Liwia discute avec Addison. Elle ne m'a rien fait pourtant c'est fou ce que je peux la détester à cet instant précis. Liwia paraît si heureuse, elle rit, et rit et rit encore. C'est avec moi qu'elle devrait rire pas avec Addison putain. Je m'emballe peut-être pour un rien, mais juste le fait de penser qu'Addison va partager le lit de Liwia et j'ai déjà la nausée. Au fond je sais bien que j'ai tord de réagir comme ça. Addison est une amie blabla. Moi je débarque ici alors qu'Addison est là depuis bien plus longtemps, je sais, je sais. Mais quand je l'ai vu tenir la main de Liwia en sortant des vestiaires c'était plus fort que moi. Je regarde le paysage et je sens le regard de Liwia sur moi. Je sais qu'elle cherche mes yeux, parce que moi aussi j'ai envie de les plonger dans les siens mais je ne céderais pas, elle n'a qu'à fondre son regard dans celui d'Addison puisqu'elle est si amusante et tout ça. Je me surprend à penser toutes ces choses sans raison. Je ne sais même pas pourquoi je suis tellement en colère, après tout, Liwia et moi on est même pas ensemble et je ne l'aime pas. Enfin pas trop. Peut-être un peu. Ou peut-être même beaucoup. Je commence à avoir la migraine. Je suis énervée, je n'en comprends pas la raison et ça m'énerve encore plus. Nous arrivons chez nous. Suzanne se gare dans l'allée et j'ouvre la portière puis je saute dehors. Je la remercie vivement et je rentre chez moi, non sans croiser le petit regard triste et innocent de Liwia au passage qui me fend le cœur.
Je marche vers ma maison en traînant des pieds et je claque la porte de l'entrée lorsque je rentre. Ma mère passe la tête par la porte de la cuisine et me lance un sourire compatissant.
- Oh non.. Tu as eu de si mauvaises notes que ça ? Je suis désolée ma Lucy. Elle me prend dans ses bras. Ce n'était peut-être simplement pas le bon jour.
Je me dégage gentillement de ses bras puis je lève un sourcil et j'éclate de rire. Ma mère est dans l'incompréhension total lorsque j'éteins ses craintes :
- J'ai fini deuxième dans le classement général du saut avec 9 points 680 et première à la poutre avec 9 points 890.
Ma mère écarquille ses grands yeux verts et sautille sur place. Elle me fait une tape dans la main et exécute une danse de la victoire assez pittoresque mais je m'en fou royalement, j'ai le droit d'être heureuse moi aussi, alors je la rejoins dans sa danse ridicule et je pars en fou rire. Ma mère est à bout de souffle et je remarque qu'elle a de la farine plein les mains. Je regarde ses mains puis je l'interroge du regard, elle lève les bras au ciel faignant d'être innocente puis se défend :
- Il est possible, qu'éventuellement j'ai pu faire un gâteau pour fêter ta victoire... Elle lève les yeux au ciel et sifflote faisant comme si elle n'avait rien fait. Je la reprend dans mes bras.
- Je t'aime Maman. Je me blottis contre son épaule et même si je ne vois pas son visage je sais qu'elle sourit. Elle murmure :
- Moi aussi mon cœur, moi aussi. Je suis tellement heureuse et fière de toi si tu savais mon ange. Comme si cela lui demandait un effort surhumain de rester sérieuse cinq minutes elle se dégage de mon câlin et fait un geste théâtral en prenant une grosse voix :
- Le gâteau de notre championne est servie dans la cuisine !
Je souris et la suis en dansant. Elle me sert une part de gâteau et je recommence à penser que Liwia fait probablement la fête avec Addison. Ma mâchoire se serre immédiatement. Est-ce que elle pense à moi ? Sûrement pas... La voix de mère interromps mes pensées :
- Qu'est ce qui te tourmente assez pour que tu rentres en claquant la porte après un aussi grande victoire et que tu n'engloutisses pas ton assiette en deux secondes et demi ?
Ma mère lit dans mes pensées comme si elles étaient écrites en gros en lettre capital sur mon front. Je commence alors mon récit en lui racontant que j'ai vraiment craquée pour cette fille, la voisine. Je lui raconte la première fois que je l'ai vu, que lorsque je pose mon regard sur elle je n'arrive plus à bouger, qu'on s'est embrassée plusieurs fois déjà, qu'il y a quelque chose de spécial entre nous. Je lui raconte qu'avec elle, les souvenirs sont revenues. Mais que la douleur s'efface lorsque je suis à ses cotés. Je lui raconte aussi le soir où nous nous sommes endormies toutes les deux l'unes faces à l'autre au travers de nos fenêtres et comment après m'être réveillée complètement paniquée dans les minutes qui suivaient un de mes cauchemars j'avais trouvé du réconfort dans sa façon si adorable de sourire en dormant. Comment aujourd'hui j'avais été tellement jalouse de la voir parler avec une autre fille alors que je sais très bien qu'Addison est une de ses amies d'enfance et qu'elle est très gentille. Je lui fais part du fait que j'ai peur parce que je m'étais promis de ne plus aimer personne, de ne plus m'attacher à personne. Plus personne après Mina. A la fin de mon monologue une larme coule lentement sur la joue de ma mère. Cette larme contient d'affreux souvenir tout comme les miens. Puis elle reste silencieuse un moment avant de répondre en me prenant les mains :
- Mais c'est merveilleux mon ange... Je sais tout ce que tu as traversé. Je sais que tu t'es interdit d'aimer par peur de souffrir. Mais c'est tellement triste. A ton âge, on ne devrait pas avoir connu de telles horreurs. (Elle marque une pause) A ton âge on devrait pouvoir connaître l'amour au sens simple. Je suis tellement désolée de ce qu'il s'est passé avec Mina. (Elle déglutis) Mais tu recommence à aimer malgré tout. Et c'est beau. Très beau. Il n'y a rien de plus beau que d'entendre ça pour moi. Et tout ça est normal. Tu es censée aimer, et être jalouse s'il le faut. Ce que tu as vécu avec Mina ne doit pas détruire à tout jamais cette chose normal que tu dois éprouver : aimer. Si cette fille te fait tellement d'effet c'est qu'elle te fait du bien, et parfois il faut apprendre à aimer ce qui nous fait du bien.
- Mina me faisait du bien... Je fond en larmes et ma maman me prend dans ses bras chaleureux. Puis elle ajoute, toujours aussi efficace pour me consoler :
- Mina a été et sera toujours ton premier amour. Tu ne cessera jamais de l'aimer, mais cela ne veut pas dire que tu dois t'interdire d'aimer d'autres personnes. Pendant ses deux ans tu t'es tellement renfermée et dès que nous sommes arrivés ici, ouverte tout d'un coup et je crois que cette fille y est pour quelque chose. (Elle prend ma tête entre ses mains si douces) Pour cette fille, et bien tu pourrais peut-être essayer quelque chose avec elle, promets-moi de ne jamais laisser ce qu'il s'est passé détruire l'amour que tu as à donner.
J'acquiesce lentement. "Ce qu'il s'est passé"... Ce jour qui hante ma vie. Ce jour où, en quelques minutes mon cœur a fondu en cendre à tout jamais, où il a volé en éclat. Ce jour où tout a été détruit. Ce jour où la douleur était tellement suffocante que j'étouffais avec et que je priais pour qu'on me tue, seulement pour ne plus ressentir la puissance écrasante de la réalité qui, sous mes yeux se rejouait encore et encore. MON supplice. Les cauchemars sont la prison dans laquelle ce jour m'a enfermée. Je ne pouvais parler. J'étais muré dans le silence profond qu'avait créé l'absence de sa voix que plus jamais je n'entendrais. Je ne voulais pas vivre dans un monde où l'image de son visage et où la sensation de ses lèvres n'existaient plus. Je ne pouvais pas vivre. Je me noyais. L'océan qu'avait créé mes larmes me tuait lentement et dans ma longue agonie, je la revoyait encore et encore s'écraser sur le sol dans un bruit sourd et je revivais ce jour éternellement. Ce jour où j'ai su dès que le bruit sourd a martelé le sol où se trouvait son corps sans vie que plus jamais je ne reverrais son sourire et que moi aussi, j'étais morte.
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Lunatic Moment
RomanceLiwia Miller est une gymnaste de haut niveau, elle s'apprête à entrer dans l'équipe nationale Américaine quand un événement qui va bouleverser sa vie se produit. Une jeune fille brune du nom de Lucy Manchester arrive dans son club. D'abord rivales...