'ange de la mort voulait pas de ta sale face de sorcière - d'ailleurs je le comprends, personne veut de ta vieille tête - que tu peux te permettre de te foutre de moi.

- Je t'achèterais un livre 100% blague parce que tu es vraiment nul à... je veux pas être vulgaire mais c'est le mot, tu es nul à chier.

Elle use de son talent de chercheuse du dimanche pour me faire oublier ce qui me trotte dans la tête. Je ne peux qu'apprécier. Si je l'avais perdu, j'aurais pas supporté. Son visage cadavéreux est lumineux : depuis qu'elle n'est plus sur un bûché funeste, elle vit. Échapper ainsi à la mort n'est pas donner à tout le monde. Dans chacune de ses paroles, je remarque qu'elle veut me faire cracher le morceau sur ce qui m'arrive mais j'esquive. La roue tourne, elle veut pas m'en décrocher une sur le mec et elle veut que je lui déballe la caisse de merde que je transporte. Elle reste sur la défensive, je fais de même, comme ça on est quitte. Ouais, c'est gamin mais je m'en bat les reins !

L'infirmière pointe à nouveau le bout de son uniforme. Je tchèque Meli et me barre avant de faire un scandale pour rien. Je traverse le couloir. Je croise un distributeur qui me tape dans l'œil, j'ai la dalle. À ce qu'il paraît la réflexion donne faim, je ne peux que confirmer. Après avoir pris un p'tit truc, je file en mangeant. Soit la poisse me colle au cul, soit je délire. Depuis que Melha est hospitalisée, je viens ici et je ne l'ai jamais croisé... aujourd'hui comme par hasard, je dois voir sa tronche. Elle est avec sa collègue devant l'ascenseur. Je suis pris par une rage qui m'engourdit les membres. Je la joue à la James Bond comme une vieille mouille je me cache. Désolé l'agent 007 de te comparer à une mouille mais là c'est un cas extrême ; je ressemble à ça. Je la mate rigoler, son sourire m'adoucit. Elle a une emprise sur mes émotions qui me fait flipper ! J'ai qu'une envie c'est de la kidnapper et la faire réfléchir à deux fois sur son envie de s'engager avec ce Bilal. Engages-toi et je t'étripe ! Toujours le sourire aux lèvres, elle regarde autour d'elle, on aurait dit qu'elle m'avait entendu. Je me suis collé au mur. Une blondinette passe à côté de moi, elle me dévisage. Je crois lui avoir lancé mon regard le plus sombre pour qu'elle parte en trombe comme elle l'a fait. Quant à Malak, elle est montée dans l'ascenseur, lorsque je suis sorti de ma cachette j'ai pût entrevoir son visage.

Le naufragé de la rueOù les histoires vivent. Découvrez maintenant