Six semaines avant la sortie de BeCalm, la publicité s'intensifia encore. À moins d'être un ermite n'ayant accès ni à la télévision, ni aux journaux, ni à la radio, ni à Internet, il était impossible de ne pas être au courant de la commercialisation de ce casque anti-dépression. Au bureau, au café, dans les vestiaires, on ne parlait plus que de cela. Dans un pays où chaque heure une personne mettait fin à ses jours et où les dépenses en anxiolytique ne cessaient de grimper, ce gadget suscitait beaucoup d'espoir. Son prix, minime, équivalait à une soirée en couple au restaurant ; son efficacité, indubitable, était avérée par les journaux de tout bord ; les précommandes, phénoménales, annonçaient un phénomène de société. Dans le cadre de sa promotion, Christian Park fut invité au journal du soir.
— Comment vous sentez-vous à l'approche de la sortie de votre nouveau produit ? demanda le présentateur TV.
— Je me sens bien, répondit Christian.
— Pas trop nerveux ?
— Non. J'utilise mon casque pour lutter contre cela.
— Ha ! ha ! Rappelez-nous encore une fois comment fonctionne BeCalm.
— Le système est extrêmement simple. La souffrance psychique est due à un signal électrique émis par notre cerveau, c'est ce signal qui est responsable de nos bouffées d'angoisses, des sueurs froides, de l'accélération de notre rythme cardiaque, etc. BeCalm envoie simplement une fréquence dans notre cerveau capable de neutraliser ce signal électrique. Et voilà le tour est joué.
— Dis comme cela, ça a l'air très simple.
— Mais ça l'est.
— Je vous pose la question que tout le monde se pose... Est-ce que BeCalm peut avoir des effets secondaires ? Est-ce qu'en neutralisant cette zone de notre cerveau nous risquerions par exemple de ne plus ressentir la joie ou l'excitation par exemple ?
— Absolument pas. Le degré de précision de notre casque est parfait. On ne touche que la zone du cerveau responsable de la dépression. D'ailleurs si vous doutez de son efficacité, lisez les critiques faites par les journalistes de tous bords qui l'ont essayé, aucun d'eux n'a relevé le moindre inconfort, le moindre malaise, ni le moindre bémol.
— Et que répondez-vous à ceux qui ont peur que vous jouiez avec leur cerveau ?
— Je suis médecin. Je suis neurologue. Je suis philanthrope. Mon seul souhait est de soulager le monde de ses souffrances, pas de jouer avec leur cerveau.
Trente ans auparavant, Christian Park était encore interne en médecine et s'occupait d'un patient qui souffrait de graves troubles psychiques. Le jeune Park lui prescrivait des médicaments, mais aucun d'eux ne parvenaient à le soulager, consultation après consultation le malade revenait toujours plus maigre, toujours plus seul, toujours plus désespéré. Impuissant face à son mal-être, Christian Park avait demandé de l'aide à son supérieur qui lui avait répondu qu'on ne pouvait pas aider tout le monde, certaines personnes étaient perdues, il existait des cas désespérés. Le jeune Park refusait d'entendre cela et se promit de lui prouver le contraire, il devait bien exister un traitement ou une thérapie capable d'améliorer l'état de son patient. Il chercha nuit et jour pendant des semaines, sans le moindre résultat, et un jour le téléphone sonna et on lui apprit que son patient avait été retrouvé pendu chez lui. Christian Park comprit que la médecine ne lui suffirait plus, il devait trouver un moyen plus efficace d'aider les gens.
Le grand jour arriva. BeCalm sortit un mercredi, disponible partout, sur Internet, dans les magasins d'électronique, les pharmacies et les grandes surfaces, le triomphe annoncé eut lieu et dépassa toutes les espérances, si bien que cinq jours après sa sortie c'était déjà la rupture de stock. Face à cette demande exceptionnelle, Park Industry accéléra sa production et promit de réapprovisionner l'ensemble du pays en moins d'une semaine. Dans la rue, certaines personnes s'affichaient avec leur casque sur la tête, tandis que d'autres, plus pudiques, essayaient de le cacher sous un bonnet, un voile ou un chapeau. D'après ces premiers clients, BeCalm répondait à toutes ses promesses, cela permettait de mieux dormir, d'être plus en forme, de travailler plus efficacement, d'être plus créatif et d'améliorer ces relations sociales. La révolution était en marche.
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L'invention
Misteri / ThrillerTom Epstein est journaliste. Un jour son patron l'envoie réaliser une interview du milliardaire Christian Park. Ce dernier lui fait essayer sa nouvelle invention révolutionnaire : un casque censé lutter contre la dépression. Mais à partir de là les...