Je trouve le courage nécessaire et je commence mon récit.
-Je connais bien le magasin de musique parce que j'y vais depuis l'âge de dix ans. C'était avec un ... Un ami ... Mon meilleur ami, il avait deux ans de plus que moi et on y était presque tous les jours. C'est là-bas que j'ai appris à jouer, avec tous les instruments qu'il y avait c'était le paradis pour nous. On y a passé tellement d'heures qu'on a fini par devenir amis avec les employés. Il y avait Capucine et Maël, ils avaient quatorze ans et venaient donner un coup de main après les cours. Et Alizée... On la vu tout à l'heure. C'est la fille du propriétaire et elle aimait passer du temps avec son père au magasin, et au fil du temps avec nous, on s'est rapprochée.
Je souris en me rappelant les nombreuses heures qu'on a passé ensemble, dans l'atelier au fond de la boutique, à refaire le monde et imaginer comment seront nos vies plus tard. Jamais je n'aurais pensé en être là aujourd'hui. Christelle sourit à mes souvenirs que je lui partage. Nos rires, nos joies, et au final notre amour quelques années plus tard.
-On était heureuse, je pensais même le dire à mes parents, mais il y a eu, ce jour où...
Ma voix faiblit pour ne devenir qu'un murmure à peine audible. Des flashs de cette journée m'arrivent par vagues, de plus en plus fortes. Perdue au milieu de mes souvenirs j'ai de plus en plus de mal à respirer, l'émotion est trop forte, je sens la crise arriver et m'emporter.
-Tu n'es pas obligée de continuer si c'est trop dur, je comprendrais.
Sa main droite vient attraper les miennes d'un geste réconfortant alors que la seconde me caresse le dos, m'aidant petit à petit à retrouver mon calme. J'essuies les larmes sur mes joues et ferme les yeux une seconde, il faut que j'arrive à me maîtriser.
-Non, je veux continuer...
Blottie dans ses bras, j'inspire profondément avant de me lancer :
-Ça faisait presque deux ans qu'on était ensemble. J'avais seize ans quand c'est arrivé. Je devais aller à la banque et mon meilleur ami m'a accompagnée, j'ai tellement insisté pour qu'il vienne avec moi...
J'ai mis des années à essayer d'oublier ce jour, le plus horrible de toute ma vie, et aujourd'hui, devoir revivre cette journée et bien plus difficile que je ne l'aurais cru.
-On allait sortir quand deux hommes cagoulés sont entrés, ils avaient des armes, des grosses armes... Et ils... Ils ont commencé à tirer sur tout le monde.
Les bruits sourds des balles sortant des canons résonnent encore aujourd'hui dans mes tympans, hantant mes nuits comme mes journées. Je suis obligée de fermer les yeux pour trouver toute la force nécessaire pour continuer.
-Je n'ai pas compris immédiatement ce qu'il se passait et je suis restée plantée debout. C'est sa main qui m'a sortie de cette torpeur, il s'est jeté sur moi pour me protéger... Les braqueurs tiraient dans notre direction étant donné que j'étais la seule personne encore debout.
Je suis obligée de m'arrêter pour ne pas craquer totalement, essayant tant bien que mal de retrouver le souffle qui me manque. Mes ongles grattent frénétiquement mes avant-bras où d'anciennes marques sont cachées sous l'encre noire de mes tatouages. J'essaye de trouver mes mots pour qu'elle comprenne ce qu'il est arrivé ce jour-là.
-Le reste de mes souvenirs sont plutôt flous... Je me souviens du poids de son corps sur le mien, des cris, des pleurs, et du sang... Enormément de sang...
Mon corps est parcouru de soubresauts, je n'arrive plus à garder en moi toutes ces émotions qui m'envahissent. Christelle vient m'enlacer et commence à nous faire basculer d'avant en arrière lentement, espérant sûrement calmer mes pleurs et ma peine
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Juste une étincelle
Romansa-Maman, Maman ! T'as vu ? Regarde ? Je lève le regard sur le visage de ma mère, concentrée à sortir un cahier de mon cartable. -Qu'est-ce qu'il y a, chouchou ? -Y a une nouvelle dame à l'école ! Je sautille sur place, excité de voir une no...