Regards

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PDV Reagan

Je sens son regard sur moi et Lorenzo le sent aussi. J'ai eu le droit à une remarque, qui m'a fait rougir jusqu'à la racine de mes cheveux.

-Reagan, j'ai besoin de toi sur des écrits... et des prises de rendez vous... Mi dispiace d'interrompre ces échanges de regards intenses avec le Donjuan aux bouclettes sublimes...

Je l'ai suivie muette comme une carpe et cœur battant à rompre mes artères, tout en évitant soigneusement de recroiser le regard Timothée. Je me suis sentie honteuse d'avoir été prise en flagrant délit et je viens seulement d'être capable de regarder à nouveau Lorenzo comme si de rien était.

-Une prof de Columbia veut que je vienne présenter mes recherches dans un de ses cours. Je voudrais que tu vérifies mon emploi du temps et que tu trouve un horaire et un jour avec elle. Regarde aussi la traduction de la page 357 jusqu'à la 361 je crois qu'il y a des fautes de temps. Il faut que ce soit corrigé au plus vite d'accord? Tiens voilà le numéro de téléphone de Madame Spencer. Je voudrais aussi que tu appelles pour savoir quand est-ce que l'on pourra commencer à apporter mes affaires dans le nouveau bureau ... Je sais que tu vas être formidable! Je pars, les déménageurs viennent d'arriver dans mon nouvel appartement et personne n'est à la maison... je reviens dès que j'ai terminé!

Il reprend son souffle et part aussi vite. Je cligne des yeux, mon corps est immobile un bref instant après la déferlante de ce torrent d'informations. Mon cerveau tourne à toute vitesse et essaie d'enregistrer. Le rouage bloque. La porte claque et je ne retrouve dans un petit coin de mon bureau de fortune fait à l'aide d'une petite table en bois et d'une vielle chaise d'école. On est pas dans un musée pour rien. Le fait de rester seule ne m'a jamais dérangé mais, me retrouver avec ses sentiments dévorants, d'excitation et de nervosité me rendent bonne à rien. Ma concentration est minime et rester assise va me rendre chèvre. J'ai besoin de penser à autre chose qu'à cette bombe qui vient de faire exploser mes attentes d'une journée ordinaire. Jules me dirait de la jouer cool et c'est ce que vais faire mais...

Il faudrait que tu lui dise que tu rentreras plus tard ce soir... attend non ! Ou juste un message. Elle n'est même pas rentrée hier soir à la maison alors que tu l'attendais pour qu'elle te présente Simon... heureusement que Peter est venu t'aider à manger l'énorme pizza que tu avais commandé...

Depuis que ce week-end je n'ai eu qu'un message de la part de Jules pour me féliciter. Je ne sais même pas si elle est encore en vie mais elle est grande, et Peter a raison, je ne devrais pas être aussi irrité par son attitude.

J'arrête de penser à ça et me met au travail. J'ouvre mon ordinateur et affiche l'agenda de Lorenzo sur mon écran. Je prend le téléphone mon portable et compose le numéro de téléphone de la fameuse prof de Columbia.

-Bonjour Madame Spencer, je suis Reagan Serkind l'assistante de Monsieur Benedetti... je viens convenir avec vous d'un jour et d'un horaire pour...

-Bonjour ! Oui laissez moi un instant, je prend mon agenda. Je l'entend fouiller dans quelque chose.

-Oui? C'est bon... alors mon cours tombe un Mercredi en début d'après-midi...

Je bouge ma sourie et regarde ses disponibilités. Des tas de rendez-vous s'affichent en bleus, des conférences en rouges. Je regarde et cette femme est bien chanceuse, le mercredi dans deux semaines est libre. Ah non, il a réservé sa journée.

-Alors, le mercredi dans trois semaine ça vous va?  Le 13 novembre ? Je demande.

-Oui... 13h30 ça irait?

Je jette un rapide coup d'œil.

-Oui, d'accord je le note tout de suite. Je coince combiné sur mon épaule et tape sur le clavier. C'est fait !

-Super! Merci beaucoup! Passez une bonne journée au revoir.

Je me lance une nouvelle fois en appelant maintenant l'agence immobilière qui s'occupe du bureau. Mais pas de réponse. Je me plonge dans ma lecture avec un surligneur à la main Mes yeux suivent les lettres. Ma main traces des lignes roses, jaunes fluo. Avec le crayon de papier, je rectifie les erreurs de grammaire. Ma tête bourdonne à réciter les règles latines ainsi que certaines formules juridiques:

-Actio personalis moritur com persona
Dis-je tout fort. Non, cum persona.. avec un ou deux "n"? Un.

De la pointe de mon crayon de papier, j'écris avec minutie "une action liée à la personne meurt avec elle." Cette phrase me laisse perplexe. Je ne suis pas certaine d'avoir la même vision de l'action de l'homme et de sa prospérité dans le temps...
Mes yeux louchent et tressaillent. La fatigue me rend nerveuse. Je me transforme en Gremlin une foi que la nuit commence à tomber dans mon bureau et que seule la petite lumière de bureau me permet de discerner des ombres autour de moi. Je regarde par la fenêtre derrière moi. Lorenzo n'est pas revenu alors qu'il fait nuit.

Je regarde mon téléphone. "J'ai un soucis à la maison. Je ne reviendrai pas, rentre chez toi même si la traduction n'est pas terminée. À demain, 15h. Lorenzo "

On frappe à la porte. Des bouclettes apparaissent dans la  lumières derrière lui. Mon souffle devient difficile à trouver devant cette apparition.

-Hey... Tu es prête? Me demande t'il d'une voix douce.

-Oui, pardon je n'ai pas vu l'heure.. Je me lève précipitamment. Je laisse mes affaires en plan, je prend juste mon sac et mon téléphone et éteins la petite lumière. Derrière la porte je saisis ma veste en laine rose. Timothée reste dans le couloir, il n'entre pas dans cette antre obscure.
Je ferme la porte et le regarde adossé au mur d'en face.

-Tu as faim? Me demande t'il énigmatique.

Je ne peux pas ravaler le sourire qui vient se plaquer sur mon visage.

-Carrément !

-Alors en route ! Allons fêter ça !

Nous traversons tous les deux le musée presque vide. Daniel n'est pas dans les parages.

-On va ou ? Je demande
Il passe sa main sur sa fine mâchoire.

-Surprise.

Le Chef-d'œuvreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant