quarante

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Dimanche 09 septembre 2018.

Je me suis réveillée avec la boule au ventre. Ma gorge me serrait, elle me faisait mal. Mes yeux étaient humides. Et je transpirais beaucoup. Puis mes mains tremblaient pas mal. Je crois avoir fait un cauchemar. Ou alors c'est parce que la discussion de cette nuit m'a vraiment boulversé. Ou bien c'est parce que je stresse de rencontrer la famille de Lucas. Je ne sais pas. Mais mes tremblements ne s'arrêtent pas et mon cœur commence à s'affoler aussi.

« Ça va ? » C'est ce que j'ai cru comprendre. Enfin, ça doit faire bien cinq minutes que je suis assise en train de fixer un point imaginaire. Lucas me redemande comment je vais puis il m'appelle. Mais c'est que quand il me secoue que je tourne la tête vers lui.

« Qu'est-ce qu'il y a ? T'as fait un cauchemar ? » J'ai pas envie de lui dire que c'est peut-être à cause de sa famille alors je hoche la tête. Du coup, il me porte et me prend dans ses bras. Alors je vais mieux parce que son odeur corporelle m'apaise. Je sens que je vais pleurer, je ferme donc les yeux et essaye tant bien que mal de les ravaler. Mais je n'y arrive pas. Alors je pleure, pendant cinq, dix, 15 minutes, je n'en sais rien. Et Lucas ne dit rien, mais pas besoin de mot quand sa présence se ressent.

« Je peux annuler pour ce midi, si tu veux. Il est encore temps. » C'est la seule phrase qu'il a sorti. Alors je me suis levée et je lui ai sorti : "Non, on y va". Il a hésité puis il s'est levé à son tour.

On est arrivée avec une petite heure de retard chez la mère de Lucas. À vrai dire on a été très lents et longs à nous préparer. On a dû dormir trois heures maximum. J'ai été obligé de boire deux tasses de café pour me réveiller.

J'ai hésité à entrer dans la maison. Mais Lucas m'a tiré alors je n'ai pas vraiment eu le choix. Tout le monde était arrivé, tout le monde était déjà à table, tout le monde nous regardait. Et tout le monde nous souriait et avait l'air d'être content de nous voir. Tout le monde, ouais, sauf une personne : sa mère. Alors ça m'a direct refroidi, surtout que j'étais placée à côté d'elle à table. Heureusement que Tom était aussi à côté de moi, ça m'a réellement soulagé. Toute sa famille me posait des questions, exceptée sa mère. Ils me demandaient d'où je venais, ce que je faisais dans la vie, comment on s'était rencontré avec Lucas,... C'est quand sa tante m'a demandé mon âge que j'ai compris pourquoi sa mère ne m'appréciait pas.

Le repas s'est globalement bien passé, mis à part tous les regards noirs que m'a jeté sa mère. Et, évidemment, Lucas n'a rien vu et ne verra rien. Ça me rend super triste, d'autant plus qu'elle avait hâte de me rencontrer et que moi aussi, j'imagine. Pourquoi notre entourage pose problème dans notre couple ? Ça a commencé par mon frère et mon père, puis par son meilleur pote et maintenant sa mère ? Je me demande qu'est-ce qu'on a fait pour mériter ça.

« Salut ma belle. J'étais tellement dans mes pensées que je n'avais pas fait attention que la grand-mère de Lucas m'avait rejoint sur la terrasse. Alors je suis lui souris. Je peux venir avec toi ?
- Oui, bien sûr. »

Point de vue : Lucas (Lujipeka).

Ça doit faire cinq minutes que je suis devant la baie vitrée à observer Luna parler avec ma grand-mère. Elles sont en pleine discussion en faisant de grands gestes et beaucoup d'expressions sont posées sur leur visage. Et elles rigolent, beaucoup aussi. Alors moi, ça me rend tellement heureux. En même temps, ce n'est pas compliqué, comment ne pas être heureux en ayant une copine aussi formidable que Luna, et qu'en plus elle s'entende bien avec ma grand-mère ?

C'est un raclement de gorge de la part de ma mère qui me fait revenir à la réalité. Je tourne la tête vers elle en souriant mais je le perds vite en voyant son visage dur et froid.

« Je ne l'aime pas, ta copine.
- Quoi ?
- Elle ne m'inspire pas du tout confiance, elle va te quitter, Lucas.
- Mais n'importe quoi maman, qu'est-ce que tu racontes ?
- Elle est trop jeune pour toi, tu verras, elle ira voir ailleurs.
- Arrête. Regarde comment elle est avec Manou, t'expliques ça comment ?
- Ça, j'en sais rien. Mais tu sais, ta grand-mère a toujours été spéciale. Mais elle, non je te jure, je ne la sens pas du tout.
- Moi je la sens maman, et je l'aime.
- Ne viens pas pleurer sous mon toit si elle te quitte, Lucas. » Et sur ses mots, elle tourne les talons et part.

Point de vue : Luna.

C'est décidé : j'adore sa grand-mère, elle est juste géniale. J'ai clairement envie de l'adopter. Tom nous a rejoint aussi et ça fait je ne sais pas combien de temps qu'on parle tous les trois. Ça se voit que Tom adore sa grand-mère et qu'il a beaucoup de respect pour elle. Ça doit être pareil pour Lucas. Au moins, elle, elle m'accepte.

« Dis, Luna, tu joues d'un instrument ? Je me suis toujours posé la question. Me questionne Tom.
- Avant, oui. Mais plus maintenant.
- Tu jouais quoi ? Me demande Hélène, sa grand-mère.
- Du piano.
- Oh tu sais qu'il y a un piano ici ! S'enthousiaste Tom.
- Oui j'ai vu, mais je ne joues plus.
- Pourquoi ?
- Parce que... je... enfin... parce que c'était ma mère ma prof... et... bah, depuis qu'elle est morte je n'ai plus touché à un piano.
- Oh désolée ma chérie, je ne savais pas.
- Non, c'est rien, vous ne pouviez pas savoir.
- Luna, j'ai vraiment envie de t'entendre jouer.
- Tu sais, Tom, même si je le voulais, je ne suis pas sûre que ta mère soit d'accord.
- Pourquoi tu dis ça ?
- J'ai l'impression qu'elle ne m'aime pas.
- Elle se méfie. M'informe Hélène. Tu es la première fille que Lucas nous présente, tu es sa première réelle copine. Alors elle a peur, parce qu'elle protège ses enfants et qu'elle ferai tout pour eux. Et tu es jeune par rapport à lui, tu as l'âge de Tom je crois, non ? Je hoche la tête. Voilà, vous avez quand même quelques années de différence, alors elle te prend pour une gamine. Mais moi je le vois que tu n'en es pas une mais que tu es mature. Je le vois dans ta manière de parler, d'agir, de discuter avec moi. Tu as l'air très intelligente avec un lourd passé. Elle va finir par se décoincer et t'accepter, il lui faut juste du temps.
- Je peux vous faire un câlin ?
- Avec plaisir. » Alors je la prends dans mes bras en lui glissant un « merci beaucoup » à l'oreille.

Du coup, vu que Hélène m'avait beaucoup touché avec ses mots, j'ai accepté de jouer devant eux, au plus grand bonheur de Tom, il est trop mignon. J'ai retrouvé son frère, assis sur le canapé, les sourcils beaucoup trop froncés. Je me suis mise sur ses genoux et je l'ai questionné. Il m'a répondu qu'il n'y avait rien de grave et qu'au pire « on en reparlera plus tard ». Je lui ai donc expliqué que j'allais jouer du piano alors il a tout de suite arrêté de froncer les sourcils et un sourire a illuminé son visage.

Il m'a montré où était le piano, et je m'y suis installée. J'ai été paralysé pendant plusieurs minutes et j'ai vraiment failli pleurer. Hélène est arrivée derrière moi et a posé ses mains sur mes épaules. « Tu vas y arriver », elle m'a dit. Je me suis un peu détendue et j'ai commencé à jouer le premier morceau que j'ai apprit. La Lettre à Élise de Beethoven. J'ai pleuré durant toute la musique, je n'ai pas réussi à résister.

J'ai commencé tellement jeune mes premiers cours. J'avais cinq ans quand maman a commencé à m'apprendre. Et en vérité, ça m'avait réellement manqué. C'est vrai, c'était quand même ma passion numéro une.

Je me rappelle avoir voulu jouer quelques jours après la mort de maman. Mais j'étais dans cette phase de traumatisme, alors je n'ai même pas réussi à mettre mes mains sur les touches, et j'ai pleuré, pendant une heure. Je n'ai jamais voulu recommencer jusqu'à aujourd'hui.

Quand le morceau s'est achevé, je pleurais encore et je regardais toujours le piano, je n'osais pas les regarder ou même croiser le regard de mon copain. Il y a eu un petit moment de blanc et puis tout le monde s'est mit à applaudir. Alors j'ai relevé la tête et toutes les personnes présentes au repas s'étaient réunies dans le salon, pour m'écouter. Sa mère m'a sourit.

jolie fleur🥀Où les histoires vivent. Découvrez maintenant