La porte est là. Moi aussi d’ailleurs. Je voudrais devenir fou plutôt que d’être là. Je suis fou en fait. Fou d’être là. Il n’y a aucune raison pour qu’il m’aime encore. Pour qu’il pense encore à moi. Pour que je sois encore quelque part dans son cœur. Je suis un putain d’égoïste. Alors je m’en vais.
Je tourne le dos. Mais la porte s’ouvre. Je n’ai pas le temps de descendre la première marche que sa voix vient se perdre au fond de mes oreilles. La même voix qu’avant. Cette même voix fluette, légère, presque aigue. Elle n’a exprimé qu’un mot. Toi. Oui, moi. Moi qui fuis. Une deuxième fois.
Mon corps ne semble plus répondre à mon cœur et se retourne vers lui. Il n’a pas changé en quatre ans. Il a juste quelques mèches de cheveux de plus. Et j’aime ça. Il est beau. Il est terriblement beau. Je sens mes yeux se remplir de larmes, mais je leur interdis de laisser écouler toute cette eau.
Je t'ai aimé. Je l’ai dit. Juste du bout des lèvres. Juste en chuchotant. Mais dans le silence qui s’était installé entre nous, même un sourd aurait pu l’entendre. Il a entendu. Son regard bleu se fonce. Je tends ma joue pour recevoir la gifle que je méritais quand je suis parti. Celle qu’il n’a jamais pu me donner.
Rien au monde ne pourrait exprimer ce que je ressens quand, au lieu de cela, ses lèvres viennent capturer les miennes. La chaleur qui s’empare de mon cou me brûle. Juste du bout des lèvres, je sens la douceur de cet homme qui m’a manqué. Que j’ai aimé. Moins d’une seconde. Nous sommes restés collés moins d’une seconde.
Jusqu’à ce qu’il revienne à la charge. Que ses lèvres entières prennent possession de ma bouche. Que je ne puisse plus respirer. Que l’attaque, que l’offensive de cet homme m’empêche ainsi de m’oxygéner. Je ne peux plus rien faire, si ce n’est soupirer d’aise. Soupirer par le nez, venant ajouter sur sa peau une chaleur dont elle n’avait guère besoin.
Mes mains encore gardées près du corps prennent enfin le chemin de ses cheveux. Les miens dégoulinent. Je suis en sueur, parce que la chaleur qu’il vient de me transmettre me brûle jusqu’au bout des ongles. Les siens sont doux, sont courts, sont terriblement attirants. Mes deux mains se croisent sur sa tête.
Et je ferme les yeux. Je n’arrive pas à croire ce qu’ils me montrent alors autant les clore. Je ne peux pas croire qu’il accepte. Qu’il m’accepte. Que cette bouche, que ce corps, que cet esprit soient encore ne serait-ce qu’un peu à moi. Pour moi. Comme il y a sept ans. Comme lors de notre premier baiser.
Il se laisse enfin respirer. Ses mains sont sur mes joues, mais ses pouces tendent vers ma gorge. Il aurait raison de vouloir m’étrangler. Ce serait un juste retour pour tout ce qu’il a subi. J’implorerais sa pitié pour qu’il me rejette. Pour qu'il cesse de me laisser une place auprès de lui. Elle n'est plus pour moi.
Il m’oblige à le regarder dans les yeux. Je n’ai pas d’autre choix. Et il a raison. Parce que je sais que nous avons changé. Je sais qu’il n’est plus le même. Que ce n’est plus la même raison d’être.
Après tout, ce n’est que notre dernier baiser.
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Les petites folies de Kerray (B&B)
RomanceComme promis, voici le recueil qui accueillera les différents OS que je serai amené à écrire de temps à autres, sur les personnages des précédentes histoires ou bien sur de nouveaux. Toute suggestion est la bienvenue !