cinquante-et-un

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Je crois que de ne plus être avec Lucas me soulage un peu. Mes cauchemars se sont calmés et je me repose la nuit. Même si le soir de notre rupture je n'ai pas dormi une seule seconde. Ça m'a épuisé pour le reste de la semaine et les nuits suivantes, j'ai dormi comme un bébé.

Je ne l'ai dit à personne que je n'étais plus en couple. Même Maël n'est pas au courant. Après, je pense qu'il a capté, vu comment je fuis ses questions sur Lucas, il doit se douter de quelque chose. Juliette et Lana ne savaient même pas qui était mon copain alors elles sauront encore moins que je n'en ai plus.

Est-ce que c'est bizarre d'autant cacher sa relation ? Je me rends de plus en plus compte que je n'assume vraiment pas d'avoir été avec lui. A croire que j'ai honte de lui alors que pas du tout. Je ne dirai pas que j'ai honte, seulement que j'ai très peur.

En fait, j'ai vraiment peur de tout. Depuis petite, des phobies se sont créées. Je n'ai jamais été courageuse et je ne connais pas le goût du risque. Déjà je suis phobique de la voiture depuis l'accident de ma mère alors que je n'étais même pas avec elle ce jour-là. Je n'évoque que rarement cette période de ma vie qui m'a littéralement traumatisé.

Des fois, j'ai encore du mal à réaliser que maman est vraiment morte, percutée par un camion. Des fois, je me dis que ce n'est que mon imagination ou que je suis encore dans un de mes multiples cauchemars.

De temps en temps, je repasse à côté de son ancienne maison et je reste devant pendant de longues minutes, me remémorant tout plein de souvenirs. Douze ans de ma vie dans cette même maison. De mes quatre ans à mes seize ans. Dès lors que mes parents ont divorcé, maman a emménagé dans cette petite maison et papa a prit un appartement. Quand papa a rencontré Flavie et qu'elle est tombée enceinte un an après de Robin, ils se sont installés dans la maison où ils sont encore maintenant. Maman, elle, n'a jamais bougé. Elle était très attachée à sa maison malgré le fait qu'elle ne soit pas très grande. Mais ça nous a toujours suffi pour tous les trois.

J'ai passé de tellement bons moments. C'est là que j'ai fait ma première soirée, que j'ai bu mon premier verre d'alcool, que j'ai fumé ma première cigarette... Maman m'avait défoncé ce jour-là, je m'en rappelle. Elle a fumé pendant longtemps et dès qu'elle avait réussi à arrêter, elle ne supportait plus l'odeur de la clope.

Elle n'a jamais accepté que je fume. Elle me laissait faire mais elle m'en voulait chaque fois que je sentais la cigarette. Du coup, je ne fumais jamais chez moi, toujours dehors, dans la rue, au lycée,... mais jamais chez elle, même dans son jardin. Même les copains avaient interdiction de fumer quand ils venaient. Ça les faisait chier mais ils respectaient.

Je me rappelle aussi une soirée d'Halloween où une dizaine de nos amis, à Maël et moi, étaient venus à la maison. Maman était au courant et d'accord, il n'y avait aucun soucis. Le problème était que tout le monde avait ramené de l'alcool et ça, elle ne savait pas. A un moment, dans la soirée, elle est rentrée dans la chambre de Maël où la fête se passait. Réflexe de ninja : on a réussi à cacher toutes les bouteilles d'alcool pour qu'elle ne remarque rien. Tout est nickel ; elle repart. Sauf qu'un des potes a eu la merveilleuse idée de reprendre une bouteille et de la cogner avec une autre. Je rappelle que ce sont des bouteilles d'alcool en VERRE. Donc elles se sont entrechoquées et ça a fait beaucoup de bruit. Donc maman a rouvert la porte et a vu toutes les bouteilles. Un énorme silence régnait dans la pièce : pas de musique et personne ne parlait, on n'osait même pas respirer. Au final, elle est restée calme, elle a confisqué toutes les bouteilles et c'est tout. Le lendemain, elle nous a même pas puni. Tous nos copains étaient choqués et jaloux de la mère qu'on avait. Si c'était eux, avec leurs parents, il se seraient fait défoncer à mort.
(histoire vraie)

Histoire de bien me mettre un coup au moral, j'ai réécouté Adieu Bientôt. Ouais, remuer le couteau dans la plaie, c'est ma spécialité. Mais du coup, j'ai analysé chaque parole que mon (ex) copain a écrit. Je ne l'avais jamais réellement fait et vu que le soir de notre rupture, j'ai pas fermé l'œil de la nuit, fallait que je trouve des choses pour m'occuper.

  « Je lui dis qu'elle s'embellit chaque
    fois que je la regarde » Bart Simpson

On pourrait penser que cette phrase pourrait être destinée à tout le monde, qu'il ne l'a pas forcément écrite pour moi. Pourtant, je sais que c'est de moi qu'il parle, je m'en rappelle encore. Je me souviens exactement du moment où il m'a dit ça, chaque mot de sa phrase sont restés gravés dans ma tête.

flashback

25 juillet 2018.

Après avoir passé toute la journée au studio avec Lucas et les gars, nous sommes partis manger tous les deux dans une pizzeria. C'est aujourd'hui qu'il m'a annoncé qu'il voulait que je pose ma voix dans son album. En vrai, même si je n'ai pas encore enregistré, je n'arrive pas à croire que je vais réellement faire ça. Ça m'excite de ouf et ça me fait trop plaisir. J'ai trop de chance d'être avec lui. Il est génial.

Après notre tête à tête au restaurant, on est directement allé chez lui parce qu'aucun des gars n'étaient chez lui. On en a évidemment profité et on a accaparé tout l'appartement pour faire nos affaires. C'était très intense mais beaucoup trop agréable.

Du coup, après notre je ne sais combien partie de jambe en l'air, je me suis réfugiée dans la salle de bain pour me laver. Lucas m'a rejoint dans sa douche et après quelques tentatives d'attouchements, je l'ai laissé tout seul parce qu'il ne voulait pas me foutre la paix. Je me suis installée face au miroir et j'ai fait ma petite routine du soir. Quand il est sorti de la douche, il a passé une serviette autour de sa taille, s'est assis sur le rebord du lavabo à côté de moi et m'a regardé.

« C'est dingue. Il a sorti tout en m'observant.
- De quoi ? J'ai demandé alors que je me crémais le visage.
- Bah... putain...
- Mais quoi ? J'ai vivement tourné la tête vers lui.
- Luna, c'est ouf, mais chaque fois que je te regarde, tu t'embellit. Genre, chaque fois que je pose les yeux sur toi, t'es encore plus belle. Et je me demande si c'est humain d'être belle comme ça. »

Sur le coup, je me rappelle ne pas avoir su quoi lui dire. J'étais un peu choquée de son aveu mais surtout très touchée. J'ai alors abandonné tout ce que je faisais et je me suis jetée sur lui, l'embrassant à pleine bouche. C'est ce jour-là que j'ai réussi à lui dire je t'aime pour la première fois, mais lui n'a pas besoin de me le dire pour que je le comprenne.

jolie fleur🥀Où les histoires vivent. Découvrez maintenant