Chapitre 50 : Lucy

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C'est comme une vague. Une vague immense qui traverse mon corps. C'est même un torrent, un déferlement puissant  qui m'emporte, qui me soulève. Comme si je n'étais plus animée que par cette attrait indescriptible, ardent, brûlant, transcendant. Un fluide attirant, la convoitise de son corps, le désir charnel. Sur son visage je lis sa concupiscence, dans ses yeux je vois comme un feu qui brûle finissant par consumer les miens. Je balade mes mains sur ses jambes, nos lèvres se heurt, comme la houle sur les falaises, comme les vagues qui claquent sur la coque des bateaux. De ses doigts elle dessine des cercles sur mon ventre, qui descendent, qui descendent.  

Moi je n'ai pas peur d'aller plus loin,  mais Liwia, qui n'a même pas encore fait son coming-out. Elle ne pourra plus revenir en arrière et j'ai soudain peur qu'elle le regrette. Elle est prise par cette frénésie du désir et peut-être qu'elle ne le veut pas vraiment. Peut-être seulement qu'elle cherche à se prouver quelque chose à elle-même. Si elle venait à le regretter je ne me le pardonnerai jamais. Malgré l'envie incroyablement puissante et irrévocable qui m'anime, je ralentis lentement les mouvements de nos corps, jusqu'à revenir à de simples baisers. Liwia détache ses lèvres des miennes et me regarde, dubitative arquant un sourcil. 

- Pourquoi tu t'es arrêtée ? Tu n'en avais pas envie ? 

Sa voix est douce, fragile, comme si quelque chose en elle venait de se briser.

- Si, beaucoup. Mais j'avais peur que toi pas assez.

Elle fronce le nez et lâche ma main. À présent, elle prend un ton agressif : 

- Qu'est ce que tu veux dire ? Que je ne suis pas prête et toi si ?

Les ennuies commencent, je sens déjà que je vais avoir du mal à me sortir de cette situation. 

- Non je n'ai pas dit ça, je voudrais pas que tu le regrettes c'est tout. 

Je guette et tente de capter les moindres des expressions de son visage afin de savoir si j'ai un peu fait pencher la balance en ma faveur. Mais son habituel et bien qu'adorable froncement de sourcil m'annonce que la partie est très loin d'être gagnée. 

- Je déteste cette manière que tu as de te placer comme si tu savais plus de choses que moi en la matière, je ne suis peut-être pas sortie avec d'autres filles avant mais j'ai déjà eu un copain et je ne pense pas être totalement idiote. C'est dingue, tu penses carrément mieux savoir ce que je ressens que moi. 

Ok, j'aurais jamais dû dire ça. J'me suis vraiment mis dans la merde. Comment je vais rattraper ça moi maintenant ? 

- C'est pas ce que je voulais dire, je voulais simplement éviter que tu commettes quelque chose que tu aurais pu regretter. Je suis désolée, excuse moi. 

Je tente de reprendre sa main mais elle me fait clairement comprendre que c'est mort pour ce soir. D'ailleurs ce geste ne fait qu'aggraver mon cas. 

- Si on va dans ton sens peut-être que je pourrais carrément regretter de sortir avec toi, ou même de t'embrasser. Ton raisonnement est stupide. 

Je voulais juste la protéger, pas ranimer sa colère. Putain. Qu'est-ce que je peux être bête ! 

Elle continue :

- C'est la deuxième fois que tu prends une décision à ma place. Je ne laisserais pas passer une troisième. 

Elle se retourne, ramène ses cheveux sur ses épaules et éteins la lumière. Et moi je suis comme une conne, seule dans ma partie du lit alors qu'il y a à peine deux petites minutes j'étais prête à connaître une nouvelle phase de rapprochement avec elle. Le silence emplit la pièce. 

Liwia sait très bien utiliser les mots qui font mal, me rappeler l'épisode avec sa mère lorsque j'ai failli lui annoncer qu'on était ensemble était habile et je dois avouer que ça a réussi à me blesser. Heureusement pour moi sa mère est tellement imbue d'elle-même qu'elle n'a pas cru un traître mot de ce que je lui avais annoncé ce jour là. 

Cette fille me rend folle. Elle est là juste à côté je peux presque sentir sa chaleur mais si je la touche elle va se transformer en tempête, voir en ouragan de colère et je risque d'y perdre la vie, surtout en ce moment. Bref, ça n'arrangera rien mais elle a beau n'être qu'à quelques centimètres de moi elle me manque affreusement. 

Les minutes passent, lentes, je n'arrive pas à dormir. Demain il faudra retourner au club pour les entraînements, j'espère qu'elle m'aura pardonner d'ici là. Je la regarde, elle, ses yeux clos, sa poitrine qui monte et descend lentement. Elle s'est endormie il y a 30 minutes je dirais. Je déteste quand elle s'endort en colère comme ça. Elle ferme ses petits poings, pleine de rage. Lorsqu'elle tombe enfin dans le sommeil, son visage se décontracte. Elle est comme la huitième merveille du monde, son visage entier est organisé d'une manière si pure, si tendre, si belle. Je ne pourrais plus imaginer le monde sans elle, elle est comme une drogue, amer, douce complexe. Je voudrais seulement pouvoir apaiser un peu sa haine du monde. Quel ironie, et dire qu'il y a à peine un mois j'étais comme ça. Je n'ai pas un effet bénéfique sur elle. Je me mets soudain à culpabiliser. D'être entrée dans sa vie, d'avoir tout chamboulé, de n'être qu'un élément perturbateur. Pourtant vivre sans elle serait comme m'arracher le cœur, et je pense l'avoir une fois déjà subit.

Elle tangue tendrement dans mon esprit, suspendu comme par un fil lumineux. 

Je ferme les yeux essayant de me remémorer les détails de son visage pour m'endormir mais je n'y parviens pas, pas sans son contact. Puis, comme si elle m'avait entendu, elle roule sur le côté pose sa tête sur mon épaule et son bras sur ma hanche. Je souris bêtement et caresse ses cheveux. Je chuchote doucement :

- Je suis tellement désolée d'être moi.



Lunatic MomentOù les histoires vivent. Découvrez maintenant