Chapitre 8 : Liwia

371 21 0
                                    

Je regarde mon réveil. Il va sonner dans trente-huit minutes. Nous sommes vendredi, je vais donc au club ce matin. Je souris et me lève. Si je suis qualifiée pour faire partie de l'élite au moins je n'irai plus du tout au lycée, et j'ai horreur de cet endroit. Tous ces abrutis pensent que les gymnastes sont des sortes de singes affolés et pas des athlètes de haut niveau. Pour encourager d'autres abrutis qui courent derrière un ballon là, il y a du monde. Mais pour encourager des sportifs, qui travaillent leurs corps chaque jour pour atteindre l'excellence évidemment personne ne vient au rendez-vous ! Je secoue la tête et me lève. Je m'avance vers mon calendrier et je raye la date d'aujourd'hui. Je passe mon doigt sur les jours à venir et m'arrête sur le lundi de la semaine prochaine où j'ai écrit en rouge en gros "qualification élite". C'est dans seulement deux jours maintenant. Je ne crois pas être prête. Je pousse un long soupir. J'enlève le tee-shirt qui me sert de pyjama et j'enfile une brassière. Je choisis un justaucorps au hasard. Lorsque j'ai fini de l'enfiler je tourne la tête puis vois à travers la fenêtre, dans la maison d'à côté une jeune fille brune qui me regarde. Je lève un sourcil. Les nouveaux voisins sont arrivés hier soir dans la nuit, mais pourquoi me regarde-t-elle ? Et surtout depuis quand ?! L'idée qu'elle ait pu me voir avec la poitrine nue me traverse l'esprit... Je rougis puis remarque qu'elle continue tranquillement son chemin, elle a dû s'arrêter seulement pour voir qui j'étais et repartir. Elle ne devait pas être là depuis très longtemps. Je soupire encore une fois, soulagée. On dirait qu'elle a presque mon âge, à l'avenir il faudra que je pense à tirer mes rideaux, j'étais tellement habituée à ce que la maison d'à côté soit vide que je ne le faisais plus.

Je passe dans ma salle de bain où je me débarbouille, me coiffe et me maquille un peu. Pour la coiffure j'opte pour une tresse et pour le maquillage, un peu de mascara et un très léger trait d'eye-liner. Lorsque je sors de la pièce je regarde subtilement par la fenêtre d'en face : personne. Je suis vraiment parano, qu'est-ce que j'imagine ? Que la fille d'à côté m'observe ? C'est absurde ! J'attrape un sac de sport dans mon armoire blanche et je fourre des maniques et une bouteille d'eau à l'intérieur. Au passage j'enfile un short noir.

Je descends dans la cuisine pour prendre mon petit-déjeuner et remarque que ma mère prépare un gâteau. Interloquée, je lui demande :

- Il est pour moi le gâteau ?

- Non chéri, c'est pour les nouveaux voisins ! Répond ma mère avec enthousiasme. Tu sais bien qu'il ne te faut pas trop de sucre !

Evidemment, toujours plus préoccupée par ce que peuvent manger les autres que par moi... Je ne relève pas, j'ai appris à oublier qu'elle m'aime plus pour ce que lui rapporte mon sport que parce que je suis moi, sa fille. Je prends un verre de jus d'orange et une ou deux biscottes grillées que je tartine avec une fine couche de chocolat. Puis avant que ma mère aborde un autre sujet du style "tu sais que le magasin de bricolage va fermer ?" je sors et me glisse dans la voiture. Je crois que je préfère sa compagnie à celle de ma mère qui discute toujours de sujets que j'appelle des sujets de "décoration". Ses discussions prennent de la place mais ne servent à rien, elles sont juste là pour faire beau, pour faire croire qu'elle aime parler avec sa fille. Ce qui évidemment est faux. Je soupire encore une fois. Je crois que je passe mon temps à soupirer. Soupirer c'est vraiment quelque chose de génial, enfin pour moi. Je prends tous les mauvais sentiments et les expire en un souffle. Je ferme les yeux un instant. J'espère que je vais être qualifiée, instinctivement je croise les doigts. Tout ce stress n'est pas bon mais j'espère que ça me poussera à me dépasser.

Ma mère arrive quelques minutes plus tard, avec Ricky qui tente de marcher en tenant sa main. Elle l'installe dans le siège auto et prend place au volant. Elle tourne la clé dans la serrure, puis le moteur démarre. Elle recule dans l'allée et s'engage sur la route en se dirigeant vers le club. Comme à mon habitude, j'appuie mon coude sur la portière et ma tête dans ma main. Cependant un détail attire mon attention. Dans le rétroviseur, je vois une voiture rouge qui roule derrière nous, j'ai l'impression que je l'ai déjà vue. Je choisis d'ignorer ma propre remarque et de fermer les yeux pour visualiser ma routine.

Lorsque nous arrivons au club de gymnastique, je descends de la voiture pour rejoindre l'entrée mais je remarque que la voiture rouge qui nous suivait tout à l'heure est toujours là. Une jeune fille brune en descend. Il me faut quelques secondes pour comprendre que c'est ma voisine ! Qu'est-ce qu'elle vient faire dans un club pour gymnaste ? Une seconde... Se pourrait-il que... Je la dévisage et m'aperçois qu'elle porte aussi un justaucorps. Je crois bien que cette nouvelle fille est aussi une gymnaste, je reste plantée sur place en la regardant, bouche bée. 

Lunatic MomentOù les histoires vivent. Découvrez maintenant