Juste une étincelle

Chapitre 56

 -Alors, qu'est-ce qu'on peut faire pour vous ?

Malgré le sourire rassurant de Caroline, j'appréhende sa réaction, tout comme celle du directeur.

-J'aimerais ajouter une personne dans la liste des personnes pouvant récupérer les enfants, mais je pensais qu'il valait mieux vous expliquer la situation avant.

Sa voix est posée et contraste avec mes craintes. Je m'agite sur ma chaise et joue nerveusement avec les ficelles de mon sweat. Et puis c'est quoi cette idée de m'inscrire sur la liste !

-Bien sûr, il nous faut seulement son nom et prénom, et sa carte d'identité pour la première fois qu'il viendra.

-Je pense pas que vous en ayez besoin, c'est Juliette, et j'aimerais, enfin si tu veux bien Ju', l'inscrire en tant que conjoint de parent numéro un.

Je bloque sur son sourire, il me rassure et m'assure une nouvelle fois qu'elle est prête à avancer avec moi. C'est Monsieur Vouli, le directeur, qui lui répond :

-S'il n'y a plus de case libre dans les personnes à contacter, on peut en ajouter une, la place conjoint est vraiment réservée pour votre futur compagnon.

Je me retiens difficilement de lâcher un rire nerveux, comment il a pu ne pas comprendre ? Les propos de Christelle n'ont pas été explicites, mais quand même, vu le regard de Caroline qui passe de l'une à l'autre, elle a très bien compris, elle. Légèrement déstabilisée, ma jolie brune refait face au directeur :

-C'est pour ça qu'on voulait vous voir. Juliette et moi on, enfin...

Regroupant enfin tout mon courage, je l'aide.

-On est ensemble.

-Oh, vous voulez dire, oui, d'accord.

C'est bien la première fois que je le vois perdre ses mots.

-Les enfants vont être au courant dans la semaine, alors il se peut qu'ils en parlent. C'est pour ça qu'on a voulu vous tenir informés.

-Vous avez bien fait, et vous pouvez compter sur nous, on veillera à ce que tout se passe bien dans l'établissement. Par contre, pour ce qui est du reste, on ne peut pas empêcher les gens de parler, et dans un petit village comme le nôtre, les nouvelles vont vite.

-Oui, on sait, et je vous jure que quoi qu'il arrive, ça ne changera pas ma façon de travailler ici. Je sais faire la part des choses.

-Je n'en doute pas une seconde, Juliette, et je ne veux personne d'autre que toi dans ma classe. Mais il va falloir que Timaé le comprenne aussi. Ici, il ne pourra pas se comporter avec toi comme à l'extérieur, ce sera à toi de le repousser et de le reprendre s'il franchit la limite.

-Vous allez devoir être irréprochable, poursuit le directeur. Même si nous sommes avec vous, vos faits et gestes vont être scrutés par les autres enfants et les parents, et ils n'hésiteront pas à vous reprocher le moindre détail.

Ils sont bien gentils, mais ils commencent à me mettre la pression. Être irréprochable... Évidemment que je gronderais Timaé s'il fait une bêtise, il n'aura pas de passe droit, mais ce sera bien plus difficile de refuser s'il réclame un peu trop d'attention.

-Je comprends, nous lui expliquerons tout ça, évidemment.

Christelle a l'air bien plus assurée que moi. En même temps, c'est plus facile pour elle : une fois qu'elle les a déposés à l'école le matin, elle n'a plus à faire attention à ses gestes ou ses paroles.

-Bien, je vous ferai passer la fiche à compléter dans le cahier de liaison de Timaé.

-Merci, je vous la ramènerai au plus vite.