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« Voué aux gémonies »

Il est temps que je me purifie l'esprit ; la gente féminine va finir par me rendre plus paro que j'le suis déjà. C'est grave de se dire, que deux meufs se déchirent à cause de ma face. Pour certains ce serait flatteur, mais Wallah pour moi, je deviens un couteau sous la plaie. Ces deux femmes font partis intégralement de ma vie, et je ne peux pas en rayer une, pour l'autre ; ça me paraît insensé et cruel! Ce ne sont plus les mêmes femmes, par ma faute. Je crois que je suis condamné à culpabiliser, ça en devient flippant sa race !

L'une a grandi à mes côtés, on a fais les 400 coups ensemble, le mot d'ordre c'était la confiance, le mot à jeter était la méfiance. Nous avions une complicité de ouf, la réalité nous a trop vite rattrapé. L'autre m'a sorti du gouffre avec une aisance incontestable. Elle a le sourire contagieux, la joie de vivre incassable, une femme avec beaucoup de valeur. Sa confiance en l'être humain m'étonnera toujours ; même le pire des salauds, à pour elle, droit au respect et à une seconde chance car on ne naît pas condamné, on le devient.

M'éloigner de ce climat désastreux m'aidera, j'espère, à retrouver la raison. Putain ! Je revois son corps cadavéreux, secoué par les larmes, décomposé par la tristesse. Elle va partir à cause de moi et j'ose pas l'en empêcher, en sah, j'en suis incapable, ce serait un manque de respect total. Elles m'ont apporté de dingue, et je les remercie en étant une ordure. Bsarthek la reconnaissance ! S'il existait un concours de gaffeur, je passe ma tête à la guillotine, que je serais sur le premier podium. Je mate l'horizon avec un goût âcre dans la bouche ; c'est dur de se dire qu'on est la cause des larmes de nos proches. Quelques années en arrière, je ne pense pas que j'aurais réagis de la même manière, peut-être même que j'aurais fais ce que je vais faire là en partant en Algérie ; fuir.

Je reçois une réponse avec le numéro d'une agence. Je perds pas de time et appelle directe. Enregistré. En un clin de cil tout peut basculer, c'est une dinguerie. Je signe mon départ du toit en donnant un coup de pied dans une bouteille. Déconcerté, je descends les marches. Je m'arrête devant son appart'. Je me tire. Arrivé dans ma piaule, je m'allonge sur mon canapé. Les images défilent dans ma tête. Demain, je me barre. J'attrape mon portable, j'appelle le patron du garage, David. Sonnerie. J'ai enchaîné plusieurs tentatives sans succès, j'appelle Moussa. Au bout du fil, des bruits de gosse parasite la converse. Il gueule pour que les mômes se la ferment avant de me reprendre.

- Ouais !

- Pas besoin de gueuler, je t'entends gros.

- Ces mômes sont en train de me niquer le moral, s'cuse.

- T'es dans une colonie de vacance ou quoi ?

- Pire, c'est un truc de fou ! Ma daronne m'a laissé toute la tribu et ma femme elle s'en balec de ma situation.

- Famille nombreuse, famille heureuse, dis-je en ricanant... Je vais pas tourner autour du pot Moussa, j'ai besoin de prendre l'air quelques jours, et donc...

- Tu pourras pas bosser c'est ça ?

- Ouais.

- Le premier patron reste David.

- Il répond pas au phone-tel.

- ... C'est vrai que ces derniers temps, t'as la tête dans le cul... T'es vraiment con de demander ce genre de délire à la dernière minute... tu... vas-y, je vais parler avec David... tu me fous dans la merde. Après j'espère que tu seras à l'écoute parce que ces temps-ci c'était pas trop ça.

- Je demande une semaine et c'est pas pour rien. J'étouffe ici c'est un truc de taré... Wallah que t'es un bon.

- Va pas te foutre dans la merde.

Le naufragé de la rueOù les histoires vivent. Découvrez maintenant