Les choses commencent mal - Dimanche 10 Novembre 2019 - 9h20 - Benjamin
66h après l'enlèvement
- Mathias ? Tu vas où là ?
Une injonction plutôt qu'une réelle question, presque un défi lancé par la femme. Ni une ni deux, l'homme s'empressa de couper court à toute discussion.
- Je me casse !, Fusa la réponse, Loin de toi ! Ce soir je dors pas à la maison, si jamais ! Je voudrais pas que tout tourne autour de moi chez toi !
- Non... Je... Matt !
La voix de la femme se brisa un peu plus. Benjamin hésita à intervenir avant que les choses ne s'enveniment davantage, mais le langage corporel de l'autre homme était clair. Il cherchait à fuir. La situation, sa femme, la perte de son fils... Peu importe, au final. Il avait simplement besoin de s'échapper.
Bien sûr, Alice avait elle aussi repéré ce point. Elle s'avança vers la femme en pleures, au grand damne de Benjamin qui n'était pas venu ici pour s'improviser psychologue, mais pour aider à retrouver un jeune garçon.
- Madame, venez... Ne restez pas là, Dit Alice sur un ton doux qu'elle employait habituellement avec de très jeunes animaux particulièrement sauvages, On va rejoindre le groupe.
- Mathias ! Comment peut-il ?! Alors que Maël a disparu. Oh bon Dieu, Maël !
L'exclamation tenait plus du cri d'un animal blessé que des pensées cohérentes d'une mère de famille.
- Pourquoi personne ne l'appelle, hein ?! Si mon bébé est perdu dans les bois, il doit être terrifié ! Il ne va pas sortir de sa cachette si on ne l'appelle pas ! Je lui ai appris, vous savez ? A ce méfier des inconnus ! Il le sait, il est intelligent !
- J'en suis sûre. La rassura Alice avec une aisance que Benjamin ne pouvait qu'admirer, Vous avez raison. On devrait l'appeler ensemble. Je suis sûre que s'il est dans les parages, c'est en entendant sa maman l'appeler qu'il viendra. Mais vous devez garder votre calme. Pour qu'il comprenne que vous n'êtes pas fâchée.
Les sanglots de la femme redoublèrent avant de se tarir. Elle se para d'un air résolu et Alice en profita pour l'attraper par le bras et la conduire dans la direction opposée à son mari, appelant le disparu d'une voix légère, qu'elle espérait être reprise par la mère éplorée. En passant devant Benjamin, resté interdit tout ce temps, Alice lui jeta un regard entendu.
- Ramène le père. Marmonna-t-elle le plus discrètement possible.
Bien qu'extravagante, Alice était capable d'une incroyable réserve lorsque la situation l'exigeait.
Elle s'éloigna, tenant fermement le bras de la femme, laissant Benjamin seul avec une mission dont il se serait bien passé. Il était un agent d'action, excellait dans l'art de réagir aux situations les plus complexes, n'hésitant pas à maîtriser un homme plus vieux ou plus costaud que lui qui aurait un peu trop forcé sur la bouteille et représenterait un danger pour le personnel médical lui venant en aide, mais dès qu'il s'agissait de jouer les oreilles attentives, il avait beaucoup plus de mal. Lorsqu'il s'agissait d'enfants, tout se passait en général au mieux. Seulement le cerveau des adultes était beaucoup plus tordu et le jeune pompier ne maîtrisait pas encore l'art de jauger ses interlocuteurs au premier regard.
Quoi qu'il en soit, Alice ne lui laissait pas trop le choix. Le groupe de recherche avançait résolument et Benjamin était certain que personne d'autre n'était prêt à prendre le relai et à aller récupérer le père de famille furieux avant que ce dernier ne se perde dans les bois et qu'ils dusse organiser une deuxième battue pour retrouver sa trace. Il ignorait si l'homme avait un smarthphone sur lui, après tout.
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L'incandescent équilibre entre nous
RomanceBenjamin a tout pour être heureux : un métier de rêve, une fiancée aimante et un avenir tout tracé dans sa brigade de sapeurs-pompiers. Mathias, lui, s'est résigné à ne rien attendre de l'avenir : sa vie bien rangée a fait son succès, et c'est très...