Juste une étincelle

Chapitre 50

Il fait quelques pas dans ma direction, alors que je suis bloquée sur place. Le revoir me fait tout drôle, des flashs de notre dernière rencontre me reviennent. Je sers les poings, voulant refouler les sentiments qui remontent.

-Tu as l'air en forme... commence t'il mal à l'aise.

Il me faut plusieurs secondes pour me canaliser, et lui répondre le plus posément possible.

-Je le suis, mais ça n'a pas toujours été le cas.

-Je m'en doute, je suis désolé, pour tout ça.

Il tend sa main vers mon visage, mais je recule d'un pas.

-Désolée, je...

-Tu n'as pas à t'excuser, c'est moi... tu me manques tellement.

Les trémolos dans sa voix me serrent le cœur, je sais qu'il est sincère, et il me manque à moi aussi. Nous n'avons jamais était séparés aussi longtemps.

-Toi aussi, papa. Mais je comprends pas pourquoi vous m'avez fait ça...

-C'était pour ton bien, viens t'assoir et je te raconte. Tu est prête à entendre toute la vérité ?

-Je t'écoute.

Sur un banc à côté de lui, je laisse un espace entre nous. Il gratte sa barbe nerveusement, je relève les yeux vers mon immeuble et fixe une des fenêtres au premier étage. Je suis presque sûre que Christelle est de l'autre côté, veillant à distance que tout se passe bien.

-C'était un soir où tu étais chez Alizée. Ton frère a... a fait un malaise. Avec ta mère, on l'a conduit aux urgences, et après toute une batterie d'examens, le résultat est tombé. Malformation cardiaque. Le monde s'est dérobé sous nos pieds, et on a perdu tout espoir quand on nous a appris qu'il lui restait trois mois à vivre, quatre au maximum...

J'essaye d'intégrer au mieux ces nouvelles informations, digérant difficilement qu'ils m'aient caché tout ça. Le regard fixé sur arbres du parc mon père cherche ses mots.

Mais je ne supporte pas longtemps le silence qui s'installe, je veux des réponses, et maintenant.

-Pourquoi vous ne m'avez pas appelé ? Pourquoi vous m'avez rien dit quand je suis rentrée ? Pourquoi il m'a rien dit ? Pourquoi il m'a menti ?

-Il nous a fait jurer de garder le secret, il ne voulait pas te voir triste, tu sais qu'il a toujours détesté te voir pleurer.

-Mais pourquoi, pourquoi les médecins ne l'ont pas sauvé... ? Pourquoi ils l'ont laissé mourir ? Ils doivent sauver les gens, pas les regarder mourir !

Ma tristesse est remplacée par la colère, je me redresse d'un bond et fais les cent pas sous ses yeux.

-Les médecins n'y sont pour rien, tu connais ton frère. Il a refusé tous les traitements qui auraient pu lui donner du temps en plus.

-Bien sûr qu'il ne voulait pas de quelques mois de plus ! Il voulait vivre ! Vivre une vraie vie, heureuse et entière ! Pourquoi ils ne lui ont pas trouvé un nouveau cœur ?! Je lui aurais donné le mien !

-C'est pour ça qu'il ne voulait pas qu'on t'en parle. Il t'aimait si fort. Il a refusé de gâcher les derniers moments qui vous restaient.

-On aurait rien gâché du tout si les médecins lui avaient greffé un nouveau cœur ! Ils auraient dû le sauver !

-Ils ne pouvaient pas. Ton frère avait, je ne sais plus le terme compliqué que les médecins ont utilisé, mais son aorte était difforme. Son corps était trop fatigué pour subir les nombreuses opérations qui lui auraient permis de pouvoir recevoir un nouveau cœur.