Chapitre 6 - Le parfum

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Ragaillardie par Sandra, pénétrée d'un sentiment d'assurance inconnu que me confère cette jolie robe que je n'osais espérer si chaste, j'adresse mon sourire le plus joyeux à Mamina et aux filles, qui semblent soudain s'alléger d'un poids sinistre, à les voir se lever pour venir à ma rencontre, le visage enthousiaste.

— Que vous êtes belle, Mademoiselle !

Je souris à Gone tout en répondant à l'accolade de Mamina, qui me baise à nouveau le front — à croire que l'imminence de mon envol en tant que femme mariée et de notre séparation inévitable nous a rapprochées, et ça ne me déplaît pas.

— Cette robe est magnifique, Olympe ! me complimente-t-elle d'ailleurs en me tenant à bout de bras d'un air ému. Bravo, Sandra ! lance-t-elle aussi à ma bonne fée. Vous avez parfaitement choisi sa tenue !

— Merci, Madame, lui répond-elle doucement, rosissant et baissant la tête.

— Sandra m'emmène voir une coiffeuse et une maquilleuse, dis-je avant de suivre ma guide jusqu'à la prochaine étape de mes préparatifs.

— J'ai hâte de voir ce qu'on vous prépare, maintenant que nous savons le bon goût de ces dames ! s'exclame à son tour Meth.

— Oh ! fais-je soudain quand la pensée me traverse. Est-ce qu'elles peuvent m'accompagner ?

Je supplie Sandra du regard, et elle acquiesce.

— Bien sûr. Ce sera l'occasion de visiter les lieux.

Elle nous précède vers une porte de bois foncé agrémentée d'une plaque dorée où l'on peut lire : Salle des hautes vanités.

Que de mystères !

Si Berce et son air d'ogresse m'avaient refroidie, si notre guide plein de morgue à la voix nasillarde m'avait agacée, ces multiples pièces énigmatiques aux noms poétiques et nébuleux excitent de plus en plus ma curiosité !

Sandra aussi m'intrigue. Sa pudeur en public — ou bien sa timidité ? — sont pour moi les marques d'une personne sensible. Et il y a en elle une aura captivante qui n'est pas étrangère à sa séduction, mais il y a davantage. J'ai envie d'en découvrir plus. Et puis elle m'a alléchée avec ses demi-révélations sur son passé d'Appélée et sa relation avec ce mage, Panos.

Je suis bien décidée à creuser ça en trouvant un moment pour revenir discuter avec elle !

En attendant, nous pénétrons à sa suite dans une autre pièce ornée de miroirs et meublée de commodes où trônent des aiguières d'argent et de pierre. C'est donc ça, ces « hautes vanités » ? Les enjolivements de la coiffure ? Je pouffe devant cette trouvaille et cherche du regard cette Magda dont Sandra vient de me parler.

Un bruissement d'eau me fait tourner la tête vers un paravent que je n'avais pas d'abord remarqué. Large et haut, fait de panneaux de bois sculptés, il est mis en lumière par des touches de peinture vives et explose de couleurs joyeuses. C'est une allégorie d'un printemps foisonnant dont les fleurs bariolées lâchent dans le vent des pétales dansant. C'est très joli.

Une femme s'en détache, essuyant ses mains sur un torchon blanc qu'elle balance ensuite nonchalamment sur son épaule. La silhouette fine, le cheveu blanc en un chignon strict, Magda présente un visage buriné de vieille femme, mais ses prunelles étincellent.

Littéralement.

C'est-à-dire qu'une lumière flamboyante y scintille, surnaturelle, belle, fascinante, mais impressionnante.

À mes côtés, Gone a un hoquet de surprise, Mamina se crispe, et Meth se signe discrètement, promenant frénétiquement ses doigts croisés autour de son cœur et de son esprit afin d'appeler sur elle la protection magique de ses dieux.

La Montagne DécapitéeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant