« L'arène »
On tourne autour du pot depuis un sacré bout de temps... les mois ont passés depuis cette histoire, maintenant faut qu'on ferme la vieille page ou qu'on brûle le livre. Y a pas mille solutions. Je sais que je suis parti en boulette en faisant ce que j'ai fais, mais faut qu'elle comprenne que c'est trop tard, il y a plus de retour en arrière. J'ai l'impression qu'elle cherche à me jeter dans les bras de Melha ou un délire du genre, le truc qui, pour moi, restera dans l'impossible. Même si on me pointait un gun sur la tempe pour que je me case avec elle, je le ferais pas. Wallah, cette meuf est trop.. j'sais pas, mais je peux pas avec elle. J'imagine pas le délire, je l'ai d'ailleurs jamais imaginé. Il y aura toujours un couac quelque part. Je préfère être seul que me foutre avec elle. Ce qu'elle ressent pour moi je le prends comme un fardeau sur mes épaules, c'est trop lourd à porter.. je peux pas du jour au lendemain la voir autrement. Je me sentirais faux. Le bonheur serait factice. Cette mra m'a donné énormément, et lui rendre l'appareil, en me rapprochant d'elle serait incroyablement hypocrite.
Je cache pas qu'elle a chamboulé deux bâtards d'organes ; le cerveau et le cœur, mais c'est impossible... À l'heure actuelle, je suis marié et je me vois pas plaquer, celle qui m'a sorti du gouffre, celle qui provoque le tsunami dès que je la vois, celle qui a réussi à me sortir les ver du nez sur mes sentiments, pour quelqu'un d'autre, comme le dirait Ali, c'est pas dans mes cordes. Elle se contente de m'étreindre. Aucune réponse ne pleut, aucune interrogation ne foudroie. Je dépose mes lèvres dans ses cheveux.
- T'as faim ?
- Grave !
Elle se détache de moi et s'arrache du lit. Je la fixe deux secondes, puis descend la rejoindre. Elle me prend par la main et m'emmène dans la cuisine. Je m'installe. Ça fait bizarre de la voir me préparer heja ; je sais pas vraiment c'que ça veut dire. Les frites au feu et le steak sur la poêle elle se tourne vers moi, s'appuie contre l'évier, prend un torchon et s'essuie les mains.
- Pourquoi tu me cherchais ?
- J'avais besoin de parler. Maman est pas bien, Fatou ne va plus en cours, elle rentre pas à la maison et.. j'sais pas, je me sentais un peu seule.
- Tu voulais que je prenne mes distances et tu m'cherches ? Elle est où la faille ?
- Sana est débordée, ses parents s'inquiètent pour ma petite sœur, j'avais personne d'extérieur à tout ça, à qui parler. Et vu que t'avais disparu, je parlais à mon crayon.
Elle me sert et me file l'assiette. Le coude sur la table, la paume de la main sur le menton, elle m'observe avec un regard vitreux, ça se voit qu'elle est pas au mieux de sa forme. Je l'ai pas vu aussi faible depuis que j'ai foutu en l'air notre relation. Elle me pique une frite avec une lenteur de tortue puis la porte à sa bouche. J'aime pas cette ambiance de merde, à la base, j'suis le glaçon et pas le contraire. J'attrape une frite et la porte à ses lèvres pour qu'elle bouffe parce que là... merde quoi ! Parle bordel, fais la pipelette ! J'arrive à lui arracher un rictus. Elle me nourrit à son tour, pour essayer de la faire réagir, je la mords : technique de gamin, mais c'est toujours efficace.
- Aïeee ! Pourquoi t'as fais ça ?
- J'aime bien.
Elle me pince, pas ze3ma avec de la douceur... non ! Une pince de crabe, j'ai cru perdre ma peau. Je la mate avec des yeux de tueur.
- J'aime bien, dit-elle en m'imitant.
- Et moi, tu m'aimes ? demandai-je les yeux rivés sur elle.
- J'te retourne la question.
- A ton avis, je serais là ?
- Je sais pas. Parfois, je me dis qu'on a été trop vite, parfois je me dis que j'ai été trop vite.
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Le naufragé de la rue
General FictionLa perte c'est la peste. Elle nous poursuit toute notre vie. - Laïli.M HISTOIRE NON ECRITE PAR MOI