L'invention

Chapitre 42

L'opération était une réussite. Trois jours après être rentré chez lui, Tom se sentait dans les mêmes dispositions qu'avant son attaque, cela ne signifiait pas qu'il était extatique, mais il avait cessé d'être ce spectre étranger au monde, nourri à l'angoisse et pétrifié par l'action. À nouveau, les épreuves n'étaient plus que des épreuves et non des naufrages. Le mal psychique est un mal physique, la gorge sèche, les migraines, le souffle court, le cœur qui s'emballe, les maux de ventre, les jambes cotonneuses, autant de symptômes qui précipitent la chute. Mais à l'inverse, qui se sent bien dans son corps, se sent bien dans sa tête, aussi Tom décida de se concentrer sur la nourriture, le sport et le sommeil, et bientôt la joie trouva à nouveau sa voie, elle s'infiltra dans son âme, irrigua ses veines, et à travers elle c'est la vie elle-même qui se réincarna en Tom.

Un soir, alors qu'il se tenait dans son salon, son regard se posa sur la boîte des Biscuits Legrand. Il la saisit et la fit tourner entre ses mains, il repensa à ce que Charles Legrand lui avait dévoilé sur ses origines, il repensa à son père qui maltraitait sa mère, sa mère morte en couche, il repensa à tous les laissés pour compte, les veufs, les orphelins, ceux qui sont malades, ceux qui sont seuls, ceux qui sont humiliés, il repensa à toutes les variétés de souffrances qui habitaient le monde, et une vague d'émotion monta de son ventre jusqu'à sa gorge, il se rappela l'expérience qu'il avait vécue lors de son attaque, ce voyage à l'intérieur de son esprit, de son histoire, de ses émotions, et il se rappela la promesse qu'il s'était alors faite, celle de consacrer le reste de sa vie à aider l'humanité. Tom prit son manteau, sortit de chez lui et courut jusqu'à chez Jean.

— Je suis venu m'excuser, dit Tom en entrant chez son ami.

— C'est bon... ne t'en fais pas, j'ai compris ce que tu essayais de me dire... répondit Jean.

— Non. J'avais tort. J'ai choisi de faire tout ce que j'ai fait. Tu ne m'as jamais posé un flingue sur la tempe pour m'obliger à caresser ces rêves de gloire. Tout ce que j'ai entrepris, je l'ai voulu, c'étaient des choix, personne ne m'y a obligé. Je suis responsable de mes actes. C'était stupide de ma part de te faire tous ces reproches. Je m'en suis pris à toi parce que j'allais mal, j'étais perdu, je ne maîtrisais plus mes émotions, j'avais besoin de trouver un coupable, besoin d'expulser ma peur, besoin de faire mal à quelqu'un peut-être. Mais tu es l'une des meilleures choses qui me soient arrivées. Tu es bourré de défauts, mais j'en ai au moins autant que toi, tu as toujours été là pour moi, et puis tu es vif, intelligent, sensible, tu es tout ce qu'un homme peut attendre de son meilleur ami.

— Merde alors, où est-ce que j'ai caché les alliances ?

— Je suis sérieux Jean, c'est important que tu entendes ce que je te dis-là.

— Merci. Ça me fait super plaisir. J'ai vachement flippé l'autre jour.

— Et je suis aussi venu pour te dire que je vais faire un truc un peu fou et que je ne suis pas sûr d'y arriver ni d'en revenir vivant. Je ne dis pas ça pour te faire peur, mais simplement pour te tenir au courant. Je ne te demande pas de m'en empêcher, je veux simplement que tu saches.

Difficile de le suivre en ce moment, pensa Jean. Après tout ce que Tom lui avait reproché, Jean avait passé ses jours et ses nuits à essayer de démêler ce qui était vrai de ce qui n'était que l'expression de sa colère. Jean ne savait pas quoi en penser, mais son amour-propre était tellement bas, et sa confiance en Tom tellement haute, qu'il en avait conclu qu'il devait bien être responsable des tourments de son ami. Mais ce que venait de dire Tom offrait de nouvelles perspectives. Il a raison, pensa Jean, nous sommes tous les deux aussi tarés, et nous sommes tous responsables de nos actes.

Jean insista pour que Tom lui révèle cette chose folle qu'il comptait faire et dont il n'était pas certain de revenir vivant. Tom refusa de lui dire, Jean se montra persuasif, puis Tom finit par lui parler du mail de Bernard Allié, de la mission qu'il lui avait confiée, des dangers de BeCalm et du module dans la Park Industry Tower qui permettrait de faire cesser tout cela. Jean lui proposa de l'aider, Tom le prévint des menaces sérieuses qui existaient, s'ils se faisaient prendre Christian Park n'hésiterait pas à les tuer, mais Jean voulait participer à cette mission. Aussi, passèrent-ils la nuit à échafauder un nouveau plan pour s'introduire dans la salle des serveurs.

On est presque à la fin de cette histoire, n'hésitez pas à récompenser son auteur, en lâchant une rafale de likes ;-)