Curiositée

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Sans prévenir, pour ne pas changer, Mélodie ouvrit grand la porte de sa chambre et entra sans demander. Sam était occupé à retaper ses notes de cours du jour qui était quelque peu incohérente, il fallait vraiment qu'il oublie. Ses cours en avait pâti tout au long de la journée.

Il tourna la tête vers la brun. Elle souriait un peu trop pour que ce soit de bonne augure.

- qu'est-ce que tu as encore ?

- ton père étant absent, j'ai un peu fouillé son bureau...

- quoi ?!? Mais tu es malade ma parole !

- ça valait le coup, crois moi !

Elle sortit de derrière son dos un paquet d'enveloppes toutes grossièrement ouvertes.

- crois-moi, c'était bien caché...

- je te crois, va les remettre tout de suite à leur place !

- pourquoi ? Elles te sont toutes adressées

Sam se figea un instant. Pourquoi fallait-il que tout s'enchaîne aussi bien. Il secoua imperceptiblement la tête pour se remettre les idées en place. Le monde ne tournait pas rond décidément.

- fait ce que je te dis, c'est mieux ainsi

- il verra rien, tu es parano ma parole

- peut-être que j'ai des raisons de l'être...

Mélodie le dévisagea un instant.

- tu connais leur contenu ?

- je veux pas en parler maintenant va ranger et arrête de fouiller partout

Mélodie soupira et parti en laissant grand ouvert. Sam tenta temps bien que mal de se déconcentrer sur ses notes et résumés mais rien à faire. Il finit par arriver involontairement, du moins sa conscience et son cerveau tentait de persister mais rien n'y fit. Facebook fut ouvert dans un navigateur privé pour se rassurer quand même. Il marqua un nom et un prénom dans la barre de recherche. C'était risqué mais il voulait en être certain.

Comme attendu, tout était toujours bloqué cadenassé. Pas étonnant. Mais sur sa photo de profil, il était toujours le même. Il se souvenait encore de chaque détail de son visage, son nez, ses yeux, sa bouche, des joues, sa mâchoire carré, sa beauté.

Sam sentit son cœur partir un instant mais il retomba vite dans la réalité, sa demi-sœur était de retour. La lycéenne entra comme chez elle encore une fois et laissa tombé sur les genoux du garçon un paquet de feuilles fraîchement imprimés. Elle n'était plus aussi joueuse qu'avant, son air était brave, elle comprenait enfin.

- j'ai fait ce que tu m'as dis, c'est remis à sa place mais tu m'as pas interdit de les photocopier

- mais ta curiosité a pris le dessus ? Tu as lu ? Comprit Sam

- possible, juste une, en vitesse. C'est un monstre.

- à qui le dis-tu...

- j'ai pas tout compris mais tu devrais vraiment les lire

Sam regarda les feuilles encore chaude, il y en avait une trentaine. Une pour chaque mois.

Il était tellement plongé dans ses pensées à chercher quoi faire qu'il ne remarqua pas le départ de Mélodie.

Il finit par prendre sa parka et l'enfila, il cacha à l'intérieur les feuilles dans une grande poche et sorti dehors, son père n'était toujours pas présent, il était chez des amis pour regarder un match de foot en buvant des bières et Lisa n'allait pas tarder à rentrer.

Automatiquement il allait dans le parc mais cette fois ci, il s'assit sur la terre même contre un arbre près de la table. Il sortit les feuilles.

Ce n'était pas une bonne idée, il le savait, il se faisait du mal. Dés les premières lignes du message manuscrit et photocopié, les larmes coulèrent sur ses joues et tel une rivière, ses joues continuèrent de ruisseler d'eau, des goutes tombants de temps à autre sur les feuilles. Il arriva à la moitié de la cinquième qu'il fut incapable de continuer. Elle était en ordre chronologique, datant de trois ans au paravant.

Ses pleures continuait de résonner dans l'obscurité. Son cœur était plus serré que jamais. Il avait l'impression d'étouffer dans son propre corps, ne sachant pas comment évacuer cette douleur atroce. Elle refaisait surface après tant d'année, elle était vive car tellement enfuie, tellement agrandie. Il ne pensait pas que ce pouvait être à ce point. Les larmes ne tarissaient pas, il était incapable de les stopper, de se défaire de ses souffrances. Les pansements avaient lâché et il lui été incapable de colmater à nouveau ses plaies rouvertes qui ne s'était jamais vraiment fermée.

Il n'avait rien entendu, ni attendu. Il ne l'avait pas vu entre ses larmes arriver.

Il y eut d'abord cette main qui de son pouce essuya inutilement son œil gauche. Elle était chaude et douce. Sa main glissa de joue à ses cheveux noir et l'autre bras vint entouré son corps recroquevillé en boule contre l'arbre. Le jeune homme se jeta littéralement dans les bras réconfortant. Tout s'emboîtait que trop bien. Ça lui faisait mal, c'était dangereux, beaucoup trop dangereux. Mais là, il s'accrocha à lui telle a une bouée de sauvetage pour pouvoir reprendre un peu d'oxygène et tenter de s'évader des ténèbres dans lesquels il se noyait depuis sa naissance.

Il n'aurait pas dû mais il ne pouvait pas faire autrement.

Renier Où les histoires vivent. Découvrez maintenant