Chapitre 36

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À ma plus grande surprise, la matinée passe plutôt rapidement. Les yeux me piquent après mon repas rapidement avalé à midi, et rassurée d'avoir passé plusieurs nuits sans cauchemar, je laisse la fatigue m'emporter. Dans le confort du canapé familial, je sombre peu à peu, loin d'être dérangée par le soleil brillant à travers les fenêtres.

J'ai pourtant sous-estimé la magie des bras de Christelle. Là, seule sur le canapé, je me réveille en nage, tremblante, l'esprit encore envahi des images qui mon assaillie.

Le souffle court, le regard perdu dans le vide, je ressens encore sa main froide dans la mienne, ses yeux vitreux, et la raideur de ses membres, après avoir veillé son corps des heures entières. Le même cauchemars, encore et toujours, inlassablement, chaque nuit.

Mais pourtant, cette fois ce n'est pas le corps sans vie de mon frère qui déclenche ma crise d'angoisse. Non, c'est bel et bien les paroles de ma mère que j'entends dans mon dos.

« Tu as tué ton frère, tout est de ta faute. J'espère que tu souffriras, autant qu'il a souffert d'avoir une sœur comme toi. Ingrate, stupide, médiocre, pitoyable. Tu es la honte de la famille. Tu aurais dû mourir à sa place ! »

Tournant encore en boucle dans ma tête, je suffoque, malgré mes exercices de respiration habituels. Prenant appui sur les coussins du canapé, je me relève avec difficulté, utilisant ensuite les pans de murs pour me soutenir. Avec lenteur j'arrive à me traîner jusqu'à la terrasse.

Une fois dehors, l'air frais me fait du bien. Concentrant mon attention sur un point au loin, vidant ma tête de toute pensée, j'arrive petit à petit à retrouver mon calme. Pour un jour où je devais me reposer, c'est mal parti ! Heureusement que Christelle n'était pas là, je l'aurais inquiétée pour rien.

Je m'occupe comme je peux en attendant seize heures, l'heure pour allé chercher les enfants. Mon sac à dos sur les épaules, je renferme la porte derrière moi. J'ai une petite idée derrière la tête pour ce soir, et pour ça, j'ai besoin de leur aide à tous les trois.

J'arrive devant la maternelle avec un peu d'avance, le portail est encore fermé. Ça me fait bizarre d'être là : en temps normal, je suis de l'autre côté, appelant les enfants pour qu'ils rejoignent leurs parents. Et aujourd'hui, c'est moi qui attends patiemment que cette grille s'ouvre et que le petit Timaé sorte enfin.

-Hey ! Me salue une voix dernière moi.

-Salut Judie !

Je me retourne et lui fais la bise, sa joie de vivre toujours autant communicative me fait sourire.

-Qu'est-ce que tu fais là ? T'es pas censée être en arrêt ? Reprend-elle en s'appuyant contre le mur dans notre dos.

-Si si, je le suis, je viens juste chercher Tim, ça lui faisait plaisir.

-Il t'a demandé' et t'as pas pu lui dire non ? Comprend-elle facilement.

-Exactement ! C'est difficile de lui refuser quelque chose, surtout quand il fait ce truc, là, avec ses petits yeux.

-Je vois très bien de quoi tu parles, quand Charlie l'utilise sur moi, il me faut toute la force du monde pour lui dire non, rit-elle.

-Ah ben, d'ailleurs, regarde.

Caroline vient d'ouvrir le portail, et Charlie court vers sa maman, son cartable sur le dos, les bras grands ouverts.

-Coucou ma chérie, ça va ? La journée s'est bien passée ? S'inquiète la maman en réceptionnant sa fille dans ses bras.

-Oui ! J'ai tombé du vélo pendant la récréation, mais maîtresse a mis un pansement, regarde.

Avec l'agilité, elle envoie sa jambe en l'air, alors que Judie la tient toujours dans ses bras.

Juste une étincelleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant